Après avoir pris une bonne douche chaude, brossé les dents avec une brosse que j'ai trouvé près du lavabo, et m'être coiffée avec un petit peigne qui m'a fait grimacer, je sors de la salle de bain annexée à la chambre, pour aller faire mon inspection.
Délicatement, je pousse les rideaux blancs, et mes yeux découvrent une vaste étendue de champ, et sur la droite une ancienne maison en pierre.
Une vieille dame à la peau noire tient un panier de linge à la main, tandis qu'un homme aussi âgé qu'elle et avec la même couleur de peau, s'active dans un potager sur le flanc gauche de leur maison.
Piquée par la curiosité, je m'empresse de remettre mon jean ainsi que ma chemise rouge de la veille, avant de rejoindre Jaden dans le salon.
Vautré sur le canapé, il me fait un signe de la tête m'indiquant une tasse de café qui m'attends sur une petite table ronde en bois.
Je vais la chercher, avant de m'asseoir sur une chaise qui trône à côté de la télévision.
—Qui es-tu Jaden Dow ?
Il esquisse un petit sourire.
—Tu t'es calmée ?
—Si on veut. C'est chez toi ici ?
—Oui, répond-il en buvant une gorgée de son café.
Je l'imite, en me délectant de cette boisson délicieuse qui pour une fois ne ressemble pas à un jus de chaussette.
Puis je croise mes jambes en m'adossant contre ma chaise.
—Qui sont ces personnes que j'ai vu dehors ?
Un nouveau sourire se dessine sur son visage.
—Je vois que tu es plus bavarde le matin. Ce sont les parents d'un collègue, ils sont propriétaires du gîte.
—Tu vis dans un gîte ? Mais pourquoi ?
—C'est une longue histoire.
—Ça tombe bien, j'ai tout mon temps.
Nous sourions au même moment, avant de boire quelques gorgées de café en silence.
Mes yeux en profitent pour détailler le mobilier du salon.
Un petit canapé deux places marron, un fauteuil en velours posé juste à côté, une table à manger ronde avec quatre chaises, et enfin un grand buffet en bois vernis sur ma droite.
Pas de cadres aux murs, juste un papier peint bleu ciel. Bien que sommaire, ce petit studio paraît agréable.
Quand mes yeux se posent sur Jaden, celui-ci me fixe d'un air amusé.
—Tu joues à ta psy avec moi, ou je rêve ?
—Il faut bien que je me renseigne sur mon ravisseur, je réplique d'un ton taquin. Alors, pourquoi tu vis ici ? Et depuis quand t'as une voiture ?
—Viens t'asseoir à côté de moi et je te répondrai.
—Non merci. Je suis très bien assise ici.
—Tant pis pour toi.
Ses yeux noisettes se mêlent aux miens, et un petit trouble s'invite dans mon cœur. Intimidée, je ramène la tasse de café à mes lèvres pour faire diversion.
—Alors la voiture ? j'enchaîne en gardant mon regard braqué sur ma tasse.
—Elle était tombée en panne ce jour-là.
Mes yeux se relèvent vers lui pour les ouvrir en grand.
—À croire que le destin voulait qu'on se rencontre, sourit-il.
Une nouvelle fois troublée par le regard perçant qu'il me jette, je finis de boire mon café et change de sujet.
—Tu ne bosses pas aujourd'hui ?
—Ce soir, répond-il en se levant du canapé. T'as fini ton café ?
—Oui, merci.
—Alors on y va.
—Attends !
À peine a-il enfilé sa veste, qu'il me dévisage d'un air surpris.
—Tu me ramènes chez moi ? je demande d'une petite voix.
—C'est bien ce que tu voulais, non ?
Je pose ma tasse sur la table, avant de m'avancer vers lui de manière timide.
—Tu fais quoi de tes jours libres ?
—C'est-à-dire ?
—Je veux dire, tu as prévu de faire quoi cette après-midi avant d'aller travailler ?
Adossé chacun sur un mur opposé du couloir, nos regards se nouent une nouvelle fois dans une atmosphère étrange.
D'une voix troublée, il m'interroge :
—Tu ne veux plus que je te ramènes chez toi ?
Je baisse les yeux au sol.
—Pas tout de suite...Mon petit frère est chez nos grands-parents...Alors je ne suis pas pressée de rentrer chez moi...
Un long silence s'abat dans ce petit studio d'à peine trente mètres carrés.
J'arrive même à entendre l'électricité naviguer à travers les murs du couloir.
Quand soudain Jaden se dirige vers la porte d'entrée en déclarant :
—Viens, on va se balader.
***
Il est déjà presque 15h quand on enfourche deux vélos pour aller se promener à travers les longues routes boisées de la campagne écossaise.
Jaden me confie qu'on se trouve dans un village à trente kilomètres d'Edimbourg, et que c'est à cause d'une rupture amoureuse qu'il a quitté la capitale pour venir s'installer ici. C'est une solution provisoire qui dure depuis quatre mois maintenant, mais il s'y plaît bien.
Il me raconte ensuite son enfance à Edimbourg, ses deux sœurs qui vivent toujours là-bas, tandis que ses parents ont émigré sur une île Française du Pacifique.
J'apprends aussi son âge (25 ans), qu'il adore les pizzas aux anchois, et qu'il déteste le surf.
Cette balade est plus agréable que je ne le pensais. Elle est surtout empreinte de légèreté et de bonne humeur.
Une fois arrivés à la plage, on s'arrête pour manger des paninis dans un petit snack, puis motivés par l'air incroyablement doux pour un mois de janvier, on va se balader un peu au bord des quais.
L'après-midi passe à la vitesse de l'éclair, et lors de notre retour au gîte, Jaden et moi pédalons côte à côte en silence, la tête dans les étoiles.
Mercredi matin, 10h.Je fixe depuis trente minutes ce vieux portail en fer, derrière lequel se trouve la maison de retraite qui accueille ma cousine.Je n'ai pas dormi de la nuit.J'étais fou d'inquiétude pour Léna.Est-ce qu'elle va bien? Est-ce qu'elle s'est encore barrée de chez elle à cause du boloss, et qu'elle n'a pas osé venir chez moi ?Pourquoi elle ne m'appelle jamais quand ça ne va pas ?J'écrase ma troisième cigarette, enfin décidé à aller voir ma cousine.Je suis sûr que Léna est venue bosser même si j'ai prévenu la secrétaire lundi qu'elle ne viendrait pas de toute la semaine.J'aurais tellement voulu qu'elle reste avec moi ce jour-là, et même toute la nuit comme je lui avais proposé, mais cette fille fuis les hommes autant qu'elle les ensorcelle.Une fois à l'intérieur de cette maison de retraite de bourges, l'hôtesse de l'accueil m'indique poliment le numéro de la chambre de ma cousine : numéro 23, deuxième étage.Mon courage en main, cinq minutes plus tard je me tiens
Point de vue JADEN—Parce que je voulais prendre l'air. J'étouffe là-bas !Les bras croisés sur sa poitrine, ses magnifiques yeux verts s'ancrent en moi de manière désespérée.La voir encore plus fragile que d'habitude, là juste devant moi, sous mon toit, me rend encore plus fou d'elle.Je dois l'embrasser.Je m'approche d'elle pour coller ma main sur sa joue, quand des coups contre la porte me ramènent à moi.Son mec.Je fais un pas en arrière, à bout de nerfs que ce gars veuille la récupérer.Elle est venu chez moi, putain ! Ça veut tout dire ducon !—Il faut que tu lui parles.Je l'entends soupirer fort, et quand je me retourne pour croiser ses yeux, elle acquiesce de la tête.J'ouvre au connard du soir qui fait pitié à voir, et avant de sortir de la chambre je jette un dernier regard à ma rose.Elle ne me voit déjà plus, obnubilée par son mec qui la prends immédiatement dans ses bras.Ok, cette fille est compliquée.Je me demande même si elle est vraiment psy ? Il faudrait que je
Quand je redescends dans le salon, Hylan est en train de fumer une cigarette dans le jardin, pendant que son frère comate devant la télé.Je les fixe tous les deux avec un grand vide dans mon cœur.C'est la fin du ménage à trois.C'est la fin de ma liberté.La schizophrène que je suis, attrape son sac à main et les clés de voiture. Je claque la porte de la maison des frères Henderson.Je conduit vite, trop vite, à travers de longues nappes de brouillard.Une voiture me suit derrière moi et n'arrête pas de me faire des appels des phares. C'est Max.J'appuie sur l'accélérateur jusqu'à 120 km/h sur des routes limitées à 90.Je dois fuir aussi loin que possible, pour que Max ne puisse jamais me rattraper.Dix minutes plus tard, je me gare en trombe devant le gîte, déglinguant sur mon passage une table et des chaises. Le fracas est terrible.Affolée, je sors de la voiture, quand j'entends celle de Max écraser le reste des débris qui jonchent sur le sol.J'ai à peine le temps de tambouriner
Le soir, après avoir couché mon petit frère, Hylan m'attends dans le couloir.Son regard froid ne présage rien de bon.D'un pas tremblant, je suis Hylan dans sa chambre, ignorant quelle pierre va encore tomber sur ma tête...Assis face à face sur le grand lit de sa chambre, il me dévisage avec un regard trouble.—Mon frère est venu me parler.—Mmmh...—Apparemment vous avez décidé de vous mettre ensemble?—...—T'as envie de te mettre avec lui ?—Tu me connais Hylan, je sors avec personne. À part toi.—Oui mais toi et moi, on est quoi pour toi ?—On est...On est...On est Nous !—Tu nous considères comme un couple ?—Hylan, ça fait cinq ans qu'on est ensemble ! Donc oui !—T'es prête à laisser tomber Max ?—Ah non ! Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi !Je me lève furieuse du lit, et je commence à faire les cent pas dans la chambre.—Ma puce, j'ai besoin de réponses.—Et moi j'ai besoin qu'on me laisse tranquille !Je m'arrête de marcher en posant mes mains sur mes hanches.—Je suis en
Depuis combien de temps n'ais-je plus fait l'amour "normalement" dans un lit avec un garçon qui s'intéresse réellement à moi ?L'instant qui suit est baigné de sérénité. Une douce sérénité que je n'ai plus côtoyé depuis fort longtemps.Jad me fait rouler sur son ventre, et on se contemple dans un beau silence.Cependant son regard perd peu à peu de sa lumière, jusqu'à que je réalise qu'il est devenu soucieux.—Il faut qu'on parle.—Pourquoi est-ce qu'on doit toujours parler avec toi ? je marmonne.—Parce qu'on ne peut pas continuer comme ça !—Alors quitte-moi ! Disparais de ma vie !Je tente de me dégager de son ventre, mais il me maintient fermement dans ses bras.—C'est trop tard. Je tiens trop à toi.Abasourdie par ses paroles, je lache prise, et mon corps s'écroule sur le sien.Mon visage enfouis dans son cou, je chuchote :—Jad, ne fais pas ça.—Faire quoi ?—N'espère pas quelque chose avec moi. S'il te plaît.Il retire ses bras de mon dos, et j'en profite pour rouler sur le côt
En arrivant à la maison de retraite le lendemain matin, une voiture sportive gris métallisée, est garée juste à côté du portail.Je reconnais immédiatement celle de Jaden. Je sors de ma voiture avec ma colère qui est revenue en force.Il sort aussi de sa Golf pour se diriger droit vers moi. Il est vêtu exactement comme le premier jour de notre rencontre : un jean et un k-way noir.Un vrai vagabond.—Pourquoi t'as pas répondu à mes appels ?s'inquiète-t-il en s'arrêtant devant moi.—Tu l'as tuée, Jad ! Tu l'as tuée !Choquées, ses pupilles s'écarquillent.Animée d'une rage indescriptible, je me rue vers lui pour frapper son torse aussi fort que je peux.—C'est à cause de toi qu'elle est morte ! Tu m'as forcée à la tuer !J'éclate en sanglots.Une fois de plus.Ses bras viennent m'envelopper avec une profonde douceur, alors que la douleur qui me ronge depuis deux jours se libère avec fracas.Pendant que je m'effondre dans ses bras, il recule contre un arbre, pour se mettre à l'abri du fr