Alessia
Je suis en train de verser le café dans une tasse quand j’entends un bruit. Une vibration. Mon téléphone.
Je le saisis, le cœur battant.
Un message.
Lorenzo : "Ouvre la porte."
Je me fige.
— "Quoi ?"
Un coup résonne contre la porte.
Je m’approche lentement, le téléphone serré dans ma main.
— "Ouvre, Alessia."
Je reconnaîtrais cette voix entre mille.
Je pose ma main sur la poignée.
— "Pourquoi ?"
— "Ouvre."
Mon cœur bat à tout rompre. Mon corps lutte, mais mes doigts tournent la clé. La porte s’ouvre lentement. Lorenzo est là, appuyé contre l’encadrement, vêtu d’un manteau noir trempé par la pluie. Ses cheveux sombres sont humides, ses yeux d’un noir insondable.
— "Tu es fou."
Il esquisse un sourire en coin.
— "C’est possible."
Il entre sans attendre mon autorisation, refermant la porte derrière lui. Il retire son manteau, laissant tomber quelques gouttes sur le sol.
— "Tu ne m’as pas répondu hier soir."
— "Parce que je n’ai rien à te dire."
Il s’approche, son regard brûlant.
— "Vraiment ?"
Je recule jusqu’à ce que mon dos rencontre le mur.
Il est là, tout proche. Trop proche. Son souffle chaud caresse ma peau.
— "Tu devrais partir."
Son sourire s’élargit.
— "Je viens à peine d’arriver."
— "Je n’ai pas besoin de toi."
Ses doigts effleurent ma joue, et mon corps répond immédiatement à ce contact.
— "Ton corps me dit le contraire."
Je ferme les yeux, tentant de contrôler les frissons qui me traversent.
— "Tu joues à quoi, Lorenzo ?"
Il se penche, ses lèvres frôlant ma tempe.
— "Ce n’est pas un jeu, Alessia. C’est toi."
Il s’écarte soudainement, me laissant respirer.
— "Habille-toi. On sort."
Je le fixe, incrédule.
— "Pardon ?"
— "Habille-toi."
— "Je n’ai aucune raison de te suivre."
— "Si."
— "Laquelle ?"
Il s’approche de nouveau, son souffle frôlant ma peau.
— "Parce que je le veux."
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Lorenzo
Elle me suit.
Elle ne le sait pas encore, mais elle a déjà perdu la bataille.
Alessia est fière. Forte. Mais elle est aussi vulnérable. Je le vois dans la manière dont elle serre les poings quand elle me regarde. Dans le frémissement de sa lèvre inférieure quand je suis trop près.
Elle lutte contre ce qu’elle ressent.
Mais je vais briser cette résistance.
Nous sommes dans ma voiture. Alessia fixe le paysage à travers la vitre, son profil éclairé par la lumière des lampadaires. Sa robe noire épouse parfaitement ses courbes, dévoilant la naissance de ses cuisses. J’ai choisi cette robe.
— "Où est-ce qu’on va ?" demande-t-elle finalement.
— "Tu verras."
— "Je pourrais sauter de la voiture, tu sais."
Je souris.
— "Tu pourrais. Mais tu ne le feras pas."
Elle se tourne vers moi, le regard noir.
— "Pourquoi ?"
— "Parce que tu es curieuse."
Elle ne répond pas, mais son silence en dit long.
Nous arrivons devant un grand bâtiment illuminé. Un club privé. Les gardes nous reconnaissent immédiatement et ouvrent les portes sans un mot. Je sors de la voiture, contournant le véhicule pour lui ouvrir la porte.
— "Viens."
Elle hésite.
Mais elle sort.
Ma main se pose sur le creux de son dos, la guidant à l’intérieur.
L’atmosphère est lourde, saturée de musique, de rires et de conversations étouffées. Alessia observe tout autour d’elle, mal à l’aise. Les hommes en costume, les femmes aux robes ajustées, les serveurs qui se déplacent avec une précision militaire.
— "Pourquoi m’avoir amenée ici ?"
Je me penche à son oreille.
— "Parce que je veux que tu comprennes."
— "Comprendre quoi ?"
Je fais signe à l’un des serveurs. Deux verres apparaissent immédiatement. Je tends le sien à Alessia, mais elle ne le prend pas.
— "Je ne bois pas."
Je souris.
— "Ce n’est pas du poison."
Elle me fixe, hésitante, puis prend le verre. Elle le porte à ses lèvres, mais ne boit pas.
Mes doigts effleurent son poignet.
— "Dans ce monde, Alessia, le pouvoir n’est pas donné. Il se prend."
Son regard se durcit.
— "Et toi, tu comptes le prendre par la force ?"
Je me rapproche, son parfum sucré m’enveloppant.
— "Je compte le prendre par toi."
Elle se raidit.
— "Je ne suis pas un trophée."
— "Non." Je me penche vers son oreille. "Tu es la clé."
Un frisson parcourt sa peau.
Je me recule, la laissant dans le chaos de cette révélation.
— "Tu pourrais partir."
Elle serre les dents.
— "Et si je reste ?"
Je souris, satisfait.
— "Alors le jeu commence."
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Alessia
Je suis piégée.
Il joue avec moi, mais je sens que ce jeu est bien plus dangereux qu’il n’y paraît.
Je devrais fuir.
Je devrais partir.
Mais je reste.
Mon cœur tambourine dans ma poitrine alors que Lorenzo glisse une main sur ma taille. Son sourire est un avertissement autant qu’une promesse.
Je le déteste.
Je le désire.
Je suis en train de perdre.
Je suis toujours dans ce club, prise au piège entre la musique assourdissante et la présence de Lorenzo, omniprésente, étouffante. Mon verre est toujours à la main, intact, mais mes doigts tremblent légèrement sous l’intensité de son regard.
Il est là, assis à côté de moi dans une alcôve privée, une main négligemment posée sur le dossier du canapé, son bras frôlant mes épaules. Il semble parfaitement à l’aise dans cet univers de luxe et de corruption, comme s’il appartenait naturellement à ce monde.
— "Tu comptes rester silencieuse toute la soirée ?" demande-t-il, sa voix basse se frayant un chemin à travers le vacarme ambiant.
AlessiaLe soleil entre doucement dans la chambre, glissant à travers les voilages comme un voile doré. La lumière caresse ma peau, tendue et sensible, là où mon ventre s’arrondit chaque jour un peu plus. Ce ventre, ce secret vivant que je porte en moi, battant au rythme d’une vie nouvelle, fragile et puissante.Je sens la chaleur de Lorenzo à mes côtés, son souffle calme qui effleure ma peau, ses doigts qui cherchent les miens. Il dort encore, mais je sais qu’il m’observe, même dans ses rêves. Je tourne lentement la tête vers lui, nos regards se croisent dans un silence chargé d’émotions.Ses yeux sont lourds, pleins de cette lumière qui parle d’espoir, de désir et d’une tendresse infinie. Il s’approche doucement, sa main glisse sur ma joue, caresse mes lèvres entrouvertes, comme pour vérifier que je suis bien là, réelle, présente.— Tu es magnifique, murmure-t-il, la voix rauque de cette émotion que je ressens aussi.Un frisson me parcourt, un mélange de douceur et d’une attente brû
AlessiaLe soleil entre par la fenêtre, doux, chaud, presque timide.Il caresse ma peau tendue, arrondie, et semble prendre soin de ce secret que je porte.Un secret vivant. Un battement dans mon ventre.Je pose une main sur ce ventre qui s’arrondit chaque jour un peu plus, comme on touche un trésor fragile, une promesse née du feu et de la nuit.Lorenzo dort encore à mes côtés.Ses doigts effleurent doucement ma peau, glissant sur mon ventre comme pour sentir, lui aussi, ce miracle silencieux.Je souris, les yeux embués.Ce chemin que nous avons parcouru les douleurs, les luttes, les silences, les renoncements tout cela trouve aujourd’hui un sens profond, presque sacré.Ce bébé, c’est la vie que nous avons choisie ensemble.Un avenir.Un commencement.Je me redresse lentement.Lorenzo ouvre les yeux, me regarde.Dans son regard, il y a cette lumière, celle que j’ai apprise à reconnaître celle d’un homme qui a renoncé à fuir, qui a embrassé l’incertitude et la beauté du réel.— Il bou
LorenzoElle dort encore.Le plateau est vide. Le café bu. Les miettes oubliées.Mais la bague, elle, brille sur sa main comme une vérité nue.Je la regarde, allongée là, offerte à la lumière du matin.Pas apprêtée. Pas conquérante.Juste elle. Désarmée. Présente.Alessia, fiancée.Deux mots que je n’aurais jamais cru pouvoir prononcer un jour sans trembler.Et pourtant, ce matin, c’est le seul silence qui me tient debout.Je reste là, assis au bord du lit.Je ne bouge pas.Je ne veux pas la réveiller.Mais je ne peux plus dormir non plus.Parce que dans le silence de cette chambre,il y a un autre nom qui me brûle encore la poitrine.Un nom que je n’ai pas prononcé depuis des semaines, mais qui me suit comme une ombre.Valeria.Je baisse les yeux.Je me demande ce qu’elle dirait, si elle savait.Si elle voyait cette bague.Si elle comprenait ce que je suis en train de faire :vivre enfin sans elle.Je sens une vieille culpabilité se tordre en moi.Pas un regret. Pas un remords.Mais
AlessiaJe suis réveillée par une odeur que je reconnais entre mille.Le café.Pas celui d’un bar impersonnel, pas l’arôme trop fort des machines industrielles.Non. Celui qu’on fait avec soin, à la main, à feu doux, en silence.Celui qu’on prépare sans urgence.Celui qui dit : je suis déjà levé, et j’ai pensé à toi avant même de m’habiller.Je reste encore un instant dans l’entre-deux du sommeil.Les yeux clos, mais l’âme en éveil.J’écoute.Des bruits feutrés.Une tasse posée doucement.Un pas retenu sur le parquet.Le froissement délicat d’un torchon replié.Et puis…Sa voix.Basse. Un peu hésitante. Presque enfantine.— Tu peux ouvrir les yeux, Alessia.Je souris sans les ouvrir tout de suite.Je garde encore une seconde de plus cette chaleur en moi.Puis, doucement, j’obéis.Et ce que je découvre me coupe le souffle.Lorenzo.Debout au pied du lit, les cheveux en désordre, une chemise ouverte sur un t-shirt blanc.Dans ses mains, un plateau.Pas chargé à la hâte composé.Deux tas
AlessiaJe suis encore blottie contre lui.Pas tout à fait en paix.Mais entière.Son souffle dans mes cheveux.Ses doigts sur ma nuque.Sa présence, enfin offerte sans détour, sans masque.Je n’ose pas bouger.Je crains de rompre quelque chose de fragile, un fil à peine retissé entre nous.Mais ce n’est pas du silence qui nous tient.C’est une sorte de souffle commun.Un battement en duo.Lorenzo ne dit rien.Je l’écoute respirer.Et dans le noir, j’ai l’impression d’entendre son cœur.Pas seulement ses pulsations mais tout ce qu’il contient : les pertes, les choix, la fatigue… et ce reste de foi qui résiste.J’ose lever les yeux.Ses traits sont fatigués, tirés par la nuit, par les décisions brutales, par les mots qu’il a enfin dits.Mais il est beau.Pas le genre de beauté lisse, irréelle.Non.Le genre de beauté qu’on aime plus encore quand elle tremble un peu.Quand elle se laisse approcher.— Tu ne dors pas ? je murmure.Il secoue lentement la tête.— Pas encore.— À quoi tu pen
LorenzoJe suis resté là.Figé dans le silence qu’elle a laissé derrière elle.La porte a claqué doucement.Pas comme une fuite.Comme une réponse.Valeria est partie.Mais elle savait.Elle savait parce que je lui ai dit.Parce que je l’ai regardée dans les yeux.Et que j’ai prononcé son nom.Alessia.Pas comme une arme.Pas comme un aveu.Mais comme une vérité nue, nue à en saigner.Je n’ai pas menti.Je n’ai pas caché.Je n’ai pas minimisé.Elle a vacillé.Mais elle n’a pas cédé.Elle est partie droite, blessée, le regard rivé vers le haut de l’escalier.Elle savait qu’elle était là.Dans ma maison.Dans mon lit.Et moi… j’ai assumé.Pas pour me laver.Pas pour justifier.Mais parce que c’était la seule chose que je pouvais encore offrir sans trahir plus que je ne l’ai déjà fait.Je reste dans l’entrée un moment.Tout est silencieux.Mais ce n’est pas le silence du vide.C’est celui d’après l’impact.Celui où la poussière retombe, où le souffle revient, où la vérité s’installe comm