Un Contrat de Douleur

« Madame, je souhaite rompre le contrat. Vous aviez dit que si, en cinq ans, Fabrice ne tombait pas amoureux de moi, il serait annulé. »

« Mais il y a Lionel, maintenant. Tu l'aimes tant… Comment pourrais-tu laisser un autre femme devenir sa mère ? »

« Je le peux », a répondu Irène d'un ton ferme, sans la moindre hésitation, « Mon mariage avec Fabrice n'a toujours été qu'un contrat. Cet enfant n'en était qu'une clause. Et maintenant que Blanche est de retour… Ils n'ont plus besoin de moi. »

Cinq années durant, elle avait cru sentir naître en elle quelque chose de vrai. Mais en retour, il n'y avait que déceptions répétées.

Jennifer a soupiré, songeant aux frasques de son fils : « D'accord. Il ne reste que sept jours. Signe ici, et dans une semaine, tu seras libre. »

Irène a signé avec détermination, puis a quitté d'un pas vif la villa des Bortel.

Une fois en voiture, son téléphone a vibré : la maternelle de Lionel venait d'envoyer des photos. Fabrice y riait aux éclats, son corps penché inconsciemment vers Blanche. Lionel, lui, serrait fort la main de cette dernière. Tous trois portaient les tenues familiales qu'Irène avait choisies pour la kermesse de l'école.

Non seulement Blanche l'avait remplacée auprès de son fils… mais elle lui volait jusqu'à sa place dans ces vêtements.

…

Autrefois, l'amour entre Fabrice et Blanche avait fait grand bruit.

Fabrice, héritier d'une fortune colossale. Blanche, une star montante prête à tout sacrifier pour sa carrière. Deux mondes opposés, réunis par passion.

Jusqu'à ce que Blanche, devenue célèbre, rompe. « Pour me consacrer à mon travail », avait-elle déclaré.

Fabrice en était détruit. Il avait sombré dans l'alcool, frôlant le geste irréparable…

« L'héritier du groupe Bortel tente de SE SUICIDER pour SON EX. » La nouvelle avait fait l'effet d'une bombe, propulsée en tête des tendances cette nuit-là.

Pendant ce temps, le père d'Irène gisait sur une table d'opération. Face à des frais médicaux exorbitants, elle se sentait au bord du gouffre.

C'était alors que Jennifer l'avait retrouvée : « Accepte mes conditions, et je paierai tout. »

Son offre ? Épouser Fabrice pour cinq ans et l'aider à panser son cœur brisé.

Ce soir-là, Jennifer avait présenté Irène à son fils : « Fabrice, veux-tu l'épouser ? »

Les deux femmes retenaient leur souffle. Si Fabrice refusait, le contrat s'évaporerait.

Mais il avait hoché la tête, le regard vide : « Peu importe. Si ce n'est pas Blanche… je m'en fous. »

...

Leur histoire avait commencé par un contrat. Une simple alliance d'intérêts, jusqu'à ce qu'Irène commette l'irréparable : tomber amoureuse de Fabrice au fil des jours. Lui, pourtant, restait toujours distant, refusant même de croiser son regard. Quant à leur mariage, le seul lien officiel entre eux, il trouvait toujours une excuse pour ne pas se rendre à la mairie, arguant d'un emploi du temps surchargé.

Puis était venu un jour où Fabrice était rentré ivre. « Faisons un enfant », avait-il murmuré en la scrutant intensément. Et cette nuit-là, ils s'étaient abandonnés au plaisir.

Elle y avait vu l'aube possible de leur roman, ignorant qu'en ce même jour, Blanche avait officialisé une nouvelle relation sur les réseaux sociaux...

Après la naissance de Lionel, Fabrice s'était légèrement radouci. Il ne feignait plus d'ignorer les attentions d'Irène.

Un temps, elle avait cru alors que le bonheur s'installerait, lentement mais sûrement.

Jusqu'à ce jour où, alors que Blanche avait annoncé sa rupture, les paparazzis les avaient surpris, elle et Fabrice, main dans la main au bord de la rivière.

Les titres étaient éclatants : « Les amants d'autrefois ont-ils rallumé la flamme ? »

Dès lors, Blanche était revenue dans leur vie. Fabrice l'avait même invitée chez eux.

Quant à Lionel, d'ordinaire si réservé, il s'était métamorphosé en sa présence. Il ne voulait plus la lâcher, réclamant sans cesse de jouer avec elle.

Fabrice, qui prétendait détester les photos, n'avait jamais pris un seul cliché avec Irène en cinq ans de mariage. Mais depuis le retour de Blanche ? L'appareil photo dernier cri, des centaines de clichés d'eux deux ou trois... Il découpait même les articles de journaux qui les montraient en rendez-vous galants, constituant pieusement des albums souvenirs.

Pour elle, il n'y avait que tendresse et concessions.

Irène avait compris enfin : peu importaient les années qu'elle lui consacrerait, le cœur de cet homme ne lui appartiendrait jamais. Blanche y régnait en maîtresse absolue.

Ce mariage n'avait toujours été qu'un contrat... Sept jours encore, et elle pourrait enfin fuir cette relation humiliante pour conquérir l'étranger et réaliser son rêve d'écriture.

Cette résolution au cœur, elle a saisi son téléphone, a contacté une maison d'édition internationale et a réservé un billet pour un vol dans sept jours.

En rentrant, elle a trouvé sa place de parking occupée par la voiture de Blanche. Et à l'intérieur... Blanche, Fabrice et Lionel, réunis comme une famille...