Chapitre 4

La foule autour d'eux s'épaississait, les chuchotements et regards accusateurs convergeant vers Nadège, comme si elle était la seule coupable.

Sans une seconde d'hésitation, Laurette s'est avancée et a giflé Ghislain avec une force surprenante : « Espèce de fou ! Tu as perdu la raison ? »

Frappé pour la première fois de sa vie, Ghislain a fixé Nadège avec rage : « Tu as trouvé une femme enceinte pour faire ton sale travail ? Nadège, ma chère grande designer, où est ta tenue ? »

Laurette a levé à nouveau la main, mais Nadège l'a retenue doucement : « Allons-y. La voiture m'attend. »

Ignorant superbement Ghislain et Liliane agenouillée à terre, elle a entamé son départ.

Jamais elle ne l'avait ainsi ignoré. Fou de colère, Ghislain a attrapé brutalement son poignet : « Arrête-toi ! Tu vas présenter tes excuses à Liliane ! »

Mais devant son silence, il a serré plus fort, la voix stridente : « Tu es sourde ? Je t'ai dit de t'excuser ! »

La douleur à son poignet n'égalait pas celle qui lui déchirait la poitrine. Nadège a inspiré profondément et s'est tournée enfin vers lui, le regard clair : « Pourquoi devrais-je m'excuser ? Qu'ai-je dit ? Qu'ai-je fait ? Et puis… Cet hôpital t'appartient ? Tu as le droit d'y être, et pas moi ? Très bien, mon cher Professeur Laflèche, puis-je vous demander où sont donc vos manières et votre éducation ? »

Son regard était d'une froideur inédite, comme posé sur un parfait étranger. Sous cette glace, Ghislain a senti malgré lui une pointe d'inquiétude l'envahir, et sa prise s'est relâchée imperceptiblement.

Sans ajouter un mot, Nadège a pris le bras de Laurette et est sortie de l'établissement, la tête haute.

Voyant le trouble de Ghislain, Liliane a tiré faiblement sur sa manche, une fausse inquiétude dans la voix : « J'ai encore tout gâché, n'est-ce pas ? »

Il s'est secoué, posant une main apaisante sur la sienne : « Non. Ce n'est pas toi. C'est moi qui l'ai trop négligée ces temps-ci. »

C'était ça ? La raison ? Sa négligence avait provoqué son insécurité et ensuite ces drames. Il lui suffirait de la rattraper, de la gâter. Elle était si raisonnable, toujours si douce et compréhensive.

Se berçant de cette pensée, il a refoulé l'angoisse qui avait effleuré son cœur et a entraîné Liliane vers l'ascenseur.

Il n'est rentré qu'en soirée. Sur le chemin, il a acheté spécialement des tulipes roses, les fleurs préférées de Nadège.

En poussant la porte, il l'a entendu terminer une conversation téléphonique : « D'accord. Préparez le contrat et envoyez-le-moi. Oui, au plus vite. »

« Quel projet ? » a demandé Ghislain, feignant une normalité qui n'existait plus, comme si le drame de l'hôpital n'avait jamais eu lieu.

« Une affaire professionnelle », a répondu Nadège sans le regarder, se dirigeant vers une autre pièce.

Il l'a rattrapée en deux pas et l'a enlacée par derrière : « Chérie, je suis rentré. »

Autrefois, elle se serait retournée pour lui caresser le visage avec tendresse avant de l'embrasser en souriant.

Mais maintenant ? Nadège n'avait même plus envie de lui adresser la parole.

Elle a repoussé fermement ses bras et est entrée dans la chambre, claquant la porte derrière elle.

Ghislain est resté planté là, déconcerté.

Il était rentré, après tout. Pourquoi lui faisait-elle la tête ?

Les trois dernières nuits à l'hôpital, Nadège avait mal dormi. Dès qu'elle fermait les yeux, elle revoyait Ghislain protégeant Brigitte et Liliane.

Peu après, l'homme est entré dans la chambre, encore humide de sa douche. Il a soulevé la couette et s'est glissé contre elle. Son bras longiligne a enlacé sa taille, son visage se nichant dans son cou.

« Désolé de t'avoir négligée ces derniers mois. Je te manque ? »

Il a approché ses lèvres pour l'embrasser, sa main commençant à caresser sa peau.

Était-ce romantique ? Non. Nadège n'a éprouvé que du dégoût.

Elle a évité son baiser, a repoussé son étreinte avec une répulsion palpable : « Ne me touche pas. »