Chapitre 43LE POINT DE VUE DE DAMIEN Le silence s’écrasait encore sur nous quand je baissai lentement mon bras. La fumée s’élevait du canon, se dissipant dans l’air saturé de sang et de peur. Je tendis l’arme à Selena, sans un mot.— Tiens. Récupère ton jouet.Elle la saisit aussitôt, la faisant tourner dans sa main avec son aisance habituelle. Puis elle sortit un chiffon de sa poche et commença à essuyer le métal, comme si le sang et la poudre n’étaient qu’une poussière banale. Je la regardai faire, le visage impassible, mais à l’intérieur mon cœur battait encore comme un tambour de guerre.— Ça faisait longtemps, dit-elle enfin, que je ne t’avais pas vu comme ça. Avec une telle rage… une telle colère.Sa voix avait une nuance étrange, quelque part entre la satisfaction et l’avertissement. Elle releva les yeux vers moi, un léger sourire en coin.— J’espère que tu es revenu une fois pour de bon, Damien.Je ne répondis pas. Je fixai simplement le corps inerte suspendu devant nous, la
Chapitre 42 LE POINT DE VUE DE DAMIEN L’entrepôt secret sentait le métal rouillé et la peur. Dès que j’entrai, le bruit me frappa : des coups secs, des râles étouffés, des chaînes qui grinçaient. J’avançai dans l’ombre, mes bottes claquant sur le sol de béton, et je tombai sur la scène.Selena. Ma chère sœur. Toujours implacable, toujours dans l’excès. Elle se tenait droite, élégante même dans la cruauté, une matraque à la main, ses yeux noirs plantés sur l’homme attaché à une chaise. Lui, il n’était plus qu’une loque : chemise déchirée, visage en sang, respiration sifflante.Je laissai mon dos se coller contre le mur, les bras croisés, et je la fixai.— Qu’est-ce qu’il a fait ?Elle me jeta un regard froid, mais un sourire fin étira ses lèvres.— Il a parlé, Damien. À la police. Tu imagines ? Un de nos gars. Il a vendu des infos. Si tu avais été là au lieu de jouer les baby-sitters chez cette gamine Belmont, ça ne serait jamais arrivé.Je grinçai des dents. Voilà, c’était toujours
Chapitre 41LE POINT DE VUE DE CHRISTINEJe n’avais pas vu le temps passer. J’étais restée assise là, sur le canapé du salon, sans vraiment savoir combien d’heures s’étaient écoulées depuis que le corps de mon père avait quitté la maison. Tout me semblait irréel. Le silence autour de moi pesait comme une chape de plomb, seulement interrompu par le tic-tac de l’horloge, qui me donnait l’impression d’étouffer.Damien était sorti, il m’avait dit qu’il allait acheter quelques affaires pour la maison, histoire de « remettre un peu d’ordre ». J’avais hoché la tête sans même chercher à comprendre. J’étais encore engluée dans ce brouillard d’incompréhension et de douleur.Quand on sonna à la porte, je mis un moment à réagir. Mes jambes tremblaient, mais je me levai et allai ouvrir.— Amenda… Naomie… soufflai-je, la gorge nouée.Mes deux meilleures amies se tenaient là, leurs regards inquiets se posant sur moi comme des mains bienveillantes. Avant même que je dise un mot de plus, elles m’encer
Chapitre 40LE POINT DE VUE DE DAMIEN Quand les voitures officielles se sont arrêtées devant la maison, j’ai tout de suite compris que rien de bon n’allait suivre. Trois hommes en costume sombre sont sortis, mallette à la main, leurs pas lourds résonnant sur l’allée comme un verdict déjà prononcé. Ils se sont présentés comme des représentants de la banque, leur ton ferme, leurs visages fermés : ils n’étaient pas là pour discuter.Christine, elle, a bondi aussitôt. Ses yeux rougis par le chagrin se sont emplis d’une nouvelle fureur.— Vous… vous ne pouvez pas faire ça ! cria-t-elle, la voix brisée mais tranchante. Vous n’avez pas le droit !L’un des hommes, implacable, répondit d’un ton sec :— Mademoiselle Belmont, votre père avait mis la maison en garantie. Ses comptes sont vides, ses dettes immenses. En conséquence, la banque reprend possession du bien.Christine secoua la tête, comme si on lui enfonçait un couteau dans le cœur.— Non ! Vous comprenez pas ! J’ai déjà perdu mon père
Chapitre 39LE POINT DE VUE DE DAMIENJe n’arrivais pas à croire ce que je venais de voir. Monsieur Belmont, cet homme si fier, si imposant… effondré sur son bureau, une balle dans la tête. Je sentais encore l’odeur âcre de la poudre, comme un goût métallique dans ma gorge. Une partie de moi était sincèrement attristée, presque choquée : jamais je n’aurais cru qu’il irait jusque-là. Mais une autre partie, plus sombre, savait que j’y étais pour quelque chose. Ses comptes vides… c’était moi. Et Christine ne devait jamais, jamais l’apprendre.Je jetai un coup d’œil vers elle. Elle tremblait, le visage ravagé par les larmes, encore incapable d’accepter la réalité. Son regard se posa un instant sur moi, et je lus dans ses yeux toute la confiance qu’elle m’accordait. Ce fut comme un coup de poignard. Mais je me ressaisis. J’avais une mission.Christine s’éloigna un peu, passant une main fébrile dans ses cheveux emmêlés.— Je vais… je vais me rafraîchir un peu, dit-elle d’une voix brisée. Vi
Chapitre 38LE POINT DE VUE DE CHRISTINEJe n’arrivais pas à respirer. Mes larmes coulaient sans fin, brouillant ma vue, mais l’image restait gravée dans mon esprit : mon père, mon pilier, effondré dans ce fauteuil, le visage éclaboussé de sang. Rien ne pouvait effacer ça.Je serrai son bras froid entre mes mains, incapable de le lâcher.— Papa… papa… pourquoi tu m’as laissée ?Ma voix se brisait à chaque syllabe, comme si mes cordes vocales elles-mêmes se déchiraient. Mon corps tremblait si fort que mes mains glissaient sur sa peau.Derrière moi, j’entendis la respiration de Damien, saccadée. Puis son ton, bas, urgent, mais rempli d’une maîtrise douloureuse :— Christine… je dois appeler les secours.Je secouai la tête, hystérique.— Non ! Non, Damien ! Il ne faut pas… si tu les appelles, ils vont… ils vont venir et l’emporter ! Je ne veux pas qu’on me l’arrache !Je me crispai, collant ma joue contre le bras inerte de mon père, comme si je pouvais le protéger même dans la mort. Dami