MaëlysJe me réveille lentement, tirée du sommeil par la chaleur.Une chaleur dense, profonde, qui n’a rien à voir avec les draps, ni même avec la lumière douce du matin filtrant par les rideaux entrouverts.C’est une chaleur vivante.Celle d’un corps contre le mien. D’un bras enroulé autour de ma taille. De la respiration régulière qui effleure ma nuque comme un serment silencieux.Il dort encore.Aleksandr.Je pourrais fermer les yeux à nouveau. Me blottir contre lui. Disparaître dans cet instant. Le figer dans le marbre, comme une offrande. Mais je résiste à cette envie, parce que je veux voir. Je veux observer chaque détail, chaque battement, chaque vérité nue que la lumière du matin révèle dans ses traits endormis.Je me retourne lentement, avec précaution, comme si j’avais peur de briser quelque chose.Son visage est détendu. Ses traits lissés. Comme si les démons avaient fui pour quelques heures. Il semble plus jeune. Presque vulnérable. Le masque est tombé. Le chef impitoyable
MaëlysL’ascenseur est silencieux. Trop silencieux.Mais ce n’est pas gênant. C’est… chargé. D’électricité, de non-dits, d’envies trop longtemps contenues. Il se tient près de moi, juste assez loin pour ne pas me toucher, mais je ressens chaque pulsation de sa chaleur comme une onde invisible qui traverse mon épiderme.Mon cœur bat trop fort. Ma bouche est sèche. Mes doigts tremblent légèrement. Et pourtant, je ne bouge pas.Quand les portes s’ouvrent sur son étage, je n’attends pas. Mes talons claquent doucement sur le marbre. Il me suit, silencieux, et je sens son regard me brûler la nuque. Ses pas sont calmes. Mes pensées, elles, sont en feu.La porte de son appartement se referme dans un soupir étouffé.Et le monde s’arrête.Je me retourne lentement. Il est là. Majestueux. Intimidant. Foudroyant de retenue. Ses yeux sont fixés sur moi, sombres, durs, mais brillants d’une lumière nouvelle. Une lumière affamée. Une lumière vraie.Il avance. Je recule.Un pas. Deux. Trois.Mon dos re
MaëlysLa journée a été longue. Trop longue.Entre les regards qui pèsent, les alliances silencieuses et les zones d’ombre dans les conversations, je sens encore chaque seconde de tension dans mes épaules. Mais quand il me tend sa main, quand il me dit simplement viens, je n’hésite pas.On quitte la fondation sans escorte, pour une fois.Il conduit lui-même.Le vent traverse la voiture par la vitre à moitié ouverte. Le soleil décline lentement, dorant les toits de la ville, caressant nos visages d’une lumière apaisée. Il ne parle pas. Moi non plus. Et c’est bien.— Tu m’enlèves ? je demande, un sourire dans la voix.— Je t’offre une trêve, répond-il sans détour.Il s’arrête devant un petit restaurant que je ne connais pas. Rien de clinquant. Une façade discrète, des lumières chaudes, une terrasse fleurie. Loin de tout ce qui le définit. Et pourtant, tellement lui, en cet instant.— Tu connais le patron ? je demande en descendant.— Non. Et c’est ce qui me plaît.Un pas de côté. Comme
MaëlysJe me réveille une seconde fois, plus tard, sans savoir combien de temps s’est écoulé. La lumière a changé. Elle est plus haute, plus blanche, moins tendre.Mais ses bras sont toujours là.Aleksandr n’a pas bougé. Ou presque pas. Sa main repose toujours sur ma taille, ses doigts se sont simplement un peu enfoncés, comme s’il s’était endormi à me retenir.Je lève les yeux vers lui.Il est réveillé, cette fois. Il me regarde sans rien dire. Et ce silence-là, différent de celui du matin, est chargé d’un autre poids. Pas une inquiétude. Une conscience. Celle que cette parenthèse touche à sa fin.Je me redresse légèrement.— Il faut qu’on sorte de cet appartement, je murmure.Il hoche la tête, mais ne bouge pas.— Oui. Mais pas encore.— Aleksandr...— Je sais, Maëlys. Mais laisse-moi cinq minutes encore. Cinq minutes où rien ne presse.Je soupire. Je pourrais me lever. M’extirper de tout ça. Rappeler à l’ordre. Mais je reste. Parce que moi aussi, j’ai peur du moment où la porte s’o
MaëlysLe monde revient par petites touches.La lumière, d’abord, fine et dorée, glisse entre les rideaux à moitié tirés. Elle vient lécher mes paupières, trace une ligne tiède le long de ma clavicule, descend sur l’arrondi de mon épaule nue. Puis le silence, plus vaste que la veille encore, chargé non plus de tension, mais d’un calme rare. Un calme respirable.Et enfin, la chaleur.Celle de son corps contre le mien.Aleksandr.Je reste immobile. Pas par crainte. Pas par fatigue. Par désir de prolonger. Il y a son souffle, régulier, contre ma nuque. Un bras autour de ma taille, possessif sans l’être. Une jambe glissée entre les miennes. Et tout est doux. Présent. Ancré.Je n’ai pas envie de partir.Pour la première fois depuis longtemps, mon corps ne me hurle pas de fuir. Il veut rester là. S’enraciner. Il se souvient de la nuit, de ce que nous avons échangé. Non pas un feu de paille. Mais un geste profond. Une promesse.Je bouge à peine. Son bras se resserre aussitôt. Comme un réflex
MaëlysJe ne dors pas.Il y a des nuits qui refusent l’oubli. Des nuits qui ne se traversent pas, mais qui s’ouvrent. Lentement. Comme un sanctuaire qu’on n’avait plus osé approcher.Et ce soir, je suis là. Allongée dans ce lit trop vaste, contre ce corps que j’ai appris à craindre autant qu’à désirer. Aleksandr. Il dort, ou il feint. Je sens ses bras autour de moi, son souffle, son cœur. Trop calme. Trop égal. Comme s’il imitait la paix.Mais je le connais.Je sais la tempête qu’il retient.Je sais ce qu’il lui faut d’effort pour ne pas serrer trop fort. Pour ne pas me perdre dans ses bras alors même qu’il vient à peine de me retrouver.Je glisse doucement ma main dans ses cheveux, repoussant quelques mèches sur son front. Mon geste est lent, hésitant, presque timide. Comme s’il me fallait réapprendre chaque centimètre de lui. Comme si j’avais peur que le contact le fasse fuir.Mais il ne fuit pas.Il fronce à peine les sourcils, puis sa voix s’élève, rauque et basse, fendant le sile