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Chapitre 2

last update Last Updated: 2025-07-31 13:58:14

LE POINT DE VUE DE CHRISTINE 

La salle de réception brille . Les dorures sur les murs étincellent, les lustres de cristal accroché au plafond scintillent comme des étoiles dans un ciel trop parfait. Une musique de jazz s’élève, élégante, enveloppante. Elle pulse dans l’air , c'est agréable presque envoûtante. 

Dès que nous franchissons les portes, Amanda, Noémie et moi attirons tous les regards. On dirait que le temps s’arrête. Les conversations se figent, les verres s’immobilisent à mi-hauteur, et les yeux s’accrochent à nous. 

Je marche lentement, la tête haute, ma robe noire sculptée contre mon corps comme si elle avait été cousue sur ma peau. J’affiche un sourire à peine esquissé, juste assez pour faire fondre les plus téméraires, assez distant pour les garder à distance. Je le sens dans chaque cellule de mon corps : ce monde m’appartient. Ce soir, je le domine.

Les héritiers de fortunes absurdes s’approchent. Costumes sur mesure, montres suisses, bracelets en or, égo surdimensionné. Ils me saluent avec des compliments fades et des regards trop appuyés. Je les observe comme on regarde une collection de trophées. Trop faciles, trop prévisibles.

— Aucun d’eux ne mérite même un battement de cil, je murmure à Noémie, en croisant les bras.

— Pourtant, celui-là, là-bas, regarde tes jambes comme s’il voulait les croquer vivantes, répond t-elle en étouffant un rire.

— Tant qu’il ne les touche pas, il peut bien fantasmer.

Plus tard dans la soirée, l’after-party déborde sur le pont supérieur. Le ciel est clair, parsemé d’étoiles, et l’ambiance a changé. La musique est plus intense, les lumières plus douces . Les corps s’approchent, les rires deviennent plus graves, les verres s’entrechoquent plus vite.

Amanda, déjà un peu pompette, s’accroche à mon bras.

— Allez, viens ! Ce soir, je veux absolument embrasser un beau mec. Peu importe lequel. Je veux du glamour et… un petit péché bien mignon.

— Tu t’es regardée ? Tu pourrais en faire tomber cinq d’un seul regard, je lui lance en riant.

Elle s’éloigne, déterminée, la robe rouge virevoltant derrière elle. De mon côté, je reste près du bar. Ma coupe de champagne à moitié vide à la main, les joues légèrement chauffées par l’alcool, je ferme les yeux une seconde. Et là, je le sens.

Ce picotement. Ce frisson derrière la nuque. Le signe que quelqu’un m’observe.

Et puis je le vois.

Un homme approche. Costume bordeaux aux coutures brillantes, bijoux clinquants, sourire carnassier. Trop de tout. Il transpire l’arrogance d’un type qui pense que son portefeuille peut lui ouvrir toutes les portes, même celles de mon attention.

— Mademoiselle, m’accorderez-vous cette danse ? Ce soir, je vais vous montrer ce qu’est un vrai homme.

Je le détaille des yeux, lentement, sans cacher mon mépris. Puis je hausse un sourcil.

— Danser avec vous ? Plutôt mourir.

Je me détourne, et là, je le vois. Un serveur passe près de moi, plateau vide à la main. Il est grand, élancé, le visage dessiné avec une précision presque douloureuse. Sa mâchoire est ciselée, son regard noir, magnétique. Insolent. Il porte la tenue classique du personnel : chemise blanche, pantalon noir… mais sur lui, c’est autre chose. Une armure.

Je tends la main, attrape doucement le nœud de sa cravate.

— Toi. Tu danses avec moi.

Il cligne des yeux, surpris. Il jette un coup d’œil autour, probablement à la recherche d’un supérieur. Mais je glisse quelques billets dans sa ceinture, sans rompre le contact visuel.

— Maintenant.

Il acquiesce, à peine. Mes doigts se posent sur son torse et un frisson me traverse. Il est chaud. Vivant et présent.

Nous nous glissons sur la piste. Je mène la danse , audacieuse. Et il me suit, précis, assuré. Nous nous adaptons l’un à l’autre comme si c’était naturel, presque écrit. Les regards se tournent vers nous. Les murmures reprennent. Certains sont fascinés. D’autres… jaloux.

— C’est qui, ce serveur ?

— Elle l’a choisi, lui ?

— Il danse comme un dieu…

Je ris. J’ai chaud. Depuis le début de cette croisière, je me sens vraiment vivante. Il y a en lui quelque chose de brut, de vrai. Il ne me regarde pas comme une vitrine de luxe. Il est là, avec moi. Et ça, c’est rare.

(...) 

Dans un coin de la salle, un regard fixe Christine avec insistance. L’homme qu’elle a rejeté plus tôt dans la soirée. Le riche au costume bordeaux, l’éconduit humilié. Il ne danse pas. Il ne parle à personne. Il observe.

Son visage ne trahit rien au début. Juste une immobilité glaciale. Puis, peu à peu, son expression se transforme. La surprise laisse place à une colère sourde, maîtrisée. Sa mâchoire se contracte. Ses narines frémissent.

Il pose brutalement son verre vide sur une table voisine, les doigts crispés, avant de glisser la main dans la poche intérieure de sa veste.

Ce qu’il en sort est presque invisible : une petite fiole . Minuscule. Elle contient un liquide transparent, sans odeur, sans couleur.

L’homme avance. À pas lents. Silencieux. Précis. Il traverse la salle, dissimulé par l’agitation des danseurs, les éclats de rires, les lumières mouvantes. Il ne quitte pas Christine des yeux.

Lorsqu’il passe près de sa table, il marque une pause imperceptible.

D’un geste rapide, assuré, il verse quelques gouttes dans le verre doré laissé sans surveillance.

Puis il recule. Un pas après l’autre. Toujours sans la lâcher du regard.

Un sourire tordu étire ses lèvres.

— Tu fais la maligne, hein ? Je t’observe… on verra bien comment tu réagis dans quelques minutes, marmonne-t-il entre ses dents, pour lui seul.

Et dans un mouvement fluide, il disparaît dans la foule. Invisible. Insoupçonnable. Mais le piège, lui, est déjà en place.

LE POINT DE VUE DE CHRISTINE 

Sur la piste, je termine une pirouette, haletante, les yeux brillants. Mon cavalier me fixe , comme si je venais de lui retourner l’âme.

— T’as un nom, ou je t’appelle "le meilleur danseur de la soirée" ? je lui demande avec un sourire amusé.

Il ouvre la bouche pour répondre…

Mais à cet instant, plus rien n’existe. Mon cœur bat à tout rompre. L’adrénaline pulse dans mes veines comme un incendie. Nos regards se croisent encore une fois. Et dans un élan aussi brutal qu’instinctif, je le fais.

Je l’embrasse.

Pas un baiser furtif. Pas une esquisse timide. Un vrai baiser. Sûr. Brûlant. Souverain.

— Une récompense pour ta prestation ce soir, je murmure contre ses lèvres, mes yeux plantés dans les siens, un sourire audacieux suspendu à ma bouche.

Autour de nous, c’est l’électrochoc.

Des exclamations. Des chuchotements. Des regards en feu. On nous désigne. On nous commente. On nous envie. On nous juge. Mais rien n’importe.

Lui et moi, à cet instant, formons une image que personne n’oubliera : moi, fière et magnétique. Lui, troublant et mystérieux.

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