Chapitre 1

Julien Richard a dit : « S'il te plaît, Alice. Un peu de sang ne te coûte rien, mais sans cela, Rose va mourir. »

« Si tu acceptes de la sauver, j'accepterai tout ce que tu demanderas. » Sa voix grave a résonné à mes oreilles, me tirant de l'étreinte froide de la mort.

Je suis revenue à la vie le jour même où il m'a suppliée de donner mon sang pour Rose Moreau. Dans ma vie précédente, j'avais refusé. Et au final, je me suis noyée dans un lac glacé, rongée par l'humiliation.

J'avais déjà abandonné la moitié de ma moelle osseuse pour le sauver. Ma louve tenait à peine le coup, luttant pour se rétablir. Mon corps ne pourrait en aucun cas supporter une autre transfusion.

Mais dans cette vie, j'y voyais clair. Donner mon sang me tuerait, mais refuser de le faire me tuerait aussi.

Alors, j'ai considéré ce sang comme mon dernier paiement. Je ne devrais plus rien à la famille Richard après cela, et je n'aurais plus lien avec lui.

J'ai levé la tête, rencontré son regard suppliant et répondu fermement. « D'accord. »

Chaque mot qu'il avait préparé est resté coincé dans sa gorge.

Le médecin à côté de nous avait l'air inquiet. « Mademoiselle Alice Durand, réfléchissez bien ! Votre état est déjà critique. Une transfusion complète pourrait vous coûter la vie ! »

Bien sûr, je le savais. Mais si la mort signifiait que je pouvais enfin échapper à Julien et à cet endroit étouffant, alors tant pis.

Quand Julien a vu que j'ai signé le formulaire de consentement sans hésiter, il s'est enfin soulagé. Il m'a regardée et a dit d'une voix douce : « Puisque tu as accepté, je tiendrai ma promesse. Dis-moi tout ce que tu veux. »

J'ai pris une profonde respiration et j'ai dit calmement : « Je n'ai qu'une seule demande, c'est de couper tous les liens avec la famille Richard. À partir de maintenant, je n'ai plus aucun lien avec vous. »

Ses sourcils se sont froncés. « Tu es sérieuse ? »

Il pensait probablement que je profiterais de cette chance pour le forcer à me marquer et à m'épouser. Il ne s'attendait pas à ce que je veuille m'éloigner complètement.

Je l'ai regardé sans hésitation et j'ai hoché la tête.

Il m'a fixée pendant quelques secondes, comme s'il venait soudainement de comprendre quelque chose. Son expression s'est assombrie et sa voix s'est durcie. « Alice, arrête tes jeux. Quitter la famille Richard ne signifie pas qu'il y a une chance entre nous. »

« Mon âme sœur est Rose. Elle est la seule avec qui je m'unirai. »

Au fond de moi, ma louve a hurlé d'angoisse. Je savais qu'elle voulait dire que l'âme sœur de Julien, c'était en fait moi.

Mais je m'en fichais. J'ai juste dit doucement : « Compris. »

L'humiliation du passé était encore vive dans mon esprit. Je savais que Rose avait utilisé une astuce pour empêcher Julien de réaliser notre lien. Je lui avais apporté des preuves et lui avais tout dit, mais il ne m'avait jamais crue.

Alors dans cette vie, je ne voulais que m'éloigner. Le plus possible.

Il m'a regardée un moment de plus. C'était comme s'il sentait quelque chose de différent chez moi, mais il ne pouvait pas le savoir. Il a ouvert la bouche comme s'il voulait parler, mais les faibles cris de Rose venant de la chambre l'ont interrompu.

Il s'est précipité vers elle sans hésiter. J'ai hésité, puis je l'ai suivi.

Rose était appuyée contre la tête du lit, les yeux pleins de larmes, et elle a dit d'une voix tremblante : « Julien, arrête de faire pression sur Alice. Elle me déteste. Je sais qu'elle n'acceptera jamais de m'aider... »

Avant qu'elle puisse finir, Julien a attrapé sa main et a dit, soulagé : « Rose, elle a accepté. Tout va bien se passer pour toi ! »

Rose m'a regardée, choquée, puis ses yeux sont devenus venimeux. « Elle t'a demandé de la marquer en retour ? »

Avant qu'il puisse répondre, elle m'a giflée. « Alice, n'as-tu pas honte ? Julien est ton frère. Comment oses-tu avoir ces pensées dégoûtantes pour lui ? »

Elle a pleuré, se serrant la poitrine. « Julien, si tu la marques, je me tue ! »

J'ai vu Julien faire instinctivement un pas vers moi comme pour me protéger. Mais il s'est arrêté et s'est retenu.

Il s'est retourné et a serré Rose dans ses bras. « Rose, tu es ma seule compagne et la seule que je marquerai. Quant à toute autre personne ? Aucune chance. »

J'ai pressé ma main contre ma joue brûlante et j'ai eu un rire amer avant de me retourner pour partir. Mais je me suis arrêtée en entendant leurs voix derrière moi.

« Tu dis... que le médecin t'a dit que le corps de Alice était trop faible et que me donner son sang pourrait la tuer, mais tu l'as quand même forcée à le faire ? » a demandé Rose.

J'ai marqué une pause, honteuse du ridicule espoir que j'avais encore pour la réponse de Julien.

Il a hésité un moment, mais la froide indifférence dans sa voix a brisé le peu d'espoir qu'il me restait. « Tu m'as donné ta moelle osseuse et tu m'as sauvé une fois. Je ne peux pas te regarder mourir. »

« Mais Alice a toujours été en bonne santé. Comment pourrait-elle soudainement être trop faible pour donner son sang quand tu en avais besoin ? Pour autant que nous sachions, elle a peut-être soudoyé le médecin et a créé toute cette histoire juste pour se donner une bonne image devant moi. »

« La chose la plus importante pour un loup-garou, c'est son âme sœur. Je veux juste que tu ailles mieux rapidement. »

J'ai secoué la tête et j'ai souri amèrement.

Oui, l'âme sœur d'un loup-garou signifiait tout. Mais je supposais que même la Déesse de la Lune n'aurait pas pu prédire qu'un loup-garou se tromperait de personne pour son âme sœur.

Si Julien découvrait un jour que j'étais sa vraie âme sœur... le regretterait-il ?

Probablement pas. Il était trop profondément pris au piège des mensonges de Rose.

Cette vérité serait enterrée avec moi.

Je suis sortie de la chambre, j'ai pris quelques instants pour me ressaisir, puis j'ai appelé ma professeur, Simone Laurent.

« Mme Laurent, j'ai décidé de rejoindre le programme de guérisseurs pour zone de guerre dont vous m'avez parlé. »

Puisqu'il ne me restait plus beaucoup de temps, autant en profiter.