La porte de la salle d'interrogatoire s'ouvrit lentement, révélant Lola. Elle pénétra dans la pièce, posa ses deux mains sur la chaise où elle s'était installée quelques minutes auparavant, regarda les deux personnes présentes et se dirigea directement vers l'avocat, qui attendait avec impatience.
- À vous voir, j'imagine que le juge à refuser l'attribution d'une libération, devina l'avocat.
- Oui, j'ai fait le nécessaire, mais ces ordres ont été clairs, il n'est pas question de laisser quelqu'un qui a tué son associé sous caution.
- Êtes-vous sûr d'avoir fait le nécessaire ?
- Oui, je sais que je ne suis pas en posture de proférer des mensonges, j'ai fait ce que je pouvais faire.
L'avocat se leva, desserra sa cravate comme si celle-ci était devenue une corde qui l'étouffait.
- Je ne laisserai jamais mon ami ici aujourd'hui, il sortira avec moi.
Il s'adossa au mur, regarda Raymond qui avait la tête baissée.
- Si j'avais la capacité de faire quelque chose, croyez-moi, je le ferai.
- Vous savez bien que vous avez la capacité, Inspectrice, ou vous attendez que j'aille moi-même voir le juge pour lui parler de vos maltraitances vis-à-vis de mon client ? Hein ?
- Sergio, appela Raymond, c'est bon, arrête de menacer l'inspectrice. Elle n'y est pour rien, si tu peux me faire sortir d'ici comme tu me l'as promis, fais-le, mais sans pour autant toucher à sa sensibilité. Fais ce que j'aurais fait si tu étais à ma place, mon cher ami.
- Tu as raison, je me suis trop emporté.
- Inspectrice, vous pouvez m'envoyer dans ma cellule ?
- Oui. Garde, cria l'inspectrice.
- Oui, répondit le garde en entrant.
- Vous pouvez conduire monsieur dans sa cellule.
- À vos ordres.
Il mit la main dans sa poche, sortit la clé de la menotte et enleva ce qui était relié à la table. Après l'avoir placé à la main détachée de Raymond, ce dernier le suivit, mais avant de sortir, il se tourna vers Sergio.
- J'ai confiance en toi, Sergio.
Sur ces mots, il sortit de la salle avec le garde.
- Vous pensez que mon ami serait responsable de ce qu'on accuse ?
- Je ne saurais le dire, mais si vous vouliez, on peut travailler ensemble. C'est vrai que nous nous sommes repartis de mauvaise base, mais on peut s'allier.
- Je tenais à m'excuser aussi pour vous avoir menacé, je n'aurais pas dû le faire.
- Non, vous avez voulu défendre votre ami. Alors, on travaille ensemble.
- J'accepte. Vous voulez bien me faire parvenir ce que vous avez sur lui ?
- Oui, je vous le ferai parvenir par votre boîte électronique. Les résultats du laboratoire aussi.
- Merci inspectrice.
- Le plaisir est pour moi.
Sergio mit la main dans sa poche et en sortit sa carte.
- C'est ma carte, vous avez là, mes coordonnées. Vous pouvez m'envoyer ce que vous avez.
- Je le ferai, ça fait plaisir de travailler avec vous pour la première fois.
- Moi aussi.
Sergio prit ses affaires et sortit. Dès sa sortie, un sourire maléfique se dessina sur les lèvres de l'inspectrice. Elle sortit à son tour, marchant dans le couloir comme si elle avait remporté un gros lot. Arrivée dans son bureau, elle verrouilla tout, en sortit un téléphone portable prépayé de son armoire. Elle l'alluma et lança un numéro. Elle s'approcha de la fenêtre, vérifia si quelqu'un se trouvait dans les barrages. Au moment de se retourner, une voix rauque retentit.
- Enfin Lola, j'attendais ton appel depuis, mais rien.
- Je suis désolé, Brian. J'aurais dû t'appeler depuis, mais c'était chaud sur moi.
- Que s'est-il passé ? Raymond, a-t-il eu une porte de sortie ?
- Pour le moment, non. Dis-moi, connais-tu Sergio ?
- Sergio ? Tu veux parler de l'avocat ? L'ami à Raymond ?
- Oui, il était ici. Il m'a même menacé.
- Pourquoi ? Il se doute de quelque chose en particulier ?
- Non, rien du tout. En-tout-cas, pas pour l'instant. Il a voulu avoir une libération sous caution, mais ça n'a pas marché. J'ai joué au jeu en lui mentant que j'ai appelé le juge.
- Et s'il se rendait là-bas ?
- Je trouverai quelque chose à dire.
- Tu n'as pas droit à l'erreur Lola.
- Sois tranquille, je lui ai promis de travailler avec lui. Histoire de l'avoir près de moi.
- Tu as bien fait Lola, on se voit chez moi demain n'est-ce pas ?
- Oui, je passerai demain.
Elle raccrocha et déposa le téléphone portable à sa place.
- Mes deux avocats, ricanna t'elle.
***
Soudain, la voiture de Sergio se stationna dans la cour suprême de justice. Il coupa le moteur, sortit de la voiture et se précipita vers l'entrée. À peine avait-il franchi le bureau de la secrétaire qu'une jolie demoiselle, belle, stylée, avec sa petite robe qui dépassait à peine ses genoux, se leva de son siège pour l'accueillir chaleureusement.
- Bonne arrivée monsieur Sergio, il vous attend.
- Merci.
Sergio se rendit directement dans le bureau du juge. Le bureau du juge était grand, majestueux. Derrière lui se trouvait une petite bibliothèque, chaque rangée était équipée d'un document de justice. À gauche, une grande robe rouge avec un foulard rouge dont les bouts étaient blancs. Sur la table du bureau, complètement lisse et bien rangée se trouvait une pancarte de justice, des dossiers classés par ordre du jugement, une photo de sa famille, son cachet prêt à rebondir sur n'importe quel dossier, des stylos de différentes couleurs, un téléphone de service, un ordinateur portable ouvert devant lui. Le juge était un homme de la soixantaine. Ses cheveux blancs sur la tête témoignaient ses années d'expérience dans le corps de la justice. Voyant Sergio, il se leva et lui tendit la main. Après les salutations et les compliments, vint maintenant le moment fatidique de passer aux choses sérieuses.
- J'ai été étonné quand je t'ai eu au téléphone, pourquoi l'urgence ne devrait-il pas attendre demain ?
- Je suis désolé pour ça monsieur le juge. Cela concerne Raymond.
- Oh ! Tu veux parler de l'avocat Raymond ?
- Oui monsieur, j'ai demandé à ce qu'il soit libéré sous caution, mais l'inspectrice qui se charge de son affaire m'a dit que vous aviez refusé l'offre.
- Inspectrice ? s'étonna le juge.
- Oui monsieur.
- Cela m'étonnerait, je n'ai pas eu un coup de fil aujourd'hui impliquant ce sujet. D'ailleurs, qu'est-ce qui se passe avec Raymond ? Qu'a-t-il ?
- Vous n'êtes pas au courant ?
- Non. De quoi s'agit-il ?
- Raymond a été arrêté hier pour avoir assassiné son collègue de travail.
- Quoi ? Je ne suis pas au courant. Peut-être que c'est avec ma secrétaire, ils ont discuté. Un instant.
Le juge se rabaissa, appuya sur le bouton téléphone du bureau et laissa un message à sa secrétaire. Quelques secondes, plus tard, cette dernière se présenta dans le bureau.
- Dites-moi, avez-vous reçu un appel de la part de la police aujourd'hui ? En particulier de l'inspectrice ?
- Un appel ? Quel genre monsieur ?
- Un appel stimulant un avocat comme étant le suspect d'un meurtre ?
- Non monsieur, aucun appel.
- Merci, vous pouvez partir.
Elle se retourna sur ses pas.
- Voilà, mon cabinet n'a rien reçu concernant cette affaire. J'imagine que si tu es là, c'est pour avoir une libération sous caution ?
- Oui monsieur, vous savez autant que moi que Raymond ne ferait jamais une telle chose ?
- Tout homme peut changer monsieur Sergio.
- Vous avez raison monsieur. Mais connaissant Raymond, c'est vraiment impossible.
Le juge se laissa tomber dans le fauteuil de son bureau.
- Très bien, je vais accepter la libération sous caution, mais avec un bracelet électronique. Il ne sortira pas de sa résidence.
- J'accepte monsieur. Il restera avec moi, en attendant son procès.
Le juge appela à nouveau sa secrétaire et lui confia quelques tâches. Après quelques minutes, elle revint avec une chemise de dossier. Le juge prit connaissance, mit son cachet et signa.
- Voici votre document.
Sergio prit le document.
- Merci beaucoup monsieur.
- Dès que vous seriez au poste, dites à l'inspectrice chargée de cette affaire que j'aimerais m'entretenir avec elle.
- Je le ferai monsieur.
Sergio prit le dossier, remercia à nouveau le juge et prit congé tout heureux.
De retour au poste de police, il se rendit directement dans le bureau de l'inspectrice et sans broncher un mot, déposa le dossier devant elle. Étonnée par le geste de ce dernier, elle ouvrit le dossier et commença par parcourir.
- Comme ça, madame n'avait pas appelé le juge ?
- J'ai une explication à vous donner.
- Quelle explication ? Que vous voulez protéger mon client ? Que vous voulez attendre avant d'informer le juge ? Dites-moi, est-ce vous l'assassin ?
- De quoi est-ce que vous parlez au juste ? Vous osez me prendre pour responsable d'un meurtre ?
- Oui, c'est ce que je suis en train de dire.
- Savez-vous ce que ça signifie ? Accuser quelqu'un de meurtre sans preuve ?
- Comme vous le faites avec mon client ? Ou comme je le fais avec vous ? Écoutez, je ne sais pas si je devrais vous appeler inspectrice ou pas, d'ailleurs, j'ai jamais voulu vous sentir à chaque fois que je venais ici et si aujourd'hui, j'ai accepté de faire équipe avec vous, c'était dans l'unique but de faire sortir mon ami. Malheureusement, vous m'avez montré que j'avais tort.
- Écoute-je...
- Je ne veux plus rester encore ici pendant une seule seconde de plus, libérez mon ami. Vous pouvez garder vos explications et votre salive, vous en aurez besoin avec le juge.
- Avec le juge ?
- Oui, il aimerait s'entretenir avec vous. Maintenant, mon collègue s'il vous plaît.
L'inspectrice se leva et sortit. Quelques minutes, plus tard, elle revint avec Raymond qui se jeta dans les bras de son ami.
- Tu as tenu ta promesse ! Tu as tenu ta promesse !
- Oui, j'ai fait ce que tu ferais si tu étais à ma place. Le juge a exigé à ce que tu sois sur place dans ta résidence avec un bracelet, j'espère que cela ne te dérange pas ?
- Non, c'est mieux que de rester ici. Merci mon cher ami.
Un officier entra avec une mallette, il le déballa et sortit un bracelet.
- Je peux ? demanda t'il.
- Allez-y, autorisa Raymond.
Le policier se rabaissa et lui mit le bracelet au pied. Il se tourna ensuite vers Sergio et lui donna une petite télécommande.
- Quand vous serez à la maison, vous allez appuyer sur cette télécommande pour mettre en...
- Je sais comment ça fonctionne, coupa Sergio.
Sans ajouter un mot de plus, le policier lui donna la télécommande, ferma la mallette et sortit.
- Raymond, rentrons.
Les deux prirent la sortie. Au moment de sortir, Sergio se tourna vers l'inspectrice, le regarda comme s'il voulait dire quelque chose puis sortit.