—D’accord As, je vais t’expliquer. De toute manière ça ne change plus grand-chose, maintenant.Je déglutis douloureusement. Il me prend de haut, me fait comprendre qu’il sait tout et que je ne sais rien. Est-ce que le Ellis chaleureux était un masque? S’ était-il forgé une personnalité pour me plaire? Dans quel but? Dans quelle optique?—Isaac ne t’a pas été attribué arbitrairement, mais le Docteur te l’a déjà dit un peu plus tôt, n’est-ce pas?—Le Docteur Healey…Je n’ai pas besoin qu’on m’explique davantage pour comprendre leur raisonnement. On m’a implanté une âme sœur faussée dès le départ et elle était censée me guider jusqu’à la Rébellion, mais pourquoi?Il peut lire en moi comme dans un livre ouvert et c’est sans surprise qu’il répond avant même que j’aie formulé la question à haute voix:—Parce que tu es la fille Wheel, que tu savais où étaient cachés les dossiers et que
Parfois, je repense à son corps qui s’effondre, à son regard d’incompréhension qui me transperce. Je ne sais pas pourquoi ce souvenir remonte à la surface… Comme une tache qu’on essaie d’effacer, mais qui reste indélébile.Je mentirais en disant que ça ne me fait rien, mais j’ai l’habitude du mensonge.Ça ne me fait pas rien, mais ça ne me fait pas quelque chose non plus… Juste une ancienne cicatrice que l’on a envie de gratter, ou que l’on détaille de temps à autre, juste pour se remémorer qu’elle est là.Je me contente de regarder dans le vide, de me rappeler ses mains sur mon corps, ses lèvres sur les miennes. J’essaie désespérément de me souvenir de ce que je ressentais pour lui, de me replonger dans cet océan d’incertitudes, cette insécurité béate dans laquelle nous plonge l’amour.Je ne dirais pas que ce mot a été banni, juste qu’on ne le prononce plus vraiment. On se regarde les uns les autres, comme des fantômes errant
Juliette Pierce est née en 1996 à Ambilly.Grande adepte de l’imaginaire, Juliette est passée par Poudlard, connait les Trois lois de la robotique par cœur, a obtenu «Audacieuse» comme faction et rêverait d’être une Or. Écrire a toujours été sa passion et Everlasting, son premier roman publié, s’inscrit dans son genre de prédilection: la science-fiction. Curieuse de tout, elle profite aussi de son statut d’étudiante pour lire, voyager, s’imprégner de la musique, des films et des séries qu’elle ne peut s’empêcher de dévorer.
<end><recherche d’âme sœur>En traitement.</recherche d’âme sœur>J’ai peur. Peur de finir seule, dans le noir, sans personne pour m’aimer, sans personne pour me regarder. J’ai peur de ne plus ressentir les étincelles d’antan, celles qui m’emportaient loin, loin sur l’embrun des mers, sur le flanc des montagnes, sur les ailes d’un oiseau ou dans le cœur d’un papillon. J’ai peur de ne plus avoir le droit de goûter au miel de l’amour, à l’amertume des tristesses nocturnes.Et dans mon champ de vision, la barre de téléchargement ne se remplit pas. J’ai beau cligner des yeux, rafraîchir la page, ça ne change rien. Elle charge. Soulmates charge. Soulmates, le logiciel censé me trouver mon âme sœur.«En traitement». Voilà des mois que j’attends, que j’essaie de ne plus avoir peur, de ne plus pleurer. Mes amies obtiennent la leur, voient les tatouages de l’amour fleurir sur leur peau, et moi… j’attends. J’ai l’impression
<alerte>Sarah a laissé 14 nouveaux messages.Everlasting a tenté 6 fois d’entrer en communication avec vous.Everlasting:«RDV, 10 heures, synchronisation terminée.»</alerte>Mal de crâne. Tête dans la brume. Bouche pâteuse. J’ai trop bu un argent que je n’ai pas, et je ne suis pas certaine de pouvoir mettre un pied devant l’autre. Je cligne des yeux, mes lentilles bioniques s’adaptent et injectent directement de l’humidificateur pour que je puisse lire correctement les messages que l’on m’a laissés.«Everlasting»Les lettres capitales explosent ma rétine, mais je m’en moque. Everlasting, qui distribue des âmes sœurs à la pelle, mais qui était incapable de m’en trouver une, a terminé de me synchroniser. Mon Dieu… Je me lève, trébuche et trépigne, parce que c’est là, c’est maintenant. Dès qu’ils m’auront apposé leur tatouage, je serai enfin considérée, je ferai enfin partie de la société 
Je papillonne, incapable de garder les yeux ouverts, alors que des torrents de soleil ruissellent sur l’opale des meubles. Il fait trop clair. Je plisse les paupières, agacée par ces jeux de lumière dont tout le monde ne peut s’empêcher de raffoler. Il faut toujours que tout soit blanc, pur, parfait… J’ai l’impression de faire mes premiers pas au paradis et que l’on va venir me juger, moi, avec mes vêtements sombres, mes cheveux noir corbeau et mon regard brun.Je n’en peux plus de ce monde manichéen et de ces formulaires à remplir pour espérer rentrer dans leur petite prison dorée. Je n’en peux plus de me sentir à côté de la plaque, pas intégrée et pas assez bien pour eux.Le Docteur qui se tient devant moi, assis dans son immense fauteuil de cuir beige, a peut-être les réponses à mes questions.<infobulle>Docteur HEALEYÂme sœur: approuvéeMarié, trois enfants.Le reste des informations est confidentiel.</infobu
On m’a reléguée à la salle d’attente. Entre les sièges laissés vides par des patients imaginaires, je laisse mes pensées vagabonder en regardant distraitement les informations qui défilent sur un écran plat, suspendu au mur d’argent qui me fait face.«… une loi édifiante est actuellement débattue par le Comité», explique une journaliste devant un magnifique fond vert.Ils vont bientôt m’injecter Soulmates 2.0 dans le corps. J’ai la tête ailleurs, pleine de ces rêves que l’on m’a arrachés. J’ai hâte qu’on en finisse. Hop, ils me mettent leur substance dans le bras, ils me virent mon million, je fais leurs tests idiots et je file! Aucun problème, je serai sage comme une image, ombre parmi les ombres, rien qu’un cobaye parmi tant d’autres qui n’a qu’une envie: retourner à sa vie d’avant.«Le taux de natalité est toujours au plus bas, même si depuis l’avènement de Soulmates, les choses s’améliorent. Malgré cela, nous sommes toujours
—As, vous allez bien?Les infobulles s’éparpillent dans mon champ de vision alors que toutes les alertes sont au maximum. Mon souffle suit leur cacophonie, alors que j’essaie de comprendre ce qui m’arrive. Ellis me tient fermement contre lui tandis que l’infirmière exige de l’aide dans le couloir. Un instant, j’ai cru qu’il s’inquiétait, mais rien à signaler: il s’agit d’une demande factuelle, un questionnement lié à ma chute.—Vous n’auriez pas dû vous lever, mademoiselle Wheel, ce n’est pas recommandé dans votre cas…Alors pourquoi Ellis est-il debout, lui, hein, capable de me soutenir? Pourquoi est-ce qu’il va bien?iBrain s’efforce de stopper l’effervescence de son propre logiciel: il veut appeler les secours, mais je l’en empêche. Je suis déjà aux urgences. S’il y a bien quelqu’un pour s’occuper de mon cas, c’est Everlasting. Même du sol, je distingue Lizzie en train de faire apparaître mes fonctions vitales sur