Chapitre 4

Comme chaque année, à l'occasion de notre anniversaire, je préparais un cadeau pour Joseph.

Cette année serait la dernière.

Je me tenais à l'entrée de la Galerie de Moineau Tranquille et j'attendais. Le personnel vérifiait les invitations à la porte tandis que les invités passaient devant moi, les rires et les parfums emplissant l'air. Les aiguilles de ma montre tournaient, régulièrement et sans pitié.

Plus d'une demi-heure s'était écoulée depuis l'heure prévue, mais toujours aucun signe de Joseph.

Alors que je m'apprêtais à l'appeler, une pluie de feux d'artifice a soudain éclaté dans le ciel nocturne.

Le chemin pavé qui s'ouvrait devant moi brillait de mille feux, bordé de chaque côté de roses fraîches. Je l'ai suivi jusqu'au bout, où je l'ai enfin vu.

Joseph se tenait là, en costume noir, un genou à terre, tenant un écrin de velours avec une bague en diamant à l'intérieur... et demandant Emmanuelle en mariage.

Pendant un instant, j'ai oublié de respirer.

« L'Alpha a vraiment tout donné », a chuchoté quelqu'un à proximité, « j'ai entendu dire que les fleurs étaient arrivées en jet privé et qu'il avait loué tout le restaurant. »

« Mais... sa petite amie n'est-elle pas quelqu'un d'autre ? »

« Petite amie ? Non, pas du tout. Il est normal de flirter avec de jolies femmes avant le mariage. Et Emmanuelle ? Elle a été élevée par la vieille Luna elle-même. Comment des filles de la campagne pourraient-elles se comparer à ses manières et à ses connaissances ? »

Leurs paroles bourdonnaient à mes oreilles, tranchantes et moqueuses.

Ce n'était donc pas notre cinquième anniversaire après tout.

C'était un grand banquet de fiançailles.

Et l'homme agenouillé sous les feux d'artifice était mon petit ami.

Mais la femme qu'il demandait en mariage... n'était pas moi.

Mon cœur se stabilisa lentement. J'ai poussé un soupir silencieux et jeté le cadeau que j'avais préparé dans la poubelle la plus proche. Puis je me suis retournée, prête à laisser derrière moi cet endroit et lui.

Mais avant que je puisse faire un pas, Emmanuelle est apparue devant moi.

Le masque doux et innocent qu'elle portait toujours autour de Joseph avait disparu, remplacé par un sourire acéré et moqueur.

« J'ai appris que c'était aujourd'hui ton cinquième anniversaire avec Joseph. » a-t-elle dit, sa voix était pleine de satisfaction. « Tu sais quoi ? Il ne s'en souvenait même pas. Il s'en est rendu compte seulement parce qu'aujourd'hui c'était notre banquet de fiançailles, et alors il s'est souvenu que tu existais encore. »

Si ça avait été avant, je l'aurais giflée sur-le-champ.

« C'est vrai ? » J'ai souri faiblement. « Alors je vous souhaite à tous les deux d'être heureux. »

J'ai fait demi-tour pour partir, frôlant son épaule.

Mais le talon d'Emmanuelle a glissé. Elle est tombée en arrière, atterrissant durement, le bouquet qu'elle tenait à la main s'éparpillant sur ses genoux.

Avant même que je puisse réagir, Joseph s'est précipité vers elle, juste à temps pour la voir au sol.

« Caroline ! Tu n'as pas causé assez d'ennuis ? »

Sans prévenir, il m'a attrapée par le col et m'a tirée vers le haut avec une force brutale.

« Je t'ai dit que je m'occupais du mariage ! Pourquoi diable ferais-tu du mal à Emmanuelle ? »

Le tissu s'est resserré autour de ma gorge. Je ne pouvais plus respirer. Mon visage a rougi, des veines sont apparues le long de mes mains alors que je m'agrippais à son emprise.

Avant que je puisse trouver ma voix, Emmanuelle, complètement indemne, s'est serré la poitrine de façon spectaculaire et a commencé à respirer.

Joseph a paniqué. Ses mains ont tremblé tandis qu'il appelait le chauffeur, les yeux rougis par la peur.

« Tu ne sais même pas qu'elle a une maladie du cœur ? Elle est fragile, elle n'a rien à voir avec toi ! » a-t-il crié, la voix brisée par la fureur, alors qu'il se retournait contre moi.

« Si tu veux tellement te marier, trouve quelqu'un d'autre ! Je ne t'épouserai jamais. Va-t'en, ne te présente plus jamais devant moi ! »

Les rires ont parcouru les spectateurs, leur pitié était aussi tranchante qu'un couteau. La douleur autour de mon cou est devenue insensible.

Je les ai regardés s'éloigner : Joseph portait à moitié Emmanuelle, sa tête reposant sur sa poitrine.

Ma poitrine s'est douloureusement serrée, mais je me suis forcée à respirer.

« Joseph », ai-je murmuré, à peine audible, « séparons-nous. »

Je ne savais pas s'il m'avait entendue.

Tout ce que j'ai vu, c'est le nuage de poussière que sa voiture a soulevé en disparaissant dans la nuit.

Le lendemain matin, j'ai réservé le premier vol.

Et j'ai laissé cet endroit maudit derrière moi.