Chapitre 1

Je suis morte d'une façon douloureuse le jour de mon propre anniversaire, et personne dans ma famille ne s'en est même rendu compte. Ils m'ont blâmée d'avoir manqué la grande fête d'anniversaire d'Esme, sans réaliser que j'étais là tout le temps, simplement pas de la manière qu'ils pensaient. J'étais là, rien de plus qu'une âme.

…

Ce soir-là, ma famille est rentrée, les bras remplis de sacs de shopping. Tout le monde portait quelque chose sauf Esme, qui léchait joyeusement une glace.

Elle était leur petite princesse, tellement gâtée qu'ils ne lui laissaient jamais lever le petit doigt.

Ils ont commencé à décorer la maison, et Edwin m'a appelée. « Claudia, descends et viens aider. Ce n'est pas parce que c'est ton anniversaire que tu peux te tourner les pouces. »

N'importe quel autre jour, je me serais empressée de descendre pour le rejoindre. Mais maintenant, je me contentais de flotter à côté de lui, le regardant d'un œil froid et détaché.

Comme je ne répondais pas, il a composé mon numéro pour constater que personne ne décrochait.

À ce moment-là, Esme est arrivée en se dandinant, a arraché le téléphone de sa main, et a roucoulé d'une voix douce, « Edwin, puisque Claudia n'est pas là, laisse-moi t'aider à sa place. »

Edwin a ri, lui a ébouriffé les cheveux et a dit doucement, « Va t'asseoir et te reposer. Si tu ne finis pas ta glace bientôt, elle va fondre. »

À l'instant où elle s'est éloignée, son sourire a disparu. Il a froncé les sourcils et m'a laissé un message vocal. « Claudia, reviens immédiatement ! La fête commence dans une heure. On a beaucoup d'invités aujourd'hui, alors ne gâche pas l'ambiance. »

Sur ce, il est retourné à la décoration.

Maman et Papa ont remarqué son irritation et ont ricané. « Est-ce que Claudia fait encore un caprice ? »

Edwin a poussé un long soupir en attachant des ballons. « Oui. Dès que quelque chose ne va pas dans son sens, elle disparaît. Elle attend toujours que les gens la supplient de revenir. »

« Hmph ! Elle est juste trop gâtée, » a grogné Papa. « Elle pense vraiment que cette fête ne peut pas se dérouler sans elle ? Quelle naïveté. La vraie star de ce banquet, c'est Esme. Que Claudia se montre ou pas, ça ne change rien. Quand elle reviendra demain, donnez-lui un reste de gâteau. Ça lui apprendra. »

Sa voix devenait plus dure à mesure qu'il parlait.

Esme s'est précipitée vers lui et a tapoté son dos pour le calmer. « Papa, ne dis pas ça. Si Claudia t'entend, elle sera tellement blessée. C'est aussi son anniversaire aujourd'hui. Comment pourrions-nous célébrer sans elle ? Je vais aller la chercher. »

Sur ces mots, elle s'est retournée et est partie.

Toute la famille l'a félicitée d'être si douce et si raisonnable, sans jamais réaliser qu'elle n'avait même pas quitté la maison.

Je l'ai regardée glisser vers le sous-sol à la place. D'un coup de pied sec, elle a fait voler la porte en fer. Quand elle m'a vue allongée, immobile dans un coin, couverte de sang, elle a éclaté de rire au point de ne presque plus pouvoir respirer.

Elle s'est avancée en grandes enjambées et m'a donné deux coups de pied. « Hé, arrête de faire semblant d'être morte. Lève-toi. »

Mais je ne répondais pas du tout, parce que j'étais déjà morte.

Elle ne l'a pas remarqué. Elle s'est accroupie et a tiré mes cheveux, mais mes yeux sont restés fermés. Quand elle a finalement senti que quelque chose n'allait pas, un bruit venant de l'extérieur a attiré son attention. « Pourquoi est-ce que la porte du jardin n'est pas fermée ? »

Affolée, elle m'a lâchée et m'a donné un dernier coup avant de partir. « Reste là. N'essaie même pas de gâcher ma fête ou de voler la vedette. »

Puis, avec un sourire adorable, elle a couru à l'étage et s'est jetée dans les bras d'Edwin. « C'est de ma faute, Edwin. J'ai oublié de fermer la porte du jardin. Je suis allée chercher partout, mais je n'ai pas trouvé Claudia. »

Le cœur d'Edwin a immédiatement fondu. Il lui a caressé la tête. « Oublie-la. Aujourd'hui, c'est ton jour. Ne le gâche pas à t'inquiéter pour quelqu'un d'inutile. »

« Quelqu'un d'inutile ? » ai-je pensé. Un sourire amer a tiré sur mes lèvres.

Ce n'était pas que j'étais inutile, c'était que, dans leurs yeux, seule Esme comptait. Bien que nous partagions le même anniversaire, le mien avait toujours été négligé. Chaque année, je l'avais célébré seule.

Cependant, cette année était différente. Cette année, ce n'était pas seulement mon anniversaire. C'était mes adieux.

Il y a un mois, j'ai été diagnostiquée d'un cancer en phase terminale. Je n'avais jamais prévu de le cacher. Les résultats des tests étaient posés bien en évidence sur la table.

Mais je n'oublierai jamais la manière dont mes parents ont ricané en les voyant. Ils m'ont accusée de jouer la comédie et de faire la victime juste pour obtenir de la sympathie et attirer leur attention de force.

La vérité, c'est que je n'avais jamais voulu rivaliser avec Esme pour leur amour. Je n'avais même pas prévu d'assister à la fête.

J'avais déjà préparé un cadeau pour Esme à l'avance, et j'avais l'intention de passer mon dernier anniversaire tranquillement avec une amie. Mais avant que je ne puisse partir, un groupe d'hommes en noir m'a tendu une embuscade. Un coup violent à la tête m'a mise complètement inconsciente.

Quand j'ai repris connaissance, j'étais dans notre sous-sol.

Leur chef a fait pendre un porte-clés devant moi, celui avec le petit ours Winny préféré d'Esme et les autres hommes serraient des matraques et des battes de baseball.

Mes jambes tremblaient tandis que je les suppliais de me laisser partir. Mais ils m'ont ignorée. Ils m'ont frappée encore et encore jusqu'à ce que je sois à peine consciente.

Après ça, ils ont déchiré mes vêtements et m'ont prise en photo nue. Une fois qu'ils ont eu fini, ils ont agité les clés dans leurs mains et sont partis.

J'ai bondi par désespoir et je n'ai réussi qu'à arracher le petit ours Winny du porte-clés.

Le noir a envahi mes pensées après ça.

Avec le peu de force qui me restait, j'ai essayé d'appeler mes parents, puis Edwin, mais aucun d'eux n'a répondu.

Je me suis rabattue sur un message, mais mes doigts brisés ne pouvaient pas taper un long texte. Alors, j'ai écrit quatre chiffres '9395'.

C'était le code d'urgence sur lequel Edwin et moi nous étions mis d'accord autrefois. Il m'avait murmuré un jour, en caressant mes cheveux, « Si un jour tu es en danger, envoie-moi ce numéro. Je viendrai pour toi quoi qu'il arrive. »

À l'époque, j'avais ri. « Ce n'est pas comme si j'allais un jour être en danger. C'est un pays civilisé. »

Je n'aurais jamais pensé que j'en aurais réellement besoin. Mais quand je l'ai envoyé, en priant pour qu'il comprenne, sa réponse m'a laissée sous le choc.

« Claudia, juste parce que je ne t'ai pas emmenée acheter une nouvelle robe, tu as décidé de faire ton cinéma ? »

Il ne m'a pas crue.

« Tu peux encore porter la robe de l'année dernière. Arrête d'agir comme une enfant. Comme c'est ton anniversaire, je vais laisser passer. On se voit à la fête ce soir. »

Dommage, je n'allais pas me présenter à cette fête. Et dans cette vie, nous ne nous reverrions plus jamais.

Une fois que mon téléphone s'est éteint, la seule chose qui leur restait, c'était mon corps en décomposition… et le cadeau d'adieu que j'avais préparé avec tant de soin.