Chapitre 3

Lucie a regardé leurs silhouettes s'éloigner et a levé la tête pour retenir ses larmes.

Puis, serrant les dents contre la douleur, elle a poussé la portière et a marché en titubant vers l'entrée de l'hôpital.

La pluie s'est mise à tomber en fin de journée, mais Lucie n'avait même pas la force de se protéger. L'eau glacée ruisselait sur ses blessures.

Une infirmière a poussé un cri en la voyant et s'est empressée de la soigner avant de l'emmener passer des examens.

Une heure plus tard, épuisée, Lucie a terminé enfin les examens. Elle a pris son téléphone : une dizaine d'appels manqués, tous de Florian.

Sans hésiter, elle a éteint l'appareil.

Comme la perfusion devait durer jusqu'à tard dans la nuit, Lucie a demandé une chambre d'hôpital.

Allongée sur le lit, son esprit a flotté vers le passé...

Après l'accident qui avait rendu Florian handicapé, c'était elle qui le remplaçait aux dîners d'affaires. Une fois, deux PDG s'étaient disputés au point de renverser la table. Les assiettes s'étaient brisées à ses pieds, un éclat de verre lui entaillant le poignet.

Florian avait accouru, rompant immédiatement tout partenariat avec les deux entreprises. Il l'avait emmenée en urgence à l'hôpital. Elle trouvait la réaction excessive, mais il lui avait murmuré avec tendresse :

« Lucie, tu es la femme la plus importante à mes yeux. Je ne veux voir aucune blessure sur toi, sauf celles liées à la maternité. Une femme doit rester parfaite pour être belle en robes et bijoux. »

Aujourd'hui, alors que son visage n'était que sang, il l'avait ignorée pour une autre.

Lui qui promettait de la protéger de toute blessure l'avait pourtant poussée à donner sa moelle osseuse à Céleste. Même la maternité, il l'avait vécue en secret avec cette autre.

Avant de s'endormir, Lucie a vu la nouvelle publication de Céleste : une vidéo où Florian, à genoux, lui lavait les pieds pour l'aider à dormir.

Elle la regardait en boucle, la poitrine oppressée, le sommeil désormais impossible.

Le lendemain matin, Lucie est rentrée à contrecœur. À peine entrée dans la villa, le majordome Jacob l'a accueillie avec un visage soucieux : « Madame, Monsieur vous attend près de la piscine... Il n'est pas de bonne humeur. »

Lucie s'est dirigée vers la piscine. De loin, elle a aperçu Florian en train de réconforter Céleste, qui sanglotait doucement d'un air pitoyable.

En voyant enfin Lucie, Florian n'a pas pu contenir sa colère. Une aura glaciale émanait de lui : « C'est toi qui as volontairement révélé les allées et venues de Céleste aux ennemis de son père ? »

Lucie s'est arrêtée net. Son regard s'est porté vers Céleste, affalée sur le canapé. La jeune femme lui a lancé un regard de biais, ses lèvres rouges ourlées d'un sourire satisfait.

Lucie a compris instantanément. Irritée, elle s'est massé les tempes : « Je ne connais même pas les ennemis de son père. Comment aurais-je pu leur révéler ses allées et venues ? »

Le visage de Florian s'est assombri encore. Il a jeté une pile de photos devant Lucie : « Et ces clichés d'eux avec toi, tu m'expliques ? »

Lucie a baissé les yeux vers les photos. Son visage s'est figé. C'étaient des images d'elle rencontrant un acheteur dans un café quelques jours plus tôt, pour vendre des articles de luxe d'occasion... Tout s'éclairait : l'homme avait été étrangement accommodant, sans même marchander, insistant seulement pour se voir en personne.

Devant le silence de Lucie, Florian a cru à un aveu muet. Son expression est devenue alors terrifiante.

« Je t'ai pourtant dit et répété : peu importe les rumeurs sur Céleste et moi, il n'y a rien entre nous. Pas ce que tu imagines. »

« Elle est comme une petite sœur pour moi, et c'est une personne foncièrement bonne. Après huit ans à mes côtés, tu devrais savoir comment je te traite. Et je t'ai même demandé en mariage la semaine dernière ! Comment peux-tu lui faire du mal ainsi ? »

Les paroles de Florian ont transpercé le cœur de Lucie comme des aiguilles.

Durant ces huit années d'amour, bien que leur histoire ait commencé par un stratagème, il l'avait courtisée pour provoquer Raoul et venger Céleste, elle avait consacré cinq ans à s'occuper de lui après son accident.

Cinq années où il avait sombré dans la dépression, craqué en pleine nuit. Ce drame survenu parce qu'il avait risqué sa vie dans une course automobile, juste pour flatter l'ego de Céleste.

Mais l'homme devant elle semblait avoir tout oublié...

Pendant ces cinq ans, Lucie avait secrètement suivi des cours de rééducation, lui massant les jambes chaque jour sans exception. Face à sa mélancolie persistante, elle avait consulté le meilleur psychologue de la région pour apprendre à apaiser un patient handicapé. Tant de sacrifices... dont il ne gardait aucun souvenir.

Quelle ironie !

Une question lui brûlait les lèvres : s'il ne voyait Céleste que comme une sœur, pourquoi avait-il permis à son sperme de donner vie en elle ?

« En effet, ces huit années m'ont bien éclairée sur ton comportement envers elle... et envers moi. »

Florian a crispé légèrement les traits : « Qu'est-ce que tu cherches ? »

Lucie ne voulait pas discuter. Elle a désigné son bandage avec un sourire amer : « Hier, elle s'est fait kidnapper, mais moi aussi je suis blessée. Cinq points de suture. Serais-je assez stupide pour me mutiler afin de la piéger ? »

Mise en face des faits, Florian, obsédé par Céleste, persistait dans sa méfiance.

Contemplant sa mâchoire tendue, Lucie s'est félicitée intérieurement de son départ dans trois jours.

« Puisque tu as déjà ton verdict, Florian, que comptes-tu faire ? »