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Chapitre 04

last update Dernière mise à jour: 2025-08-05 22:23:27

•••Tristan 

Samedi matin, Manoir Johnson…

Cette serveuse a quelque chose de différent. Je sirote mon expresso sur la terrasse du manoir, les yeux perdus dans les vignobles qui s'étendent jusqu'aux montagnes du Cap. Vingt-quatre heures se sont écoulées depuis ma rencontre avec Maeve D'Almeida au Jardin Secret, et je n'arrive pas à la sortir de ma tête. C'est... inhabituel.

D'habitude, mes conquêtes suivent un schéma prévisible. Repérage de la proie, approche calculée, séduction express, consommation, abandon. Un processus rodé qui ne me prend généralement que quelques jours, une semaine tout au plus. Les femmes tombent facilement dans mes bras quand on a mon physique, mon charme et surtout mon compte en banque. Mais celle-ci... elle a quelque chose qui m'intrigue.

Franck s'approche de ma table, imposant dans son costume noir malgré la chaleur matinale.

— Les informations que vous avez demandées, monsieur Johnson. 

Il pose une chemise cartonnée devant moi. J'aime connaître mes cibles avant de les chasser. C'est plus efficace et ça évite les mauvaises surprises.

J'ouvre le dossier et découvre une photo d'identité de Maeve. Même sur ce cliché administratif terne, elle est ravissante. Yeux noisette, cheveux châtains ondulés, sourire timide. Vingt-quatre ans, née au Cap. Orpheline depuis six mois. Parfait. Les femmes vulnérables sont plus faciles à manipuler.

— Accident de voiture » je murmure en lisant le rapport. « Parents décédés en février. Elle s'occupe de son frère cadet de seize ans. Travaille au Jardin Secret depuis quatre mois. »

Je continue ma lecture. Appartement modeste à Woodstock. Difficultés financières. Ancienne étudiante en design graphique, études interrompues après la mort des parents.

— Intéressant » dis-je à voix haute. « Une artiste contrariée qui joue les mères de substitution. 

Franck reste impassible, habitué à mes... recherches personnelles.

— Autre chose, monsieur ? 

— Oui. Je veux que tu surveilles ses habitudes. Trajets, horaires, fréquentations. Discrètement. 

— Bien, monsieur. 

Quand Franck s'éloigne, je repense à hier soir. La façon dont Maeve a rougi quand je lui ai fait des compliments. Ses mains qui tremblaient légèrement en servant le champagne. Cette innocence dans son regard quand elle m'a dit célébrer « chaque jour qui passe ».

Elle ne tombe pas dans mes bras comme les autres, et c'est exactement ce qui m'excite. Ashley Monroe, ma dernière conquête, s'était pratiquement jetée sur moi dès le premier regard. Trop facile, trop prévisible. Où est le plaisir de la chasse quand la proie se livre d'elle-même?

Mon téléphone vibre. Un message d'Ashley, justement.

— Salut beau gosse. Tu me manques. On se voit ce weekend ? J'ai envie de toi... 

Je supprime le message sans répondre. Ashley appartient au passé. J'ai une nouvelle obsession maintenant.

Je me lève et rentre dans la maison. Le manoir Johnson est un monument au succès de ma famille ou plutôt, de ce que je croyais être ma famille jusqu'à récemment. Colonnes de marbre, plafonds à caissons, œuvres d'art valant des fortunes. Tout ici respire le pouvoir et l'argent.

Dans mon bureau, j'allume mon ordinateur et tape « Maeve D'Almeida design » dans le moteur de recherche. Quelques résultats apparaissent, un profil LinkedIn, une ancienne page I*******m de ses créations.

Ses dessins sont... surprenants. Du talent, vraiment. Des logos créatifs, des illustrations délicates, un sens artistique indéniable. Dommage qu'elle ait dû abandonner ses rêves. Mais c'est parfait pour moi, une femme qui a renoncé à ses ambitions sera plus facilement impressionnée par ma réussite.

J'étudie ses photos sur I*******m. Sourires authentiques, yeux pétillants de vie. C'était avant l'accident, avant que la tragédie ne vienne briser cette joie naturelle. Sur les photos récentes, son sourire est plus contraint, ses yeux voilés de tristesse. Parfait. La douleur rend les femmes plus malléables. Mon téléphone sonne. Marc.

— Tristan ? J'espère que tu n'as pas fait de bêtises hier soir après mon départ. 

— Définit “bêtises”. 

— Tu sais très bien ce que je veux dire. Cette serveuse. Elle avait l'air... différente des autres. 

— Justement. 

Un soupir à l'autre bout du fil.

— Écoute, mon vieux, je te connais depuis l'université. Je sais comment tu fonctionnes avec les femmes. Mais celle-ci... elle ne mérite pas tes jeux. 

— Mes jeux ? » Je ris. « Marc, tu me prends pour un monstre. Je ne fais que... apprécier la compagnie féminine. 

— Tu les collectionnes comme des trophées et tu les jettes quand tu en as marre. 

— Elles savent très bien à quoi s'attendre. Je ne promets jamais rien. 

— Cette fille ne sait rien de ton monde, Tristan. Elle travaille pour survivre, pas pour s'amuser. 

Marc a toujours été ma conscience quand j'en avais envie d'en avoir une. Depuis nos études à Oxford, il joue les moralisateurs. Ça m'amusait, avant. Maintenant, ça commence à m'agacer.

— Merci pour tes conseils, papa. Mais je suis assez grand pour gérer ma vie amoureuse. 

— Vie amoureuse ? Tu parles de conquêtes, pas d'amour. 

Je raccroche sans répondre. Marc ne comprend pas. Lui, il a épousé sa petite amie de lycée, Sarah, et ils vivent leur petit bonheur bourgeois avec leurs deux enfants et leur maison de banlieue. Moi, je préfère la variété.

L'amour ? Quelle blague. L'amour, c'est pour les faibles, pour ceux qui ont besoin de se rassurer avec des promesses d'éternité. Moi, je prends ce que je veux quand je le veux, et j'avance. C'est plus honnête.

Je retourne sur les réseaux sociaux de Maeve. Une photo la montre avec un jeune homme aux traits semblables aux siens, son frère sans doute. Ils sourient devant ce qui ressemble à leur ancien foyer, plus spacieux que leur appartement actuel. Avant la chute.

Intéressant. Elle a connu une vie meilleure avant de sombrer dans la précarité. Cela explique sa façon de se tenir, sa diction soignée malgré sa situation. Une fille de bonne famille tombée dans la pauvreté. Parfait pour mes projets. 

Je compose le numéro du Jardin Secret.

— Bonjour, Diego Santos à l'appareil. 

— Diego, c'est Tristan Johnson. 

— Monsieur Johnson ! Quel plaisir ! J'espère que tout s'est bien passé hier soir ? 

— Parfaitement. D'ailleurs, je voudrais réserver pour ce soir. Ma table habituelle. Vingt heures. 

— Bien sûr, bien sûr ! Pour combien de personnes ? 

— Deux. Et Diego ? Je voudrais que Maeve s'occupe de mon service. Exclusivement. 

— Maeve ? » Un léger silence. « Bien sûr, monsieur Johnson. Tout ce que vous voulez. 

— Parfait. À ce soir. 

Je raccroche avec un sourire satisfait. Diego ferait n'importe quoi pour garder sa clientèle fortunée. Et Maeve n'aura pas le choix, elle a besoin de ce travail.

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