Chapitre 3

À son réveil, la maison était toujours vide, mais son téléphone affichait plusieurs messages.

Gaëtan : « Mon amour, mon patient est dans un état critique. Mes congés sont annulés, ne m'en veux pas. Demain, je te consacre du temps malgré le travail. Je t'ai préparé un cadeau. À tout à l'heure. »

Sous son message, une photo envoyée par Jeannine une heure plus tôt : un selfie d'eux deux aux bains thermaux, sourires éclatants.

Son téléphone lui brûlait les doigts. Elle a failli l'appeler pour lui demander s'il soignait vraiment des patients ou s'il chouchoutait sa Jeannine.

Mais se rappelant son plan, elle a étouffé sa colère et a répondu « D'accord ».

Parfait. Son absence lui laisserait le temps de faire ses bagages.

Elle a emballé les vêtements offerts par Gaëtan pour les donner à une association. Leurs photos encadrées sur le mur, elle l'a passées à la déchiqueteuse. Les cent cartes de vœux qu'elle lui avait écrites, elle les a brûlées sur le balcon jusqu'aux cendres.

Elle n'a pas osé jeter trop de choses, de peur d'éveiller ses soupçons.

Le lendemain, Gaëtan est enfin rentré. En la voyant, il a posé le gâteau qu'il tenait et a ouvert les bras : « Je suis épuisé, mon trésor. Laisse-moi te serrer pour recharger mes batteries. »

Tiphaine a reculé imperceptiblement, évitant son étreinte.

Gaëtan a haussé un sourcil : « Tu es toujours fâchée ? Allez, regarde la surprise que je t'ai préparée. »

Sans attendre sa réponse, il l'a entraînée vers la voiture.

Ils ont roulé jusqu'au circuit de course. Avant qu'elle ne puisse questionner, il l'a fait descendre.

« Tu aimes ? » a-t-il demandé en désignant le véhicule devant eux.

C'était une voiture de course customisée, couverte de paillettes roses et de diamants qui aveuglaient sous le soleil.

Une lueur de surprise avait traversé le regard de Tiphaine.

Les entraîneurs du club se tenaient à côté, leur voix chargée d'admiration :

« Paraît que cette customisation a coûté presque cent millions d'euros ! »

« L'argent n'est rien ! Savez-vous qu'il a collé chaque diamant lui-même ? Il a failli développer une kératite à force de veiller ! »

« Tiphaine, essaye-la vite ! Prête-nous la après, hein ? Ton mari te gâte vraiment. »

Ces mots ont fait lentement disparaître l'émotion de Tiphaine, ne laissant qu'une amertume résignée.

Elle a esquissé un sourire forcé.

Oui, tout le monde le disait aux petits soins de son épouse… mais quelle « épouse » honorait-il vraiment dans le secret de son âme ?

Son amour était aussi intense qu'un soleil d'été, mais cette chaleur n'avait jamais été réservée à une seule personne.

Tiphaine s'est installée au volant, a écrasé l'accélérateur à fond.

La voiture a jailli comme une flèche.

Des jours d'émotions contenues ont trouvé enfin un exutoire. Elle a foncé sur le circuit, tour après tour, noyant sa détresse, sa colère et son ressentiment dans le rugissement du moteur.

Gaëtan, quant à lui, se tenait près de la piste, les mains dans les poches, un sourire aux lèvres, les yeux fixés sur elle sans ciller.

Au quarantième tour, elle l'a vu lui faire un geste de main en forme de cœur. Distraite, elle a perdu le contrôle du volant. La seconde d'après, un bruit sourd a retenti lorsque la voiture a heurté le rail de protection.

Une douleur aiguë lui a traversé le pied. Avant même qu'elle ne réalise, Gaëtan avait déjà bondi, ouvert la portière et la portait dans ses bras vers la salle de repos.

« Tu as mal ? » a-t-il demandé, fronçant les sourcils tout en soutenant délicatement son pied.

Il a trempé un coton-tige dans la bétadine et l'a appliqué doucement sur sa blessure. « C'est de ma faute, je t'ai laissée conduire trop longtemps. »

Ses gestes étaient aussi légers que s'il craignait de briser du verre, et la tendresse dans ses yeux était palpable.

Devant tant de sollicitude, Tiphaine n'a ressenti qu'un froid glacial. La comédie de cet homme était si parfaite qu'elle faillit se laisser reprendre à son illusion de fidélité.

Machinalement, elle a levé la main pour effleurer ses cheveux, mais Gaëtan a attrapé son poignet et s'est apprêté à l'embrasser.

À cet instant, la porte de la salle de repos s'est ouverte brutalement.

Sans même lever les yeux, Gaëtan a lancé une bouteille d'eau en direction de l'intrus : « Dehors ! »

Tiphaine a tourné la tête et a aperçu Jeannine sur le seuil.

Gaëtan a pâli légèrement : « Jeannine ? Qu'est-ce que tu fais ici ? »

Jeannine se tenait le front rougi, les lèvres serrées. Ses vêtements étaient tachés de boue, elle semblait défaite.

« J'ai perdu le contrôle en essayant la nouvelle voiture… Je venais chercher la trousse de secours. »

Gaëtan a gardé le silence un instant, puis a ignoré de nouveau sa présence. Il a appliqué délicatement un pansement sur la blessure de Tiphaine.

« Reste assise ici. Ta blessure ne te permet pas de bouger », il a écarté une mèche de ses cheveux et a déposé un baiser sur sa joue, « Je vais voir Jeannine, je reviens dans quelques minutes. Je serai juste à côté, appelle-moi si tu ne te sens pas bien. »

Après son départ avec la trousse de secours, un silence lourd s'est installé dans la pièce, seulement troublé par le vent au-dehors.

Quelques minutes plus tard, Tiphaine a décidé de se lever et s'est dirigée lentement vers la pièce voisine. Mais la pièce était vide.

Une pointe de déception l'a effleuré, qu'elle a réprimée aussitôt.

Avait-elle vraiment cru à ses mensonges ?

S'appuyant au mur, elle a boitillé jusqu'au circuit. La pluie menaçait, et elle tenait à rentrer la voiture au garage.

Mais à deux pas de la voiture, elle a figé : le véhicule tremblait imperceptiblement, et des murmures complices s'infiltraient par l'interstice de la vitre...