Home / Romance / Sous ta peau, mes chaînes / Chapitre 1 – Les soirs de velours

Share

Sous ta peau, mes chaînes
Sous ta peau, mes chaînes
Author: AMC

Chapitre 1 – Les soirs de velours

Author: AMC
last update Last Updated: 2025-10-18 01:19:25

LÉANA

Chaque soir, je remonte la fermeture de ma robe comme on referme un secret. Le satin colle un peu à ma peau, la lumière du miroir tremble, et mes doigts hésitent sur le dernier bouton. Il y a toujours un instant, juste avant d’entrer sur scène, où je ne sais plus qui je suis.

La femme qui danse, ou celle qui fuit.

Au cabaret Le Lys Noir, tout n’est que jeux d’ombres et de reflets. On y rit trop fort, on y boit trop vite, on oublie qu’il fait nuit dehors. Moi, j’avance sous les projecteurs comme une apparition : lente, calculée, presque irréelle. Les hommes s’enivrent de mes gestes, sans voir la fatigue qui s’accroche à mes cils.

Ce soir pourtant, quelque chose change.

Une présence.

Un regard que je ne vois pas, mais que je sens.

Là, au fond de la salle, une silhouette immobile. Il ne boit pas, ne parle pas. Il semble écouter.

Je danse, et c’est comme si mes pas étaient suivis par une autre musique, plus profonde, plus grave.

Quand le rideau se referme, je reste quelques secondes dans le noir. Mon cœur bat à contrecourant.

Et puis, la régisseuse me tend une enveloppe.

“Pour vous. Il a dit que vous comprendriez.”

Aucun nom, juste un papier blanc plié avec soin.

Je l’ouvre.

Les mots, tracés d’une écriture fine, me glacent autant qu’ils me brûlent :

Je voudrais vous voir danser pour moi. Seule. Dans le silence. Sans contact, sans regard. Juste vous. — A.

Je ris nerveusement. Un caprice de riche, sûrement.

Mais quelque chose dans la sobriété de la lettre me trouble. Pas d’arrogance. Pas de promesse. Juste une demande… presque une prière.

Le lendemain, j’y pense encore.

Et le surlendemain.

Jusqu’à ce que je dise oui.

ADRIAN

Je reconnaîtrais sa présence parmi mille.

Le froissement du tissu quand elle se retourne, la respiration courte après une pirouette, le léger grésillement de la scène quand les projecteurs chauffent le parquet.

Je ne vois rien.

Mais je perçois tout.

Depuis mon accident, la lumière est devenue un souvenir. Pourtant, dans le noir, il y a des formes que personne ne devine. Les émotions ont une texture. Le silence a des contours. Et ce soir-là, quand elle a dansé, j’ai senti quelque chose d’indéfinissable — une fracture qui répondait à la mienne.

Je n’ai pas cherché son visage.

Je ne veux pas d’un visage.

Je veux la vérité nue du mouvement, la musique de son souffle.

J’ai fait remettre ma lettre par discrétion. Je me doutais qu’elle refuserait, d’abord. Mais il y avait dans sa danse une sincérité rare, quelque chose d’animal et de brisé.

Et ce sont les âmes fêlées qui me parlent le mieux.

Elle a accepté.

Demain, elle viendra ici, dans ce salon que j’ai fait plonger dans la pénombre.

Il n’y aura ni musique ni spectateurs, seulement l’écho de ses pas et le son de ma respiration.

LÉANA

L’adresse qu’il m’a donnée ne mène pas à un hôtel ni à un club, mais à une vieille bâtisse près du quai.

À l’intérieur, le silence. Une lumière tamisée, un piano fermé.

Et lui, assis dans un fauteuil de velours noir, la tête légèrement inclinée vers le sol.

— “Vous êtes venue.”

Sa voix est grave, douce, presque désolée.

Je hoche la tête avant de me rappeler qu’il ne me voit peut-être pas.

— “Oui… je suis venue.”

Il ne bouge pas. Il ne cherche pas à me regarder.

Il se contente de dire :

— “Dansez.”

Aucune musique, aucun rythme. Juste le battement de mon cœur.

Je bouge lentement, d’abord maladroite, puis plus libre. Mes pas dessinent une histoire que je ne comprends pas encore.

Je sens qu’il m’écoute. Vraiment.

Chaque geste semble résonner en lui comme une note.

Et puis, sans prévenir, il murmure :

— “C’est beau. Vous avez peur.”

Je m’arrête.

Comment peut-il savoir ?

— “Je l’entends,” répond-il simplement. “Dans votre respiration.”

Je reste là, immobile, entre curiosité et frisson.

Cet homme ne voit pas, mais il me perçoit d’une façon que personne n’a jamais su.

Quand je quitte la pièce, le froid de la nuit me gifle.

Dans ma main, une seconde enveloppe :

Demain, même heure. Si vous le voulez.

Je sais déjà que j’irai.

Et que rien, après cela, ne sera plus tout à fait pareil.

Continue to read this book for free
Scan code to download App

Latest chapter

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 19 – La première faille

    LÉANAL’air du bar est devenu étouffant.Les lumières trop vives, la musique trop agressive… et surtout, cette sensation dans ma nuque :il est là.Je ne tourne pas la tête.Je n’ai pas besoin.Clara, elle, remarque immédiatement ma rigidité.— “Bon sang, Léana… tu fais peur. Qui est-ce que t’as senti entrer ?”Je ravale ma salive.— “Personne.”Mensonge.Mes mains tremblent un peu autour de mon verre.L’homme qui m’avait accostée revient vers nous, encore plus confiant que tout à l’heure.— “Je peux vous offrir un autre verre ? Ou vous montrer un club pas loin ?”Clara fronce les sourcils, méfiante.— “Elle n’est pas intéressée.”— “Je t’ai posé la question à toi, pas à elle.”, réplique-t-il en se tournant vers moi.Je sens l’air changer derrière moi.Un silence.Une ombre.Une présence glacée… et pourtant brûlante.Avant même que je ne me retourne, je sais :Adrian vient d’entrer.L’homme insiste :— “Un verre, juste un. Vous dansez comme si vous connaissiez chaque note par cœur… j’

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 18 – Frôler l’interdit

    LÉANALe cabaret vibre d’une énergie différente ce soir.Plus lourde.Plus électrique.Comme si chaque mur retenait son souffle en attendant un événement qu’il pressent sans pouvoir l’expliquer.Clara noue les lacets de mes chaussures en me dévisageant, son chewing-gum claquant entre ses dents.— “Je te préviens, si tu continues à danser comme ça devant lui, moi je vais fondre avant vous deux.”Je ris, nerveuse :— “Je danse juste… normalement.”— “Ouais. Et moi je suis la reine d’Angleterre.”Julien, de l’autre côté de la pièce, règle son saxophone.— “Léana, tu veux qu’on teste une version plus lente de ton solo ? Je sens que t’es… inspirée.”Il me regarde avec un petit sourire en coin.Tout le monde a compris sauf moi, apparemment.Je ferme les yeux, respire profondément, et quand je les rouvre… il est là.Invisible pour les autres, évident pour moi.Adrian.Assis dans l’ombre, parfaitement immobile, mais son regard est une main invisible qui me frôle la peau.La musique commence.

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 17 – Proximité et provocations

    LÉANALa journée avait été longue, bien plus que d’habitude.Depuis mon réveil, quelque chose vibrait sous ma peau, une impatience brûlante, une tension qui rendait chaque geste plus lent, plus mesuré, comme si mon corps se préparait à quelque chose que je ne pouvais pas nommer.Même les rues de Paris semblaient avoir changé de couleur : les pavés paraissaient plus sombres, les lampadaires plus lumineux, les vitrines plus floues.Je suis arrivée au cabaret plus tôt que d’habitude, incapable de rester chez moi à tourner en rond.Les danseuses papotaient déjà, les maquilleurs préparaient leurs pinceaux, Julien accordait son instrument dans un coin.Personne ne savait que je brûlais à l’intérieur.Je passe la main sur les rideaux de velours, comme pour me rattacher à quelque chose de concret, alors que mon esprit s’égare déjà dans la possibilité de le sentir, lui, quelque part derrière les ombres.Je ne le vois jamais en premier… mais je le ressens toujours avant tout le monde.Puis, enf

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 16 – Jeux de tentation et complicité

    LÉANALa lumière du cabaret baignait la salle d’une lueur chaude et tamisée.Je traversais la scène pour la répétition, sentant chaque vibration de la musique sous mes pieds.Clara s’approche, les yeux pétillants :— “Je te parie que tu n’arrives pas à rester concentrée sur autre chose que lui ce soir.”Je ris doucement, incapable de lui donner tort.Julien, le musicien, ajuste les instruments près de la scène et me regarde avec curiosité :— “Tu es… différente ce soir. Quelque chose dans ton regard… quelqu’un te hante ?”Je détourne les yeux, consciente que mes émotions trahissent ce que je tente de cacher :— “Non… juste concentrée sur le spectacle.”Mais chaque note que je danse résonne avec l’image invisible d’Adrian, chaque geste me rapproche de lui, même sans le toucher.Dans les coulisses, Amélie s’approche pour un conseil sur son costume :— “Fais attention, Léana. Je ne sais pas qui est ce spectateur mystérieux, mais certains disent qu’il change les règles pour tout le monde

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 15 – Éclats de désir et d’interdit

    LÉANALe cabaret sentait encore la cire des bougies et le parfum entêtant des costumes, même après la répétition.Je traversais les coulisses, le cœur battant, consciente de chaque mouvement, chaque regard, chaque bruit autour de moi.Clara m’attrape par le bras, les yeux pétillants :— “Je parie que tu es nerveuse pour quelqu’un… ou quelque chose. Tu ne peux pas me cacher ça.”Je souris faiblement, mais mes pensées sont déjà ailleurs.— “Peut-être… mais ce n’est pas important.”Clara rit doucement, mais elle sait que je mens à moitié.Julien, le musicien, ajuste les lumières et s’approche :— “Tu sembles préoccupée… quelqu’un te hante ce soir ?”Je détourne le regard, incapable de répondre.— “Non… juste concentrée.”Mais même en essayant de me convaincre, je sens son souffle invisible contre ma nuque, ce frisson interdit qui ne m’a jamais quittée depuis notre première rencontre.Au fond de la salle, les autres danseuses s’affairent, certaines rient, d’autres répètent leurs mouvement

  • Sous ta peau, mes chaînes    Chapitre 14 – Secrets et tentations

    LÉANA Les coulisses du cabaret sentent la cire des bougies, le maquillage et le parfum entêtant des danseuses. Chaque note de musique résonne comme un écho de nos gestes interdits, et je passe entre les costumes et les accessoires, le cœur encore battant de notre proximité invisible. Le souffle des ventilateurs effleure ma nuque, et je frissonne, consciente de chaque frôlement de tissu et de velours autour de moi. Clara m’attrape le bras, ses doigts pressant légèrement le mien, comme pour me rappeler que je ne suis pas seule : — “Alors ? Encore des frissons ce soir ?” Je ris doucement, mais je sens que cette fois, ce n’est pas seulement le frisson du jeu. C’est quelque chose de plus profond… presque dangereux. Une chaleur sourde monte dans ma poitrine, et je surprends un battement de cœur que je n’avais jamais senti auparavant. Mon regard croise celui d’une danseuse qui répète un pas devant un miroir, et pour un instant, tout devient flou autour de moi. Julien, le musicien, s’appr

More Chapters
Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status