Chapitre 2

Ce que représentaient Liliane et sa mère pour Ghislain, elle le savait parfaitement.

Dans son enfance, alors que ses parents étaient absorbés par leur travail, Brigitte Figuier, leur voisine, s'était souvent occupée de lui avec une générosité sans faille.

Cette mère célibataire, qui élevait seule sa fille Liliane, avait offert au garçon solitaire un refuge chaleureux.

Ghislain et Liliane avaient toujours été perçus comme le couple idéal, ces deux êtres destinés à grandir ensemble et à unir leurs vies un jour. Jusqu'à ce que, durant sa terminale, Liliane et sa mère quittent brusquement la France pour huit longues années.

Il y a trois mois, elles étaient revenues : Liliane ramenant sa mère, atteinte d'un cancer du pancréas, et venant tout naturellement frapper à la porte de Ghislain. Depuis ce jour, les absences de son mari s'étaient multipliées.

Et son excuse ? « Je suis à l'hôpital. »

Consciente de la dette de gratitude qu'il nourrissait envers elles, Nadège n'avait jamais exprimé le moindre reproche. Elle croyait leur lien assez solide pour résister à ce retour.

Au début, elle avait même aidé à contacter des spécialistes. Mais peu à peu, son implication semblait importuner autant Ghislain que Liliane. Les visages se fermaient, et Liliane se mettait à pleurer dès qu'elle apparaissait. Puis était venu l'ordre de Ghislain : « Cesse de venir à l'hôpital. »

Nadège ignorait ce qu'elle avait fait de mal. Elle avait patienté, sans cris ni drames, attendant que cette tempête passe, que Ghislain règle la situation, qu'ils retrouvent leur équilibre.

Mais son attitude depuis l'opération avait entamé sa confiance.

Rassemblant ses forces, elle lui a envoyé un message, joignant à mots froids son dossier médical mentionnant la grossesse extra-utérine.

Dans le même hôpital, Ghislain a froncé les sourcils en lisant le message.

Liliane, assise à ses côtés, s'est penchée pour lire à son tour.

Avant même qu'il ne puisse réagir, des larmes se sont mises à couler sur les joues de la jeune femme.

Elle a commencé à sangloter : « Désolée, Ghislain… Je n'aurais jamais dû te demander de l'aide. Je comprends que Nadège ait peur que je te prenne à elle, mais inventer une histoire aussi grotesque… Maman et moi, nous brisons tout sur notre passage. Je suis vraiment désolée. »

À la seconde où Ghislain avait vu le dossier médical, une brève inquiétude l'avait effectivement effleuré. Mais presque aussitôt, sa rationalisation a repris le dessus : ces trois derniers mois, entre la maladie de Brigitte et ses nuits passées à l'hôpital, il avait à peine partagé l'intimité de Nadège. Et puis, il la croyait incapable de le tromper.

Sa conclusion était donc implacable : c'était encore une de ses comédies pour attirer son attention, pour tester son amour.

Il a caressé les cheveux de Liliane avec tendresse et l'a réconfortée d'un ton doux : « Ce n'est pas ta faute. C'est moi qui l'ai trop gâtée. Elle ose mentir sans même rougir. »

« Merci, Ghislain… Sans toi, je ne sais pas ce que je deviendrais. » En sanglotant, elle s'est blottie contre lui.

Il lui a tapoté doucement le dos, offrant un réconfort silencieux.

Ce n'était qu'après l'avoir calmée qu'il a pris le temps de répondre à Nadège : « Brigitte n'en a plus pour longtemps. Tu sais tout ce qu'elle a fait pour moi enfant. Sois raisonnable, cesse tes caprices et ces mensonges odieux qui insultent jusqu'à l'enfant que nous espérons. Quand cette période difficile sera passée, je te montrerai toute ma gratitude. »