All Chapters of SOUS LE SERMENT DU SANG : Chapter 61 - Chapter 70

AlbaLa nuit s’est abattue sur la villa comme une encre noire.La mer, au loin, résonne d’un grondement sourd, un battement primitif qui s’accorde à mon propre cœur.Rien ne dort vraiment ici.Chaque craquement du bois, chaque écho de pas dans le couloir est un mot d’un langage secret : celui de l’ambition.Je ferme les yeux un instant.Je peux presque sentir la maison respirer.Des murmures circulent, pareils à des fils de soie tendus d’une pièce à l’autre, prêts à s’emmêler ou à se rompre.Ce soir, je suis l’araignée.Et c’est moi qui décide de la forme de la toile.Sandro m’a confié les rênes.Pas une simple permission : une déclaration silencieuse.Montre-leur que tu es mon égal.Ses yeux avant de quitter la salle disaient tout.Je ne compte pas le décevoir.Je descends l’escalier principal.Le marbre froid sous mes talons aiguise chacun de mes pas.À chaque étage, j’aperçois des silhouettes furtives : gardes en patrouille, messagers pressés, ombres qui se figent lorsque mon regar

AlbaLe claquement métallique de la porte se répercute dans le hangar comme un coup de marteau sur une enclume.L’air est saturé d’odeurs d’huile rance, de sel et de fer. Des gouttes d’eau, tombant d’une canalisation, marquent un rythme discret qui pulse dans mes tempes.Marco n’a pas lâché ma main. Sa poigne n’est ni franche ni molle : une tension suspendue, calculée, comme s’il pesait chaque milliseconde de ce contact. Ses doigts sont chauds, mais une fine pellicule de sueur trahit un effort de contrôle.— Tu parles d’alliance, dit-il enfin, la voix basse, légèrement voilée.Il se penche, ses yeux cherchant une faille dans mon regard.— Mais une alliance n’existe que si les deux parties ont quelque chose à perdre. Qu’as-tu vraiment à offrir ?Je maintiens le silence une fraction de plus que nécessaire. Laisser la question flotter est déjà une réponse. Il croit tester mes nerfs ; il ignore que j’ai déjà préparé chaque angle de cette scène.— Le temps, Marco. Et l’invisibilité. Deux c

AlbaLa nuit a ce silence particulier des grandes maisons : un calme si complet qu’il devient presque un personnage, respirant au rythme des murs. Sandro dort encore, son souffle régulier contre ma nuque, une chaleur qui me retient mais ne m’apaise pas. J’ouvre les yeux. L’obscurité s’est teintée d’un bleu profond. J’écoute. Le tic-tac de l’horloge lointaine pulse comme un rappel discret : chaque seconde est un choix.Je me lève doucement, glisse mes pieds nus sur le tapis épais. La chambre sent encore le sel et le bois ciré. J’ouvre la porte-fenêtre avec précaution ; un filet d’air frais s’invite, chargé de l’odeur d’herbes nocturnes. Le jardin du domaine s’étend en vagues sombres sous la lune. Les cyprès dressent leurs silhouettes droites, gardiens silencieux. Je m’appuie contre la rambarde. Le métal est froid, une morsure qui me réveille.Tout semble si paisible. Et pourtant, à l’intérieur de moi, c’est un champ de ruines.Je suis flic. Je suis la lieutenant Alba Carini, celle qui,

AlbaL’aube s’infiltre lentement, presque timide, par les interstices des rideaux. La lumière n’est pas encore franche ; elle flotte dans la chambre comme une brume dorée, un voile tiède qui caresse les murs.Avant même d’ouvrir les yeux, je sens la présence de Sandro : sa chaleur diffuse, sa respiration profonde et régulière, le battement solide de son cœur tout près de mon dos. Sa main repose sur ma taille, lourde de sommeil mais ferme, comme une ancre silencieuse. Il ne m’a pas quittée, pas un instant.Je demeure immobile, le temps d’une respiration, savourant la densité de cet instant. Le parfum mêlé de nos peaux flotte encore, mélange de sel, de bois chaud et d’une pointe de tabac. Il a quelque chose de sauvage et de familier qui me traverse de part en part, me rappelant que la nuit a laissé plus qu’une trace : elle a gravé une mémoire brûlante sur ma peau.Je m’étire à peine, un mouvement infime qui réveille la surface de mes muscles. Le drap glisse le long de mes jambes comme u

SandroLa journée traîne avec la lourdeur d’un ciel sans vent. Les chiffres défilent sur l’écran, les réunions s’enchaînent, mais je n’y suis pas vraiment. Mon esprit vagabonde entre la vapeur de la douche de ce matin et le rire d’Alba dans la cuisine. Cette image douce me hante comme une respiration qu’on ne veut pas quitter.J’ai cru, un instant, qu’on avait enfin trouvé notre équilibre.Erreur.Trois coups secs frappent à la porte.— Entrez, dis-je sans lever les yeux.Le battant s’ouvre. Le bruit est trop vif, trop tranchant. Ce n’est pas la démarche d’un assistant.Je relève la tête.Et tout se fige.Chiara.Son nom s’impose dans ma tête avant même que mes lèvres ne le prononcent.Elle se tient droite, fière, vêtue comme toujours d’une élégance calculée , mais son visage, lui, est ravagé par la colère. Ses yeux lancent des éclairs, son rouge à lèvres, un peu trop vif, tranche sur la pâleur de ses joues.Elle n’a même pas pris la peine de fermer la porte.— Qu’est-ce que c’est que