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Chapitre 4

Author: Harmonie Vaganay
Derrière cette vitre embuée, deux corps entrelacés n'étaient plus que des ombres mouvantes.

Gaëtan maintenait Jeannine contre le siège du conducteur, caressant de ses doigts la marque sur son front : « Je t'ai fait mal tout à l'heure ? »

La femme a levé les lèvres vers les siennes, son regard noyé de séduction : « Non. C'est moi qui n'aurais pas dû déranger ton moment avec Tiphaine. Je l'ai mérité. »

Gaëtan a froncé les sourcils et a mordillé doucement sa joue : « Arrête ces bêtises. Toi et elle, vous êtes toutes les deux mes trésors. »

Il a pincé sa taille, une pointe de gouaillerie dans la voix : « Si tu peux encore plaisanter, c'est que ce n'était pas assez douloureux ? »

Avant qu'elle ne réponde, il a emprisonné sa taille d'une main, a saisi son menton de l'autre et l'a embrassée avec voracité.

Jeannine s'est débattue faiblement, murmurant d'une voix plaintive : « C'est la voiture que tu lui as offerte... Je ne veux pas ici... Et Tiphaine t'attend dans la salle de repos. Tu lui as promis de revenir dans quelques minutes. »

Gaëtan a immobilisé ses poignets au-dessus de sa tête, glissant une main le long de sa hanche. Sa voix était rauque et lourde de désir : « Tu penses encore à quelqu'un d'autre dans cette situation ?

Laisse-moi faire. Je te promets d'en avoir fini en quelques minutes. »

Presque aussitôt, les respirations de Jeannine sont devenues haletantes et ses mains se sont refermées mollement sur ses épaules.

Des bruits suggestifs se sont échappés par la vitre entrouverte, clouant Tiphaine sur place comme par un poignard invisible. Ses jambes ont fléchi avant même qu'elle ne le réalise, faillant la faire choir. Une douleur brutale lui a transpercé la poitrine, obscurcissant sa vision.

Soudain, elle s'est souvenue du jour de l'inauguration de ce club. Gaëtan attendait ses compliments comme un enfant espérant des friandises. Mais elle, trop émue, ne faisait que pleurer sans pouvoir parler.

Il l'avait alors allongée sur le siège arrière de la voiture, son souffle brûlant contre sa peau tandis qu'il défaisant fébrilement ses boutons. Elle aussi était submergée par le désir, mais elle l'avait repoussé en serrant les dents.

« Chéri, la course est mon idéal suprême. Je veux qu'elle reste pure. »

Gaëtan s'était alors figé. Elle avait craint sa colère, mais l'homme s'était redressé, avait arrangé leurs vêtements et avait levé trois doigts en jurant avec une intensité brûlante : « Je te le jure, désormais, ce sera aussi mon idéal. Vie après vie, je respecterai la course. Jamais je ne ferai cela dans tes voitures... »

Ces derniers mots, murmurés contre son oreille, avaient fait monter le feu à ses joues.

Et sur ces mots doux, elle avait cru qu'il serait l'amour de sa vie.

Mais maintenant ? Il brisait cette promesse avec une autre femme dans sa voiture de course, piétinant tout ce qu'elle chérissait.

Tiphaine était trop épuisée pour bouger. Les clés lui ont glissé des mains avec un bruit métallique. Elle a voulu fuir, mais a réalisé que les occupants du véhicule n'avaient rien remarqué.

Un rictus plus triste que des larmes lui a déformé les lèvres. Elle a mordu son articulation pour étouffer un sanglot.

La pluie s'est mise à tomber et la vitre entrouverte s'est refermée dans un claquement sec.

Après un dernier regard au véhicule encore agité d'un mouvement suspect, elle s'est penchée, a ramassé les clés et les a jetés dans un égout voisin.

À l'intérieur de la voiture, Jeannine a levé les yeux pour apercevoir dans le rétroviseur son dos qui s'éloignait. Un sourire triomphant a glissé sur ses lèvres.

L'averse est passée vite. Quand Gaëtan est revenu dans la salle de repos, Tiphaine a affiché un calme de marbre, comme si rien ne s'était passé.

Soulagé, il a ajusté son col et s'est accroupi devant elle : « Allons rentrer. »

Tiphaine a baissé les yeux et a vu la marque fraîche sur son cou. Étrangement, elle ne ressentait désormais qu'un calme infini.

Elle a refusé qu'il la porte et a boitillé jusqu'à la voiture en s'appuyant au mur. Mais lorsqu'elle a ouvert la portière passager, elle a découvert Jeannine au volant.

Gaëtan s'est empressé d'expliquer : « Jeannine s'est inscrite à une course. Laisse-la s'entraîner sur ce trajet. Tu pourras lui donner tes conseils, d'accord Tiphaine ? »

Après une hésitation, elle a accepté.

Même si elle méprisait Jeannine, elle respectait tous les passionnés de course authentiques.

Mais comment pouvait-elle deviner que cette femme ne détenait même pas le permis basique… Elle n'aurait jamais ouvert cette portière si elle avait su.

Quand la voiture a fusé en zigzaguant, son cœur s'est serré. Elle a tenté de reprendre le volant, mais Jeannine l'a repoussée violemment.

« Lâche ça si tu tiens à la vie ! » a hurlé Tiphaine, les yeux injectés de sang.

Jeannine a maintenu sa course folle, l'accélérateur au plancher.

La seconde suivante, le choc et le cri de Gaëtan ont fusionné : « TIPHAINE ! »
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