Chapitre 6

L'avocat avait été rapide. Dès le lendemain de leur appel, le projet de contrat de divorce était rédigé. Nadège l'a parcouru et en était satisfaite.

Aucun conflit patrimonial ne l'opposait à Ghislain. Leur appartement, acheté par lui avant le mariage, avait été entièrement rénové à ses frais. Elle en avait conçu chaque détail, des structures à la décoration, y investissant autant d'argent que d'émotions. Chaque recoin portait l'empreinte de leurs rêves passés, surtout la chambre d'enfant, son œuvre la plus achevée, peuplée d'espoirs désormais brisés.

Mais désormais, ces murs ne lui inspiraient plus qu'amertume.

Voulant fuir ces souvenirs, elle a repris le travail plus tôt que prévu, entamant les formalités de départ.

Oui, elle démissionnerait. Pour quitter cette ville et retourner auprès de ses parents.

Mais alors qu'elle arrivait au pied de son immeuble de bureaux, elle est tombée sur les deux personnes qu'elle redoutait le plus : Ghislain, le visage fermé par une déception solennelle, et, derrière lui, sa prétendue « amie » ou « petite sœur » aux larmes toujours prêtes.

Il a attaqué sans préambule : « Nadège. J'exige que tu présentes des excuses sincères à Liliane. Je veux croire que tes mots n'étaient pas volontaires. »

Il était venu pour deux raisons : les excuses, et lui parler du dernier vœu de Brigitte.

Nadège a poussé un rire froid : « Quels mots ? Qu'ai-je donc fait de si grave pour mériter une visite du Professeur Laflèche en personne ? »

« Tu persistes ? Liliane, montre-lui ton téléphone. »

Celle-ci a secoué la tête avec une feinte tristesse avant de s'approcher pour saisir le bras de Nadège, entamant son numéro : « Insulte-moi tant que tu veux, je m'en moque. Mais ma maman n'en a plus pour longtemps… Elle veut nous voir mariés avant de… »

« Attends ! » Nadège s'est dégagée d'une secousse, interrompant net le flot de paroles, « Qu'est-ce que je t'ai soi-disant dit ? Explique-toi clairement. »

Sous le regard ferme de Nadège, Liliane s'est blottie derrière Ghislain telle un petit animal effrayé.

Ne supportant pas de voir sa « petite sœur » maltraitée, Ghislain s'est interposé aussitôt : « Cela suffit ! Elle essaie de préserver ce qui te reste de dignité, et tu persistes ? Tu as souhaité la mort de Brigitte, traité Liliane de salope… Dois-je vraiment tout répéter ? Nadège, où sont tes manières ? Tes parents ne t'ont-ils donc appris aucun respect ? »

Nadège a rassemblé toute sa force et lui a asséné une gifle cinglante.

Sous le choc, Ghislain a porté la main à sa joue, stupéfait : « Tu oses me frapper ? »

« Bien sûr que oui. Ça fait mal ? » a-t-elle rétorqué avec un rire amer, « Oui, je l'ai traitée de salope. Oui, je souhaite que sa mère meure au plus vite. Après tout, ce n'est pas la mienne, en quoi cela me regarde-t-il ? »

Elle a marqué une pause, le regard glacial : « Et elle dit que tu vas l'épouser ? Parfait. Je suis prête à divorcer à tout moment. »

Sans un regard de plus, elle a tourné les talons et est partie d'un pas décidé.

Ghislain a regardé sa silhouette s'éloigner, une angoisse sourde l'étreignant soudain.

Pourquoi tant d'indifférence ?

Pourquoi avait-elle accepté si facilement l'idée de son mariage avec Liliane ?

Où était passée la Nadège qui le charmait chaque jour de son sourire ?

Liliane a caressé sa joue avec une feinte tendresse, la voix douce et mielleuse : « Elle t'aime tant… Elle n'a pas voulu te faire mal. Ce n'étaient que des paroles de colère. J'irai lui parler, m'excuser. Tout redeviendra comme avant. »

Sa voix était si enveloppante qu'elle a apaisé malgré lui les tensions de Ghislain.

Comme ensorcelé, il a acquiescé, se raccrochant à cette croyance.

Il était convaincu d'une chose : Nadège ne le quitterait jamais.