Chapitre 3

Mais cette fois, le regard de Joseph s'est détourné, son ton s'est étrangement raidi.

« Après ce qui s'est passé la dernière fois... tu sais que la santé de mes parents n'est pas très bonne. S'ils te revoient, ça ne fera que les stimuler. »

Il a hésité, sa voix s'est adoucie comme s'il cherchait à m'apaiser.

« Ne le prends pas mal, je leur parlerai des fiançailles. Emmanuelle a grandi sous leur toit, alors bien sûr ils sont plus proches d'elle. Une fois que les choses se seront calmées... ils cesseront d'être rancuniers. »

Je l'ai regardé partir avec elle, une douleur sourde se répandant dans ma poitrine jusqu'à ce que même la déglutition ait un goût de sang.

Cinq ans, c'est tout ce qu'il a fallu à Joseph pour oublier l'amour qu'il m'avait juré, le serment que personne ne me ferait jamais de mal.

Il les avait tous oubliés, il m'avait oubliée, il m'avait même poussée dans les flammes, me laissant souffrir seule sur ce lit d'hôpital.

Après d'innombrables rejets, j'ai enfin compris qui Joseph attendait depuis toujours.

Des larmes ont coulé au coin de mes yeux, tombant une à une sur le sol froid.

Après m'être essuyé le visage, j'ai respiré profondément.

De retour à la villa, j'ai commencé à ranger mes affaires. Cinq ans de vie commune avaient laissé des traces de nous partout.

J'avais cru bêtement qu'il m'aimait.

Les tableaux de notre maison étaient tous ceux que j'avais choisis. Il avait dit un jour qu'il voulait un bébé avec moi, qu'on l'emmènerait à l'aventure, qu'on le ferait courir dans les forêts au clair de lune.

Mais avant même que nous ayons pu avoir un bébé, il avait déjà cessé de m'aimer.

Je travaillais tellement que je restais toujours debout jusqu'à minuit, ce qui me causait des maux de tête constants. Joseph s'en était rendu compte et, quel que soit l'endroit où il se trouvait pour un voyage d'affaires, il n'oubliait jamais de me rappeler de dormir. Il me parlait au téléphone jusqu'à ce que je m'endorme.

Parfois, la douleur était si forte qu'elle pouvait me tuer. Joseph se sentait déchiré de me voir souffrir. Il avait donc appris le massage auprès du médecin de la meute et me massait lorsque j'avais mal à la tête.

Maintenant, tout a disparu, comme un souvenir qui ne m'appartenait plus.

Il avait l'habitude de remarquer chacun de mes regards, chaque fois que mes yeux s'attardaient sur quelque chose, il l'achetait secrètement, avec maladresse mais plein d'amour.

« Je ne veux même pas que tu aies à demander. » m'a-t-il dit un jour en m'embrassant sur la joue et en m'ébouriffant les cheveux, sa voix douce alors qu'il enfouissait son visage dans mon cou.

Je ne savais pas quand cela avait commencé...

mais à un moment donné, Joseph s'est lassé de nous.

La première fois que je l'ai demandé en mariage, il a souri et m'a dit que nous étions trop jeunes, que nous marier trop tôt ne ferait que nous lasser l'un de l'autre, comme tous les autres couples.

La deuxième fois, j'avais tout préparé, une surprise, des bougies, le collier que Joseph avait dit aimer sur moi. Mais avant d'entrer dans la pièce, je l'ai entendu parler à ses amis.

« J'en ai marre de Caroline. L'étincelle a disparu. Mais elle est bonne avec moi, oui, je ne peux pas rompre avec elle. »

« Une fille demande un mec en mariage, elle ne devrait pas se rendre compte que je ne l'aime pas ? »

La dernière fois...

J'ai donné tout ce que j'avais. Je me suis tenue devant ses parents, m'humiliant, disant que je voulais épouser Joseph. Je leur ai dit que je me fichais de la fortune de la famille Salvador, que je ne voulais pas du titre de Luna, que je voulais seulement être sa femme.

Mais sa sœur Emmanuelle, celle avec qui il avait grandi bien qu'ils n'aient pas de sang commun, était là ce jour-là. Dès qu'elle a entendu ma proposition, elle a piqué une crise de jalousie.

Maintenant, tout cela est terminé. J'ai enfin lâché prise.

Toutes les photos que j'ai prises de Joseph au cours des cinq dernières années, je les ai toutes déchirées en morceaux.

Même la lettre d'amour qu'il m'avait écrite, la seule, je l'ai réduite en cendres à l'aide d'un briquet.

Il ne m'a pas envoyé un seul message la semaine suivante, il attendait que je cède.

Alors de mon côté, j'avais déplacé mes bagages hors de sa villa bien avant qu'il ne s'en aperçoive.

Il pensait probablement que je faisais une nouvelle crise de colère, alors il n'a pas pris la peine de vérifier.

Mais au fur et à mesure que le temps passait... il semblait se souvenir que j'existais.

Trois jours avant mon retour à la meute de Lune de Sang, à l'occasion de notre cinquième anniversaire, Joseph m'a enfin appelée.

« Caroline », a-t-il dit doucement, « notre cinquième anniversaire va bientôt avoir lieu. J'ai réservé la Galerie de Moineau Tranquille et un dîner dans ton restaurant préféré. Il faut qu'on parle. »

Alors que sa voix s'éteignait, un texte est apparu sur mon écran. C'était l'adresse.

La galerie était l'endroit où nous nous étions rencontrés pour la première fois. Nous étions tous deux allés chercher le même tableau au même moment, et nous avions même partagé les mêmes pensées à son sujet.

À l'époque, j'avais cru bêtement que c'était la bénédiction de Luna. Mon cœur s'était emballé à tel point que j'avais cru qu'il allait éclater. J'étais convaincue que Joseph était mon compagnon pour la vie.