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Chapitre 05

last update Last Updated: 2025-08-05 22:25:42

L'après-midi, je me rends chez mon tailleur pour récupérer un nouveau costume. Puis chez le fleuriste pour choisir des roses. Pas rouges, trop vulgaires. Blanches, pureté, innocence. Exactement l'image que je veux projeter.

— Pour une occasion spéciale ? » demande Jasmine, la fleuriste.

— On peut dire ça. Une première fois. 

Elle sourit, complice. Jasmine me connaît depuis des années, elle a préparé des bouquets pour toutes mes conquêtes. Elle ne pose jamais de questions indiscrètes.

— Roses blanches, alors. Pour l'innocence de l'amour naissant. 

Si elle savait...

De retour au manoir, je prends une douche et m'habille avec soin. Costume bleu marine, chemise blanche, cravate de soie. Parfum discret mais efficace. Je me regarde dans le miroir de ma chambre et souris. Aucune femme ne peut résister à Tristan Johnson quand il met le paquet.

À dix-neuf heures trente, Franck m'accompagne au restaurant. En route, je repense à ma stratégie. Avec Maeve, il faut y aller doucement. Pas d'approche frontale comme avec Ashley ou les autres. Cette fille a de la classe malgré sa situation, elle ne tombera pas dans le panneau si facilement.

Le secret, c'est de jouer sur ses faiblesses. Sa situation précaire, sa responsabilité envers son frère, ses rêves brisés. Je vais lui offrir l'espoir d'une vie meilleure, l'illusion d'être sauvée. C'est imparable.

Après les nombreux embouteillages, je suis enfin devant le restaurant. Quand j'entre, Diego se précipite vers moi.

— Monsieur Johnson ! Votre table vous attend. Maeve va s'occuper de vous dans un instant. 

Je m'installe à ma table habituelle et observe discrètement la salle. Maeve est en service près du bar, ses cheveux attachés en chignon élégant, sa robe noire mettant en valeur sa silhouette fine mais féminine. Elle n'a pas encore remarqué ma présence.

Quand elle se retourne et m'aperçoit, je vois la surprise passer sur son visage, suivie d'une rougeur délicate. Elle hésite une seconde, puis s'avance vers ma table d'un pas mal assuré.

— Bonsoir, monsieur Johnson. Vous... vous dînez seul ce soir ? 

— En effet. J'attendais quelqu'un, mais elle m'a fait faux bond. » Je mens avec un sourire désarmant. « Heureusement, votre présence compense largement son absence. 

Elle rougit encore plus fort. Trop facile.

— Qu'est-ce que je peux vous servir ? 

— D'abord, asseyez-vous une minute. Vous avez l'air fatiguée. 

— Je ne peux pas, je suis en service. 

— Diego ! » J'appelle le maître d'hôtel d'un geste de la main. « Mademoiselle D'Almeida peut-elle s'asseoir quelques minutes ? Elle semble épuisée. 

— Bien sûr, bien sûr ! Maeve, asseyez-vous. Prenez votre temps. 

Elle s'assoit timidement sur le bord de la chaise face à moi. Je sors le bouquet de roses blanches de son emballage et le pose devant elle.

— Pour vous. 

— Je... je ne peux pas accepter. 

— Pourquoi ? Elles ne vous plaisent pas ? 

— Elles sont magnifiques, mais... 

— Alors c'est parfait. » Je me penche vers elle. « Maeve, puis-je vous poser une question personnelle ? 

Elle hoche la tête, méfiante.

— Qu'est-ce qui vous rend heureuse ? 

La question la déstabilise complètement. Je vois qu'elle cherche une réponse, mais qu'elle n'en trouve pas. Parfait. C'est exactement l'effet recherché.

— Je... je ne sais pas. 

— Vous ne savez pas ce qui vous rend heureuse ? 

— Les petites choses, j'imagine. Voir mon frère sourire. Avoir assez d'argent pour payer les factures. Ne pas s'inquiéter pour demain. 

Sa voix se brise légèrement sur les derniers mots. Mon cœur devrait se serrer, mais au contraire, je ressens une excitation particulière. Elle se livre, elle s'ouvre. Le plus dur est fait.

— Et vos rêves ? Vos vraies aspirations ? 

— Je n'ai plus le temps de rêver. 

— Tout le monde a le droit de rêver, Maeve. Même vous. Surtout vous. 

Je tends la main et effleure la sienne sur la table. Elle ne la retire pas. Excellent.

— Vous savez ce que je pense ? Je pense que vous méritez plus que cette vie. Beaucoup plus. 

Ses yeux se remplissent de larmes qu'elle s'efforce de retenir. Je touche dans le mille.

— Accepteriez-vous de dîner avec moi demain soir ? Quelque part de spécial. Loin d'ici. 

— Monsieur Johnson... 

— Tristan. 

— Tristan. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Nous ne... nous ne vivons pas dans le même monde. 

— Justement. C'est pour ça que c'est intéressant. 

Elle hésite. Je vois qu'elle en a envie, mais sa raison lui dit de refuser. C'est le moment de porter l'estocade finale.

— Maeve, quand avez-vous pris du plaisir pour la dernière fois ? Quand avez-vous fait quelque chose uniquement pour vous ? 

Le silence qui suit me donne ma réponse. Jamais. Cette fille se sacrifie complètement pour son frère.

— Une soirée » dis-je doucement. « Une seule soirée où vous n'aurez à penser à personne d'autre qu'à vous. Où vous pourrez redevenir Maeve, pas seulement la grande sœur responsable. 

Ses défenses s'effritent. Je le vois dans ses yeux.

— D'accord » murmure-t-elle finalement. « Une soirée. 

— Parfait. » Je souris, triomphant. « Je passerai vous prendre à dix-neuf heures. 

— Non ! Je... je préfère vous retrouver quelque part. 

Méfiante jusqu'au bout. Mais ce n'est pas grave. J'ai franchi le plus difficile.

— Comme vous voulez. Le restaurant La Colombe à Constantia. Vous connaissez ? 

— De réputation. 

— Parfait. Dix-neuf heures trente. 

Je règle l'addition avec un généreux pourboire et me lève. Avant de partir, je prends sa main et y dépose un baiser, comme hier soir.

— À demain, Maeve. J'ai hâte. 

Dans la voiture qui me ramène au manoir, je savoure ma victoire. Phase un, terminée avec succès. Demain soir, je passerai à la phase deux, la séduction physique.

Maeve D'Almeida ne sait pas encore qu'elle vient de tomber dans la toile de l'araignée. Mais bientôt, très bientôt, elle sera à moi. Complètement. Et après... eh bien, après, on verra. Pour l'instant, je veux juste la conquérir. Le reste m'importe peu. C'est ça, l'art de la séduction selon Tristan Johnson.

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