Home / Romance / Passion interdite / Le bureau privé

Share

Le bureau privé

Author: Les élites
last update Last Updated: 2025-07-02 01:54:48

Chapitre 2 — Le bureau privé

MARGO

Le couloir est un tunnel feutré, silencieux, d’une élégance presque intimidante. La moquette épaisse étouffe chacun de mes pas, pourtant je sens mon cœur battre avec une intensité douloureuse, comme un tambour sourd dans ma poitrine.

Je suis guidée par cette assistante à l’allure parfaite, trop lisse, aux gestes mécaniques, qui ne daigne même pas m’accorder un regard. Un silence de plomb nous enveloppe. J’ai l’impression que chaque seconde s’étire, que le temps ralentit pour mieux faire monter la pression.

Nous arrivons devant une porte noire mate, sans ornement, froide au toucher. Je pose ma main dessus, mes doigts effleurent la surface lisse. La poignée est glacée, un avant-goût de ce qui m’attend.

L’assistante frappe doucement.

— Entrez, ordonne une voix sèche, distante, qui résonne comme un coup de fouet dans ce silence parfait.

Je pousse la porte et pénètre dans ce sanctuaire de pouvoir.

Le bureau est vaste, presque trop grand, dominé par une baie vitrée qui laisse filtrer la lumière grise de la ville. Les immeubles se dressent, immobiles témoins d’un monde froid et impitoyable.

Au centre, un bureau en verre noir, épais, imposant, reflète le visage d’un homme assis, immobile comme une statue.

Espoir.

Je retiens mon souffle.

Il est là, concentré, signe des papiers avec une précision chirurgicale. Pas un mot. Pas un regard. Rien que le bruit feutré du stylo sur le papier.

Il ne lève pas les yeux quand je m’avance, pas même un frémissement d’intérêt apparent.

Un homme normal pourrait sembler grossier, distant, mais lui impose sa loi avec cette même absence d’émotion : un message clair, un ordre silencieux : tu es entrée dans mon univers, et c’est à mon rythme que tout se joue.

Je reste figée, une statue face à une autre.

Puis, brusquement, il lève la tête.

Et là, c’est comme si le monde s’arrêtait.

Sa beauté est presque irréelle, sculptée à la perfection par un artiste impitoyable : pommettes hautes, lignes du visage anguleuses, bouche fermée qui pourrait trancher, peau diaphane qui contraste avec la noirceur de ses cheveux.

Mais ce n’est pas ce qui me frappe le plus.

C’est son regard.

Gris acier. Glacial. Un froid mordant qui me transperce jusqu’à l’âme.

Ce regard n’est pas fait pour juger, ni pour aimer. Il est une arme. Une lame aiguisée qui dissèque, dépèce, fouille sans relâche chaque recoin de mon être.

Je me sens nue, mise à nu sans aucune protection.

Et pourtant, il y a dans ce regard quelque chose d’hypnotique. Quelque chose qui attire malgré tout le danger.

— Asseyez-vous, ordonne-t-il, froid, en désignant d’un geste sec le fauteuil en cuir face à lui.

Je m’installe, mes genoux effleurant presque les siens. Un frisson me parcourt.

Il me fixe en silence, ses yeux ne quittant pas les miens, cherchant, scrutant.

— Pourquoi vous ? demande-t-il soudain, sa voix claire et tranchante.

— Pardon ?

— Pourquoi ce poste ? Pourquoi moi ? Pourquoi vous ?

Chaque mot tombe comme un couperet. Il ne cherche pas de réponses banales. Il veut une faille, une faiblesse.

— Parce que je suis compétente, et…

— Non, coupe-t-il, impatient. Pas ça.

Il se redresse, ses doigts effleurant le verre froid du bureau.

— Vous êtes belle, provocante. Votre CV est trop parfait, trop lisse, presque suspect.

Un silence pesant.

— Et vous êtes excitée.

Je le fixe, troublée, déstabilisée.

Il incline la tête, presque imperceptiblement, ses yeux rivés aux miens.

— Vous frémissez. Vos pupilles se dilatent. Votre voix tremble à peine. Votre jupe est bien trop fendue pour une simple ambition professionnelle.

Je serre les cuisses, honteuse de la vérité.

— Je n’accepte pas les menteuses, poursuit-il, son ton dur.

Il prononce mon prénom lentement, presque comme un avertissement.

Je me redresse, reprenant contenance.

— Je suis ici pour le poste. Je ne couche pas pour réussir.

Un silence. Puis un rire sec, presque cruel, qui résonne dans la pièce.

— Je ne vous ai jamais proposé ça.

Il se lève, sa silhouette imposante dominant l’espace.

L’air semble vibrer autour de lui.

Il contourne lentement le bureau et s’approche de moi, chaque pas mesuré, implacable.

Je reste immobile, même si mon cœur bat la chamade, menaçant de s’échapper.

Il s’arrête juste derrière moi.

Je sens sa présence comme une lame froide posée contre ma nuque.

Son parfum envahit l’air : cuir brûlant, bois de santal, une promesse de feu dissimulé sous la glace.

Il ne touche pas, ne dit rien. Il attend.

Je sens son regard glisser le long de mon cou, de mes épaules, de la courbe de mon dos.

Un mélange de honte et de désir me brûle. Mes tétons durcissent sous le tissu fin de ma chemise.

Je veux qu’il m’effleure, qu’il me prenne.

Mais il ne fait rien.

Il retourne à sa place, s’assoit avec la froideur d’un roi sur son trône.

— Bien, dit-il enfin, voici les règles. Vous commencez lundi. Vous serez mon assistante personnelle. Vous travaillerez tard. Vous serez à disposition. Vous ne poserez jamais de questions sur ma vie. Jamais.

Je hoche la tête, consciente qu’il n’y a pas d’autre option.

— Et la règle la plus importante : ne tombez pas amoureuse de moi.

Je le regarde, cherchant une trace d’humanité dans son regard vide.

— Je suis incapable d’aimer, ajoute-t-il, plus froid encore. Et encore moins de consoler.

Je me lève lentement, mes jambes tremblent légèrement sous la tension.

— Je ne tombe jamais, murmuré-je avec défi.

Un sourire cruel effleure ses lèvres.

— On verra, Margo.

Je me retourne, quittant le bureau.

Mais je sens son regard sur moi, lourd, pesant.

Et entre mes jambes, ce feu insoutenable.

Il ne m’a pas touchée.

Et pourtant, je suis déjà à lui.

Continue to read this book for free
Scan code to download App

Latest chapter

  • Passion interdite    Comme s’il ne s’était jamais absenté

    CHAPITRE 28 — Comme s’il ne s’était jamais absentéMARGOIl est revenu.Ce matin, à 9h précises, j’ai vu sa silhouette se découper dans la lumière artificielle de l’open space. Comme une faille dans un tissu trop lisse.Elias.Costume sombre. Chemise bleu nuit, col ouvert. Aucun sourire. Aucun regard pour personne.Il avance.Lentement.Maîtrisé.Comme s’il ne s’était jamais absenté.Comme si ces dix jours de silence, de vide, de supplication ignorée… n’avaient jamais existé.Je suis restée figée, une pile de dossiers dans les bras, à moitié tournée vers la machine à café.Mes doigts se sont crispés sur le papier.Il ne m’a pas regardée.Mais il savait que j’étais là.Son parfum cuir sec et bois brûlé m’a frôlée comme une gifle intime.Et dans cette seconde suspendue, j’ai haï jusqu’à la façon dont mon corps se souvenait de lui.Il est passé.Comme un fantôme vivant.Et moi, je suis restée là.Clouée.Présente et absente à la fois.9h08.Mon écran clignote. Une notification.Un mail.

  • Passion interdite     “Tu m’as tuée vivante”

    CHAPITRE 27 — “Tu m’as tuée vivante”MARGO(14h04)Je referme la porte derrière moi.Sans frapper.Sans prévenir.Sans respirer.Il est là. Debout derrière son bureau.Il lève à peine les yeux. Mais il sait. Il sait ce que je viens faire.Le silence entre nous est lourd, tranchant, presque sacrilège.— Margo ?Ma gorge est sèche. Je sens mes côtes se tendre comme des cordes prêtes à rompre.Je ne réponds pas.Je m’approche.Je le regarde. Fixement. Comme on regarde une photo qu’on voudrait brûler, mais qu’on n’ose pas encore déchirer.Il comprend. Ses traits changent. Son visage se ferme lentement, comme un rideau de scène après la dernière réplique.Il se lève. Calme. Lent. Comme si la lenteur pouvait désamorcer ce que je suis venue déposer.— Je voulais t’en parler…Je ris. Un rire sans lumière, sans gorge, sans air.— Tu voulais m’en parler quand, Elias ? Avant ou après ton mariage ? Avant ou après m’avoir utilisée comme une dernière échappée ?Il reste figé.Le silence suinte. Com

  • Passion interdite    “Je ne voulais pas que ce soit la fin”

    CHAPITRE 26 — “Je ne voulais pas que ce soit la fin”MARGO(8h06)Il est là.Je ne le vois pas. Mais je le sais. Comme un frisson qui ne vient pas du froid. Un vertige qui ne vient pas du vide.Le hall du bâtiment est calme. Trop calme. Même les bruits de claviers paraissent lointains.Je passe les portiques. Badge. Bip. Porte.Mes doigts tremblent, imperceptiblement.Je ne veux pas lui faire ce cadeau. Pas ce matin. Pas un battement de cœur de trop.Mais mon corps trahit ma volonté. Il reconnaît sa présence. Son odeur. Son aura.Elias est revenu. Et rien n’a changé.(8h52)Il passe.Costume gris. Cravate serrée. Démarche souple. Une tension dans les épaules.Ceux qui ne savent pas diront qu’il est en forme. Qu’il a repris les rênes.Moi, je sais.Il est juste… en contrôle. Et c’est pire. Parce qu’Elias ne parle jamais trop quand il veut obtenir quelque chose.Il s’arrête deux secondes près de Lisa. Un mot léger. Un sourire professionnel.Puis il marche encore. Droit. Irréprochable.M

  • Passion interdite    « Tu n’as pas besoin de dire »

    CHAPITRE 25 — « Tu n’as pas besoin de dire »MARGO (7h03)Je suis déjà debout.Pas parce que je vais bien. Mais parce que je n’ai pas envie de rester couchée à écouter mes pensées m’étrangler.Le message d’Elias reste là, suspendu comme une toile d’araignée. Inoffensif si je ne bouge pas. Mortel si je m’en approche.Je n’ai pas répondu. Je ne répondrai pas aujourd’hui.Aujourd’hui, je choisis autre chose. Je ne sais pas encore quoi. Mais ce sera autre chose.(8h19)Je suis en avance au bureau. Trop. Les néons bourdonnent encore seuls. Les murs respirent à peine. Il y a une paix fragile ici, entre le jour et les autres.Je m’installe à mon poste. Je ne travaille pas vraiment. Je fais semblant. Mais pour une fois, ça ne sonne pas creux. Juste… calme.C’est là que Paul arrive.Il ne dit rien. Il me fait un petit signe. Un hochement de tête. Je réponds pareil.Il passe devant ma table, s’arrête un instant.— Pause café dans dix minutes. Si t’as envie.Il repart.Pas une demande. Pas une p

  • Passion interdite    « Je t’ai vue, tu sais »

    CHAPITRE 24 — « Je t’ai vue, tu sais »MARGO (6h48)Je ne dors pas.Je m’éteins doucement, voilà tout.Comme une lampe oubliée dans un coin d’oubli.Le corps est là, mais le reste flotte ailleurs.Je suis encore sur le tapis.La même position, presque.Je n’ai pas bougé dans la nuit. Même mes rêves se sont abstenus.Ils m’ont laissée seule, comme lui.Quelque part, une vibration m’a arrachée au silence.Une vibration douce. Traîtresse.Un message. Une pensée. Une corde tendue.Mais je ne suis pas prête.Je ne veux pas regarder.Pas encore.Pas ce matin.Pas dans cette lumière où le monde fait semblant de renaître.Je me lève enfin.Pas par force. Par besoin.Besoin que le temps passe. Que l’heure avance. Que quelque chose m’entraîne plus loin que lui.Je me traîne dans la salle de bain.Là encore, ce visage.Ce foutu reflet.Je le regarde longtemps.Comme si j’attendais qu’il craque avant moi.Mais il tient.Il résiste.Comme une mauvaise habitude.Je me mouille le visage à l’eau glac

  • Passion interdite    lendemain, même pas mort

    CHAPITRE 23 — Le lendemain, même pas mortMARGO (7h12)Je suis réveillée avant le réveil.Les yeux ouverts.La bouche sèche.La poitrine serrée, comme si une pierre y avait été scellée pendant la nuit.Un instant, j’espère que c’était un cauchemar. Un de ceux qui vous réveillent en sursaut, les draps en sueur, le cœur affolé, mais soulagé.Mais ce n’était pas un cauchemar.Il a dit oui.À une autre.Sous une arche décorée. En costume. Souriant.Avec cette tendresse qu’il avait encore pour moi… hier.Je reste allongée longtemps. Trop longtemps.Les draps sont froids.La trace de son corps a disparu, mais je la ressens encore.Je tends la main vers l’oreiller à côté.Le geste est idiot.Réflexe d’un animal blessé qui cherche la chaleur qu’on lui a volée.Mes doigts ne rencontrent que du vide.Un vide immense.Un vide bruyant.Un vide qui hurle sans un son.(7h39)Je finis par me lever.Mais ce n’est pas moi qui me lève.C’est mon corps.Un automate.Je me regarde dans le miroir de la sa

More Chapters
Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status