AlessiaJe n’aurais jamais dû accepter cette invitation.Le velours des murs absorbe les murmures feutrés des conversations, créant une ambiance presque irréelle dans cette salle de réception. Les lustres en cristal projettent une lumière dorée, faisant scintiller le marbre du sol et les bijoux étincelants des invités. Les hommes, habillés de costumes parfaitement ajustés, discutent à voix basse, des sourires de façade sur leurs lèvres. Les femmes, drapées dans des robes luxueuses, rient légèrement en jouant avec le bord de leurs coupes de champagne. Tout semble trop parfait, trop maîtrisé, comme si chaque détail de cette soirée avait été savamment orchestré dans le but de masquer une vérité plus sombre.Je ne devrais pas être là.Je le sais, je le sens dans chaque fibre de mon corps.Mais Bianca Russo a été persuasive. Trop persuasive.— "Alessia, tu ne peux pas refuser cette opportunité."— "Quelle opportunité ?"— "Être vue au bras d’un homme de pouvoir, bien sûr."Bianca n’a jamai
AlessiaJ’aurais dû répondre à ce message.Ou peut-être que j’aurais simplement dû l’ignorer.Mais je n’ai rien fait.Le message de Lorenzo est resté sur l’écran de mon téléphone, une menace silencieuse déguisée en invitation. "Ce soir. 21 h. Villa Valente." Il ne s’embarrasse pas de détails inutiles. Il se contente d’ordonner, comme si ma présence à ce rendez-vous était une évidence.Je suis restée assise pendant une heure entière, le téléphone à la main, le cœur battant à un rythme irrégulier. Chaque fibre de mon corps hurlait de rester loin de lui. J'ai vu le piège se refermer, j'ai senti l'ombre de son emprise planer au-dessus de moi.Et pourtant…Ce n'est pas l'envie qui m'a retenue.C'est la peur de ce qu'il pourrait me faire s'il s'apercevait que je lui avais désobéi.Mais je suis restée chez moi.Je me suis enfermée dans mon appartement, les rideaux tirés, le souffle court. J’ai tenté d’oublier la sensation de ses doigts autour de mon poignet, la chaleur brûlante de son regard
AlessiaJ’attrape mon téléphone sur la table de chevet. 3 h 12.Aucun message. Aucun appel.Je pousse un soupir tremblant, posant ma main contre ma poitrine pour tenter de calmer la panique sourde qui s’agite en moi. Lorenzo est parti. Il a respecté ma décision.Alors pourquoi est-ce que j’ai cette sensation persistante que quelque chose ne va pas ?Un bruit.Infime. Presque imperceptible.Je me redresse dans le lit.— "Qui est là ?"Silence.Je tends l’oreille, le cœur prêt à exploser. Puis je l’entends de nouveau. Un craquement léger, un bruit de pas.Mon sang se glace.Je me lève lentement, le souffle suspendu. J’attrape une lampe de chevet comme une arme improvisée et avance à pas feutrés vers le salon.— "Qui est là ?" je répète, la voix tremblante.Le craquement résonne à nouveau. Plus proche cette fois.Je contourne le canapé, le cœur battant dans mes tempes. La porte d’entrée est fermée, mais le loquet a été déverrouillé.Mon souffle s’arrête.La lumière du lampadaire de la ru
AlessiaJe me parle à moi-même, les yeux rivés à mon reflet dans le miroir. Mon regard est trouble, mes joues rouges, mes lèvres encore gonflées par l’intensité du moment. Je me hais pour ce frisson qui me parcourt quand je repense à sa voix rauque dans mon oreille.Un son.Une vibration.Mon téléphone.Je sors de la salle de bain, attrape le portable sur la table. Un message.Lorenzo : "Dors, princesse. Tu vas avoir besoin de toutes tes forces pour me résister."Mon cœur bondit.Je jette le téléphone sur le canapé, le souffle coupé.Il joue avec moi. Il s’amuse.Et le pire ? C’est que je sens déjà le désir remonter, là, entre mes cuisses.Je serre les poings, furieuse contre lui. Contre moi-même.Je ne suis pas à lui.Je ne serai jamais à lui.J’inspire profondément et me dirige vers la cuisine. Peut-être que manger quelque chose m’aidera à retrouver mes esprits. Mais alors que j’ouvre le frigo, une ombre se glisse derrière moi.— "Tu ne devrais pas rester seule, Alessia."Mon sang s
AlessiaJe suis en train de verser le café dans une tasse quand j’entends un bruit. Une vibration. Mon téléphone.Je le saisis, le cœur battant.Un message.Lorenzo : "Ouvre la porte."Je me fige.— "Quoi ?"Un coup résonne contre la porte.Je m’approche lentement, le téléphone serré dans ma main.— "Ouvre, Alessia."Je reconnaîtrais cette voix entre mille.Je pose ma main sur la poignée.— "Pourquoi ?"— "Ouvre."Mon cœur bat à tout rompre. Mon corps lutte, mais mes doigts tournent la clé. La porte s’ouvre lentement. Lorenzo est là, appuyé contre l’encadrement, vêtu d’un manteau noir trempé par la pluie. Ses cheveux sombres sont humides, ses yeux d’un noir insondable.— "Tu es fou."Il esquisse un sourire en coin.— "C’est possible."Il entre sans attendre mon autorisation, refermant la porte derrière lui. Il retire son manteau, laissant tomber quelques gouttes sur le sol.— "Tu ne m’as pas répondu hier soir."— "Parce que je n’ai rien à te dire."Il s’approche, son regard brûlant.—
AlessiaJe serre les dents.— "Si c’est ce que tu voulais, pourquoi m’avoir fait venir ?"Il sourit, ce sourire lent et calculé qui me fait frémir malgré moi.— "Parce que je veux comprendre pourquoi tu résistes autant."— "Tu n’as pas encore compris ?" Je le fixe, les yeux brûlants. "Je ne suis pas un pion dans ton jeu."Il se penche, son visage à quelques centimètres du mien.— "Non. Tu es bien plus que ça."Mon souffle se bloque dans ma gorge.— "Alors pourquoi ce petit jeu ?"Il passe un doigt sur ma mâchoire, remontant lentement vers ma joue.— "Parce que je veux savoir jusqu’où tu iras avant de céder."Je me tends, mon corps répondant involontairement à ce contact. Il le sent. Je le vois dans la manière dont son sourire s’élargit légèrement.— "Tu perds ton temps."— "Vraiment ?"Ses doigts glissent lentement jusqu'à ma gorge, s’arrêtant juste sous ma mâchoire. Sa main est chaude, puissante, et je déteste le frisson qui me parcourt.— "Parce que ton souffle me dit le contraire."
Lorenzo— "Tu n’as pas changé, Alessia." Je parle calmement, mais mes paroles sont lourdes de sous-entendus. "Tu crois que tu peux contrôler ce qui va se passer entre nous. Tu es loin de la vérité."Elle me fixe, une lueur d’incertitude dans ses yeux, mais elle ne cède pas. Elle n’a pas encore abandonné.— "Je ne contrôle rien, Lorenzo." Elle répond froidement, mais je sens la guerre intérieure qui fait rage en elle. "Et toi, tu crois tout savoir, n'est-ce pas ?"Je m'approche d'elle, mes pas lents et calculés. Je m'arrête à quelques centimètres, de sorte que chaque mouvement devient une menace palpable.— "Je ne crois rien." Je la fixe intensément, observant le moindre de ses gestes. "Je sais ce qui te fait vibrer. Et ça, tu ne peux pas le cacher."Elle fait une pause, ses lèvres tremblant légèrement, avant de sourire. Un sourire qui pourrait être perçu comme une victoire… mais je vois au fond de ses yeux qu'elle se cache derrière ce masque.— "Tu te trompes."J’étends ma main, effle
LorenzoJe n’ai jamais aimé qu’on me dise "non". Et Alessia, malgré ses réticences, malgré ses mots de résistance, est une "non" que je m’apprête à briser. Il y a quelque chose d’envoûtant dans cette femme, un feu qui brûle en elle et que je compte bien raviver.— "Tu n’as pas d’autre choix que de céder, Alessia." Je le sais. Et elle le sait aussi.Je m’avance lentement vers elle, mon regard ne quittant jamais son visage. Elle recule instinctivement, mais je suis plus rapide, plus déterminé. Cette danse, je la mène. Chaque pas, chaque mouvement, chaque souffle me rapproche de l’étreinte finale.Elle se tourne brusquement, prête à fuir. Une fuite que je ne vais pas tolérer. Je l’attrape par le bras, la faisant se retourner brutalement pour faire face à moi.— "Tu me fuis encore, mais tu sais que tu ne peux pas m’échapper." Ma voix est calme, mais le sous-texte est clair. Je ne la laisserai pas partir.Elle serre les dents, le regard brûlant de défi.— "Ne me touche pas." Elle essaie de
EmilyJe me suis maquillée. Très lentement. Comme une armure. Chaque trait de khôl, chaque rougeur camouflée, chaque touche de fond de teint est une gifle à mon humiliation. Je me recompose. Je me repeins.Je redeviens la femme qu’il a choisie de regarder hier soir.Pas celle qu’il regrette ce matin.Quand j’entre dans la cuisine, il est déjà là.Assis.Immobile.Le regard dans le vide.Il tient une cigarette entre ses doigts, mais elle est éteinte.Je n’ose pas parler. Mes talons claquent. Il ne lève même pas les yeux.Mais je sens qu’il sait que je suis là.Il sait toujours.— Elle est partie, je murmure.Toujours ce silence.Mon cœur se comprime. J’ai froid. Ou chaud. Je ne sais plus.Je cherche ses yeux. Il me fuit.Je déteste ça.— C’est ce que tu voulais, non ? Qu’elle parte ?Rien.Et puis, un souffle. Presque un ricanement.— Ce que je veux, Emily… tu serais incapable de le comprendre.Il relève enfin les yeux vers moi.Et dans son regard… ce n’est pas de la haine.C’est pire.
AlessiaJe savais. Depuis le moment où j’ai entendu la porte claquer derrière moi. Depuis le silence trop lourd, trop chargé. Depuis le parfum qui n’était pas le mien dans sa chambre. J’ai su.Mais ce n’était pas la trahison qui me faisait trembler.C’était le fait de l’avoir laissé faire.Je m’étais levée ce matin-là avec un vertige au creux de la poitrine, comme une main invisible qui pressait contre mon sternum. Une intuition. Un souffle glacé sur ma nuque. J’ai marché dans cet appartement comme on traverse un champ de mines. Chaque pas une gifle. Chaque silence un hurlement.Il n’était plus seul.Je ne l’ai pas confronté. Je ne l’ai même pas regardé.Parce que regarder Lorenzo, c’est se perdre. Il t’arrache les pupilles pour y verser ses ténèbres. Et toi, tu crois que c’est de l’amour.Je suis partie.Sans bruit.Et pourtant, je hurlais à l’intérieur.Je me suis réfugiée dans un lieu sans nom, un appartement prêté par une amie qui ne posait pas de questions. Une planque sans miroi
LorenzoElle est accrochée à moi comme une morsure. Une morsure de possession. De revanche. Sa robe remonte sous mes paumes, ses hanches frémissent sous la colère. Ce n’est pas un baiser qu’elle m’offre : c’est une déclaration de guerre. Et moi, j’y réponds comme je sais le faire. Froidement. Brutalement. Sans une once de tendresse.Je la plaque contre la porte. Le bois gémit dans son dos. Elle respire fort, halète presque. Ses ongles se plantent dans ma nuque, puis glissent jusqu’à mes épaules. Elle veut griffer, marquer, mordre. Je la laisse faire. Je veux qu’elle croit qu’elle peut renverser la partie. Juste assez longtemps pour qu’elle oublie la règle essentielle : c’est moi qui distribue les cartes.— Dis mon nom, ordonne-t-elle, la voix tremblante d’un désir imbibé de rage. Rappelle-toi à qui tu appartiens.Je souris contre sa peau. Lentement. Cruellement. Mon souffle brûle son oreille. Une main sur sa gorge, juste pour qu’elle sente que sa vie m’appartient si je le décide. Just
LorenzoJe suis encore nu lorsqu’elle me regarde. Pas avec les yeux d’une amante. Avec ceux d’une femme qui sait. Qui voit. Qui comprend, trop peut-être.Le silence est revenu. Mais ce n’est plus celui du défi. C’est celui d’un entre-deux, fragile, suspendu, où tout peut basculer.— Bianca… souffle-t-elle, le regard accroché à mon visage fermé.Je me lève. Me rhabille lentement, presque mécaniquement. Comme un soldat qui enfile son armure après une nuit volée au champ de bataille.— Elle n’a pas le droit d’être là, je murmure.Mais c’est faux. Je le sais. Et Alessia le devine.Elle s’approche. Enfile sa chemise sur ses épaules. Mes doigts veulent l’arrêter, la retenir. Mais je me retiens. Parce que je sais ce qui vient. Parce que je le redoute autant que je le mérite.— Tu l’as laissée revenir ? me demande-t-elle sans hausser le ton.Je ne réponds pas tout de suite. Je cherche mes clés. Mon téléphone. Mon regard ne parvient pas à croiser le sien.— Je ne l’ai pas arrêtée, dis-je enfin
LorenzoLe silence d’Alessia s’imprime dans l’air comme une empreinte de feu.Ce n’est pas un silence de peur. Ni même de recul.C’est un silence qui me défie. Qui m’oblige à rester là, face à moi-même. Face à elle.Je referme la porte du sanctuaire derrière nous. Ce lieu que personne ne voit. Ce lieu où dorment les restes de ce que j’ai été. Les chaînes visibles, oui. Mais surtout celles que j’ai moi-même forgées, une à une, pour me protéger de ce qu’elle est en train de détruire : mon armure.Elle fait le tour lentement. Ses doigts glissent sur les cadres. Les lettres. Les traces.Elle ne dit rien.Et pourtant, je l’entends hurler à l’intérieur.Je m’assois. Parce que je sens que si je reste debout, je vais vouloir fuir. Et si je fuis, je la perds.— Tu n’as pas besoin de tout comprendre maintenant, dis-je.Elle me tourne le dos. Sa voix est calme, mais coupante.— Tu ne me diras plus ce dont j’ai besoin.Touché.Je la regarde, les mains jointes, le dos tendu.Alessia n’est pas comm
AlessiaLe silence est plus lourd que tous leurs mots.Il n’écrase pas seulement l’air entre nous, il pèse contre mes os, comme un poids que je ne sais plus porter.La pièce est vide à présent. Les murs suintent encore la mémoire de ce qu’il m’a montré, mais lui, il est déjà ailleurs. Comme si ce baiser n’avait jamais existé. Comme si ce moment de vulnérabilité brûlante n’avait été qu’un mirage vite effacé.Je le suis dans les couloirs sombres, encore une fois. Mais cette fois, mon cœur est lourd d’un feu nouveau. Un feu qui brûle de questions, de doutes. De colère. Ce n’est plus la curiosité qui m’anime. C’est le besoin vital de savoir si je suis en train de me perdre dans une illusion soigneusement construite ou si je suis, pour lui, une faille dans l’armure.Quand nous atteignons sa chambre, je me fige.— C’est ici que tu dors ?Il hoche la tête, l’air absent. Il retire sa veste, la pose sur le dossier d’un fauteuil de cuir. Les gestes sont précis, maîtrisés. Habituels. Mais je ne
AlessiaL’air semble plus lourd dès l’instant où nous franchissons les portes du manoir.Je sens son monde me happer, lentement, méthodiquement. Comme une mer noire qui attendait mon pas pour se refermer sur moi.Lorenzo ne dit rien. Il ne m’explique pas. Il ne s’excuse pas.Il marche, droit devant, son ombre immense avalant le sol.Et moi, je le suis.Pas par soumission.Pas par peur.Mais parce qu’il a tendu la main.Et que je l’ai prise.Mais à peine avons-nous passé le hall que les flammes de l’épreuve s’élèvent déjà.Bianca est la première à apparaître.Elle descend lentement l’escalier central, vêtue d’un tailleur blanc impeccable qui tranche avec la froideur de son regard.Ses yeux me balayent comme une lame. Aucun sourire ne déforme son visage parfaitement figé.Elle ne s’adresse pas à moi. Elle parle à Lorenzo, comme si je n’existais pas.— Tu ne m’avais pas dit que tu ramenais un fardeau, Lorenzo.Il ne répond pas. Mais moi, je la fixe. Droit dans les yeux.— Il paraît que l
LorenzoJe la serre contre moi comme un naufragé agrippe sa dernière bouée au milieu d’un océan furieux.Elle est là. Chaude. Présente. Respirante. Vivante.Et pourtant, une partie de moi refuse d'y croire. Comme si ce contact n’était qu’une illusion, un mirage tissé par mon esprit malade, une trêve accordée par un dieu auquel je n'ai jamais cru.Je lutte contre l’instinct animal de la garder prisonnière contre ma poitrine, de refermer mes bras autour d’elle jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus s’échapper.Je glisse mon visage dans le creux de son cou, là où sa peau palpite d’une chaleur si tendre, si férocement familière que cela me donne le vertige.Je respire.Sa peau.Sa douceur.Son odeur unique, mélange cruel de lumière et de damnation.Je voudrais l'engloutir. L’absorber. La fondre en moi.Anéantir cette distance, cette fraction d’espace, cette marge invisible qu’elle laisse toujours, même quand elle semble me tendre la main.— Je ne peux pas te perdre, soufflé-je dans un murmure
AlessiaJe reste blottie contre lui longtemps.Pas par faiblesse.Pas par amour.Par instinct.Il est chaud, solide, vivant.Son odeur m’enveloppe, mélange de tabac froid, de cuir et d’une note plus sombre, plus âcre, comme un secret que lui seul possède.Et même si une part de moi hurle de ne pas céder, l'autre, celle qu'il a réveillée, murmure que c'est déjà trop tard.Quand je me recule enfin, ses mains hésitent.Elles me retiennent sans m’enfermer, glissent le long de ma taille comme pour s’assurer que je suis bien réelle, que je ne vais pas m’évaporer sous ses yeux.Comme si sa peau tentait de m’inscrire dans la sienne.— Tu devrais me haïr, souffle-t-il.Sa voix est rauque, chargée d’un poids qu’il ne cache pas.Je le regarde.Longtemps.Je veux qu’il sente le poids de mon regard autant que je ressens le poids du sien.— Peut-être que je le ferai demain, dis-je enfin.Son sourire est une fracture.Un éclat de douleur, un aveu qu’il ne peut pas formuler autrement.Il sait.Comme