Grayson ne m’adresse plus un mot.Depuis cette nuit où je l’ai entendu prononcer ces mots — ceux qui ont réduit en miettes ce qu’il restait de nous —, il est devenu une forteresse de glace. Chaque regard, chaque silence, chaque mouvement qu’il fait transpire le mépris, la distance. Et pourtant, il reste là. Toujours là. À proximité. Assez pour me rappeler qu’il existe. Trop loin pour que je puisse encore l’atteindre.Ce matin, en entrant dans la cuisine, je l’ai trouvé assis avec Hope, lui nouant le ruban de sa robe d’un geste lent, presque tendre. Elle riait doucement. Mais quand j’ai posé un pied sur le carrelage, ses yeux ont croisé les miens. Instantanément, son expression s’est figée. Il a baissé les yeux sans un mot, s’est levé et a quitté la pièce.Hope m’a regardée sans comprendre.— Pourquoi il part quand t’arrives, maman ?Je n’ai rien su dire. J’ai seulement pris une grande inspiration, tenté un sourire tremblant. Elle ne mérite pas ce chaos. Aucun d’eux ne le mérite.Plus
Je me suis rassis sur le siège arrière, à côté d’Ethan, sans dire un mot.Grayson s’était installé au volant comme si rien ne s’était passé. Je ne pouvais plus le regarder. Une des raisons qui m’a poussé à le fuir était cet enfant qu’il a eu avec Laurence en plus de protéger mes bébés.Ethan m’observait, l’air inquiet.— Maman… ça ne va pas ?J’ai forcé un sourire.— Si, chéri. Je suis juste un peu fatiguée, c’est tout.Je crois qu’il n’y a que Hope qui n’avait rien remarqué. Elle dormait contre mon épaule, paisible. Un petit miracle. Moi, à l’intérieur, j’étais en train de m’effondrer.Plus tard dans la soirée, je suis sortie discrètement dans le couloir du rez-de-chaussée de l’hôtel. Je savais qu’il finirait par passer par là. Et il l’a fait. Comme s’il savait que je l’attendais.Il s’est arrêté en me voyant. Nos regards se sont croisés, glacials.— Je t’ai entendu, j’ai soufflé, la gorge nouée.Je n’ai pas laissé le silence s’installer.— Tu savais depuis le début que ce n’était p
Le soleil californien brillait haut dans le ciel, baignant le stade d'une lumière crue. Les cris enthousiastes de la foule me parvenaient par vagues. Je ne m'étais jamais autant rongé les ongles. Ethan s'était inscrit à ce concours de robotique depuis des mois, et aujourd’hui était le grand jour. Il était concentré, comme toujours, le front légèrement plissé, les mains dans les poches de sa veste noire.— Tu crois qu’il va gagner ? soufflai-je à Grayson, assis à mes côtés, les bras croisés, lunettes de soleil sur le nez.Il ne répondit pas tout de suite. Il fixait la scène, mais je savais qu’il était ailleurs. Depuis ce matin, il était tendu. Froid. Distant. Comme si quelque chose déraillait en lui et qu’il essayait de le contenir.Soudain, les haut-parleurs grésillèrent, et un nouveau nom retentit. Je sursautai.— Mesdames et Messieurs, accueillons notre invitée surprise venue tout droit de New York : Laurence Kensington et son fils, Adam Blackwell !Je crus que j’avais mal entendu.
Révélations et promessesJe poussai doucement la porte de la chambre. Ethan était réveillé depuis plusieurs heures maintenant. Je trouvai mon fils assis en tailleur sur le lit, un jus de fruits à la main et des biscuits sur la tablette.— Salut, mon cœur, dis-je doucement.Il se tourna vers moi avec un grand sourire.— Salut, maman.Je m’assis au bord du lit et passai ma main dans ses cheveux. Il allait mieux. C’était évident. Ses yeux brillaient à nouveau. Ses joues avaient repris des couleurs. Le soulagement m’envahit si fort que j’eus du mal à retenir mes larmes.— Tu te sens bien ? Tu veux qu’on rentre au Japon ?Il m’observa quelques secondes, sérieux. Puis il secoua la tête.— Non. Pas encore. Je veux finir le concours… si ce n’est pas trop tard.Je le regardai, surprise. Il n’avait pas hésité une seconde.— T’es sûr de toi ?— Oui. J’ai travaillé dur. Je veux le faire. Pour moi. Et pour Hope aussi.Je souris, émue. Mon petit garçon était devenu un vrai battant.— Très bien. On
Le soleil commençait à descendre doucement à l’horizon quand nous avons traversé la rue pour retourner à l’hôpital. Hope avait les doigts collants de glace et les joues rosies par les rires. Savannah lui tenait la main, elle chantonnait un air idiot qui faisait glousser ma fille toutes les deux secondes. Alyssa, elle, marchait à mes côtés, plus silencieuse.J’avais redouté ce moment : retourner dans cet hôpital, franchir de nouveau ces portes, affronter ce regard.Grayson.Il était là, adossé contre le mur du couloir, les bras croisés sur sa chemise immaculée, le regard noir. John et Knox n’étaient plus là. Il n’y avait plus que lui. Et moi.Et cette tension insupportable.Savannah et Alyssa, plus légères, s’arrêtèrent un peu plus loin avec Hope pour lui montrer des photos de leur dernier voyage. J’en profitai pour m’approcher de lui.Il ne bougea pas d’un centimètre.— Je t’ai laissée respirer, dit-il enfin, la voix grave, basse. J’ai essayé de ne pas exploser devant Hope… devant les
Je lève les yeux vers le ciel chargé de nuages, comme si j’y cherchais les mots, les bons, ceux qui ne feraient pas trop mal.— C’est long, dis-je simplement. Trop long pour le raconter ici, avec Hope à quelques pas. Mais je te jure que je te dirai tout. Ce soir, à l’hôtel, ou demain matin si tu préfères. Quand elle dormira.Alyssa hoche la tête, son regard tendre posé sur moi.— Ça me va. On a tout notre temps maintenant. On ne compte plus te lâcher.Je souris malgré moi. Une partie de moi se sent soulagée de les avoir retrouvées. Une autre redoute le moment où je vais tout leur révéler : la fuite, les mensonges, la peur, la douleur. Tout.Nous traversons la rue en direction du petit restaurant italien. Il est là, niché entre une pharmacie et une boutique de souvenirs, avec sa devanture verte et rouge et l’odeur irrésistible de pâte chaude qui flotte dans l’air.Hope s’agite dans les bras de Savannah, toute excitée.— Maman, regarde, ils ont même des pizzas en forme de cœur ! s’écrie