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Chapitre 5 – Ce que l’on doit au silence

Penulis: Déesse
last update Terakhir Diperbarui: 2025-06-20 16:48:11

Cassandre

Je me redresse lentement. Je titube, mais mon regard se plante dans celui de l’homme toujours là, debout dans mon salon minable, aussi à sa place ici qu’un diamant dans une bouche d’égout.

Il m’observe. Immobile. Inébranlable. Il a ce regard de ceux qu’on n’ose jamais contredire.

Je le reconnais.

Ce genre d’homme possède tout. Et quand il désire quelque chose… il l’obtient.

Mais moi aussi, j’ai appris à jouer.

Avec moins de moyens.

Plus de ruses.

Alors j’affiche mon sourire le plus calme. Le plus hypocrite.

— Si vous voulez récupérer Lyra, dis-je en croisant les bras, il va falloir nous rembourser. Dix fois ce qu’on a dépensé pour elle. Non. Cent fois.

Ma mère sursaute. Mon père me fusille du regard. Mais je m’en fiche.

J’ai perdu Lyra. Autant en tirer quelque chose.

Mais l’homme me fixe. Et je sens tout l’air de la pièce se glacer.

— Ton appétit est sans limite, murmure-t-il, chaque mot cinglant comme une lame. Je peux te libérer de tes dettes. De tes prêts usuraires. Je sais tout, Cassandre.

Je blêmis.

Il sait.

Il sait pour les menaces. Les huissiers. Les appels en pleine nuit. Le couteau sur ma gorge la semaine dernière.

— Mais ne rêve pas, poursuit-il. Tu n’auras rien. Pas un centime. Pas tant que tu n’as pas signé ça.

Il sort un document. Le tend. Un silence de plomb s’abat.

— Tu signes ici. Tu t’engages à ne plus jamais recontacter Lyra. Tu disparais de sa vie. Pour toujours.

Je le regarde. Puis le papier.

Puis ma main.

Et je signe.

Parce que je n’ai plus le choix.

Et au fond… je sais que je l’ai perdue depuis longtemps.

Lyra

Tout s’est passé trop vite.

La signature. Les mots échangés. Les visages figés. Et moi, là, au milieu du chaos, spectatrice de ma propre vie.

Je regarde cette femme  ma mère biologique. Elle a les mêmes yeux que moi. C’est si évident maintenant. Comment ne l’ai-je pas vu ?

Elle me prend la main avec une douceur étrange.

Forte. Profonde.

— Ma chérie. Va préparer tes affaires. Nous rentrons à la maison.

Je secoue la tête.

— Je n’emporterai rien, dis-je. Je ne veux rien garder de cet endroit.

Elle me serre contre elle.

Sa voix est douce, mais droite.

Une main qui ne tremble pas.

— Très bien. Nous allons tout recommencer à zéro.

Zéro.

Ce que j’ai toujours été ici.

Alors je la suis.

Je monte dans la voiture.

Le cuir sent la lavande. Les vitres sont teintées. Le silence est feutré. Apaisant. Étrange.

Je jette un dernier regard à l’immeuble gris, à la façade rongée, aux escaliers rouillés, à cette misère familière.

Et… rien.

Pas un regret.

Ma mère me caresse doucement la main.

— Nous t’avons cherchée, Lyra. Des années. Même quand tout le monde nous disait d’abandonner. Ton père a lancé des recherches dans quinze pays. Et puis… il y a eu ce nom. Cassandre. Cette adresse. Et là, on a su. C’était toi.

Je hoche la tête, le cœur noué.

— Je ne me souviens de rien. Rien avant mes six ans.

— Tu avais trois ans quand tu as disparu, dit-elle. Ta nourrice t’a prise. On n’a jamais su pourquoi. Elle a été retrouvée morte. Des années plus tard. Et toi… disparue.

Je ne dis rien. Puis murmure, sans trop comprendre :

— J’ai souvent rêvé d’un piano blanc. D’une chambre aux rideaux bleus. D’un chien… un labrador.

Elle éclate en sanglots.

— C’était chez nous. Tout ça. C’était ta vie, Lyra.

Je ferme les yeux.

Et pour la première fois, je sens le vide se remplir.

Alexandre

Je roule comme un forcené.

Mon cœur cogne contre mes côtes.

Mes doigts crispés sur le volant.

Je ne respire plus.

Je l’ai perdue.

Et je ne sais même pas pourquoi je veux la retrouver.

Je n’ai jamais été du genre à m’attacher.

Mais elle… elle m’a traversé comme une lame.

Mon assistant a fini par me donner une adresse : Cassandre Lefèvre. Une piste faible. Une "sœur". Mais c’est tout ce que j’ai.

Et alors que j’arrive à un carrefour, au feu rouge… je la vois.

Dans une voiture noire. Juste là. À trois mètres.

Elle tourne à peine la tête. Elle ne me voit pas.

Mais moi… je ne vois qu’elle.

Une bourrasque dans mes veines.

Un éclair de certitude.

C’est elle.

Je tourne brutalement à gauche pour la suivre, comme si ma vie entière tenait à ce virage. Comme si j’avais attendu ce moment depuis toujours, sans le savoir.

Mais je n’ai pas vu l’autre voiture.

Je n’ai pas eu le temps.

Tout bascule.

Le choc est frontal, brutal, d’une violence sèche, inhumaine.

Un grondement sourd. Une détonation de métal qui plie, de verre qui explose.

Mon corps est arraché à son axe, propulsé en avant comme une poupée de chiffon.

Le pare-brise se fissure, éclate, vole en éclats comme un cri de douleur cristallin.

Ma tête le heurte de plein fouet. Une douleur blanche me transperce le crâne. Un craquement sinistre.

Un bruit que je ne devrais jamais entendre.

Le goût du sang m’envahit la bouche avant même que je comprenne d’où il vient.

Mes côtes craquent sous le choc de la ceinture.

Mon épaule se déboîte, une vrille aiguë qui lacère jusqu’à la moelle.

Ma main se fracasse contre le tableau de bord. J’entends, plus que je ne sens, un os céder.

Ma nuque fouette l’appuie-tête, puis l’air. Je suffoque.

Tout devient rouge.

Puis noir.

Puis rouge encore, comme une marée d’images brouillées.

Le silence tombe.

Puis vient le chaos.

Des cris. Des klaxons.

Le hurlement continu d’une alarme.

Le métal qui gémit. Une femme qui hurle dans la rue.

Des pas précipités. Une porte qu’on tente de forcer.

Et au milieu de tout ça, moi. Figé. Cloué à mon siège. Le souffle saccadé. Le cœur battant si fort qu’il me déchire la poitrine.

Ma vision se brouille.

Je ne distingue plus les formes. Seulement des ombres.

Des lumières stroboscopiques dansent sur mon rétine.

Bleu. Rouge. Blanc.

Et du sang. Beaucoup trop de sang. Je ne sais plus d’où il vient.

Un goût métallique dans ma bouche. Amer. Chaud.

Je crache. Je tousse. Chaque mouvement me fait mal. Mon torse refuse de se soulever. J’ai l’impression qu’on m’a volé mes poumons.

Mon corps tremble. Mes doigts s’ouvrent, se referment. Inutiles. Engourdis.

Et dans cette marée de douleur et de bruit, une seule pensée surnage.

Un seul visage.

Ses yeux.

Son odeur.

Sa voix cassée.

Le tremblement de ses lèvres quand elle m’a dit qu’elle voulait se punir.

Le feu qu’elle a mis dans mon sang.

Ne t’en va pas…

Je ne suis pas prêt…

Mon souffle devient plus court.

Plus saccadé.

Plus faible.

Quelqu’un hurle dehors.

Une voix grave crie :

— Il est encore en vie ! Vite ! Il faut le sortir de là !

Mais je ne sens plus mes jambes.

Et dans un dernier éclair de conscience, alors que mes paupières se ferment malgré moi,

je me promets une chose :

Je te retrouverai. Même si je dois traverser l’enfer pour ça.

Ne t’en va pas…

Je te retrouverai.

Lyra

Un bruit sourd. Un fracas.

Je sursaute.

Mon cœur fait un bond.

Je me retourne un peu. Des gyrophares. Une foule qui s’agite.

Un accident. Juste derrière nous.

Le chauffeur ralentit, inquiet.

— On dirait qu’il y a eu un accrochage, madame.

Je regarde à peine. Mais un frisson me parcourt.

Une sensation étrange. Comme si un fil invisible venait de se rompre.

— J’espère qu’il va bien… murmuré-je.

Puis je me tais.

Sans savoir que le passé, déjà, est en train de revenir.

Et que le silence… n’a pas dit son dernier mot.

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