Chapitre 6– Enchaînée aux ombres

Éléonore

Un vide oppressant m’envahit alors que les paroles de Léandre résonnent encore dans mon esprit.

"Elle m’appartient, maintenant."

Je sens le poids de cette vérité peser sur moi comme une entrave invisible. Je lève les yeux vers Andréas, cherchant un réconfort dans son regard, mais je n’y trouve que de la douleur… et une pointe de colère.

— Éléonore… dis-moi que ce n’est pas vrai.

Sa voix tremble, chargée d’émotions contradictoires.

Je veux lui dire que tout ira bien.

Je veux le rassurer.

Mais je ne peux pas.

Je sens le lien se refermer sur moi comme des chaînes d’ombre, un serment ancien ravivé par ma propre faiblesse.

Léandre s’avance lentement, savourant chaque seconde de notre tourment.

— Elle a fait son choix, frère. Un choix qui lui coûte cher, mais elle l’a fait en toute conscience.

Je serre les dents.

— Tu ne m’as jamais laissé d’autre option.

Il rit doucement.

— Tu en avais une. Tu pouvais le laisser mourir.

Mon souffle se coupe.

Non.

Jamais.

Je regarde Andréas, qui lutte pour se redresser. Son visage est marqué par l’incompréhension, la souffrance… et cette pointe de jalousie qu’il ne parvient pas à cacher.

— Je l’ai fait pour toi.

Ces mots lui arrachent un frisson.

Il secoue la tête, comme s’il refusait de les entendre.

— Et à quel prix ?

Je détourne les yeux.

Je ne peux pas lui répondre.

Parce qu’au fond, je connais la réponse.

J’ai échangé ma liberté contre sa vie.

Et maintenant… je suis prisonnière d’un autre.

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Andréas

Un étau invisible me broie la poitrine alors que je réalise l’ampleur du sacrifice d’Éléonore.

Elle s’est condamnée pour moi.

Et maintenant, elle appartient à Léandre.

L’idée même me rend malade.

Je tente de bouger, mais un vertige violent m’assaille. Mon corps est encore faible, comme s’il se remettait tout juste d’une longue agonie.

Léandre le sait.

Il le sent.

Et il en profite.

— Repose-toi, Andréas. Tu as déjà perdu cette bataille.

Je lève un regard furieux vers lui.

— Je ne te laisserai pas la garder.

Un sourire amusé étire ses lèvres.

— Tu ne peux plus rien y faire.

Il tend la main vers Éléonore.

Elle frissonne, et je ressens l’onde de pouvoir qui circule entre eux.

Un lien.

Invisible, indestructible.

Elle lui appartient désormais.

Et moi, je suis impuissant.

Cette simple pensée me brise plus que la mort elle-même.

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Éléonore

Un voile sombre entoure mon cœur alors que je ressens la colère d’Andréas.

Il me hait.

Non…

Il hait ce que j’ai fait.

Mais la douleur est la même.

Léandre se tient à mes côtés, son aura glaciale m’enveloppant comme une ombre possessive.

Il n’a même pas besoin de poser la main sur moi pour me faire sentir sa présence.

Il est là.

Partout.

Je ferme les yeux, cherchant à m’accrocher à quelque chose de réel, quelque chose qui ne soit pas cette damnation dans laquelle je viens de plonger.

— Tu es à moi, maintenant.

Ses mots s’infiltrent en moi comme du poison.

Je secoue la tête.

— Je ne serai jamais à toi.

Léandre rit doucement.

— Tu l’es déjà.

Il me tourne alors lentement vers lui, et son regard capte le mien avec une intensité troublante.

— Tu l’as toujours été.

Un frisson glacé me traverse.

— C’est faux.

Il penche la tête, un sourire indéchiffrable sur les lèvres.

— Alors pourquoi tes souvenirs reviennent-ils ?

Je me fige.

Car il a raison.

Des images floues m’assaillent depuis que j’ai renouvelé notre pacte.

Des souvenirs que je ne devrais pas avoir.

Des souvenirs où je ne suis pas seulement aux côtés d’Andréas… mais aussi aux côtés de Léandre.

Des nuits passées à murmurer des secrets à l’ombre des murs du château.

Des doigts qui frôlent ma peau.

Des promesses murmurées à l’oreille.

— Non…

Mon cœur se débat contre cette vérité.

Je l’ai aimé.

Autrefois.

Dans une autre vie.

Et je l’ai trahi.

Tout comme je viens de trahir Andréas.

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Léandre

Je la vois lutter contre elle-même, et c’est un spectacle fascinant.

Elle commence à se souvenir.

Elle commence à comprendre.

Qu’elle n’a jamais appartenu à un seul homme.

Mais à deux.

Elle veut rejeter cette vérité, mais elle est déjà trop tard.

Le pacte nous lie à nouveau.

Et cette fois, je ne la laisserai plus s’échapper.

Je m’approche d’elle, mon regard ancré dans le sien.

— Accepte-le, Éléonore.

Elle secoue la tête, sa respiration saccadée.

— Jamais.

Un sourire étire mes lèvres.

— Tu l’as déjà fait.

Elle frissonne, et je sais que quelque part, au fond d’elle, elle sait que j’ai raison.

Je tends la main et caresse doucement sa joue.

Elle ne recule pas.

Elle ne peut pas.

Parce que ce lien entre nous est plus fort qu’elle.

Plus fort qu’Andréas.

Plus fort que tout.

Je m’empare doucement de son menton et murmure :

— Tu es à moi, Éléonore. Comme tu l’as toujours été.

Ses lèvres tremblent, et dans ses yeux, je vois une étincelle de quelque chose d’enfoui depuis des siècles.

De la peur.

Du désir.

De la confusion.

Andréas gémit derrière nous, essayant de se redresser.

— Ne la touche pas.

Je tourne la tête vers lui, amusé.

— Elle ne t’appartient plus.

Il tente de se lever, mais il est trop faible.

Alors il me lance un regard noir.

— Je te tuerai.

Un ricanement m’échappe.

— Tu as déjà essayé.

Je me tourne de nouveau vers Éléonore et effleure ses lèvres du bout des doigts.

— Souviens-toi, mon amour

. Souviens-toi de nous.

Un frisson secoue son corps.

Je vois l’hésitation en elle.

Et je sais que ce n’est que le début.

Elle reviendra à moi.

Elle en a toujours été incapable.

Car entre la lumière et l’ombre…

Elle a toujours été faite pour les ténèbres .