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 LA LUMIÈRE ENTRE TES MAINS
LA LUMIÈRE ENTRE TES MAINS
Author: Déesse

Chapitre 1 – Entre Tes Mains, la Lumière

Author: Déesse
last update Huling Na-update: 2025-09-12 04:54:56

Ariane

Le vent d’été soulève les rideaux blancs de mon cabinet, projetant une lumière vacillante sur les murs. Assise face à une femme aux traits tirés, je pose mes mains sur les siennes. Son souffle est court, ses doigts glacés. Je ressens immédiatement la douleur qui pulse en elle, une ombre grise qui ronge son énergie vitale.

Je ferme les yeux.

Le flot m’envahit, ce courant invisible qui vibre en moi depuis toujours. Ce don, cette malédiction. Mon corps se tend, mon esprit s’ouvre. Je perçois la faiblesse dans ses cellules, la souffrance incrustée dans ses os. Avec une précision instinctive, je guide l’énergie, la répare, la replace.

Un frisson secoue la femme. Elle halète, son dos se cambre légèrement. Puis elle s’effondre, vidée, son souffle redevenu fluide.

— Ça ira, murmuré-je.

Elle ouvre les yeux, embués de larmes. Ses lèvres tremblent, cherchant les mots. Je me contente d’un sourire. Elle ne comprendra pas ce qui vient de se passer, pas vraiment. Peu importe. Elle se lève, encore vacillante, puis sort en chuchotant un merci.

Dès que la porte se referme, je me laisse tomber sur ma chaise. Mon corps me trahit. Mes muscles brûlent, une fatigue sourde m’écrase. Chaque guérison m’arrache un peu plus de force.

Un coup frappé à la porte me fait sursauter.

— Entrez.

Un homme passe le seuil. Grand, chemise impeccablement repassée, regard perçant. Ilan. Médecin, cartésien, l’exact opposé de tout ce que je suis.

— Tu es pâle, constate-t-il en posant un regard inquiet sur moi.

— Un peu fatiguée.

Il s’approche, sort son stéthoscope comme s’il pouvait analyser ce qui cloche en moi. Il veut comprendre. Toujours. Mais il ne le pourra jamais.

— Tu devrais arrêter, Ariane. Tu ne peux pas continuer comme ça.

— Et laisser ces gens souffrir ?

Il serre les mâchoires. Nous avons eu cette discussion mille fois. Je sais ce qu’il va dire. Je devrais consulter, faire des tests, voir ce que la science peut expliquer. Mais la science n’explique pas ce que je fais.

— Justement, dit-il. Ce n’est pas normal.

— Je sais.

Ma voix est douce, mais inflexible. Je ne changerai pas. Il soupire, passe une main dans ses cheveux. Son téléphone vibre, un appel de l’hôpital. Il doit partir, mais avant de franchir la porte, il pose une main brève sur la mienne.

— Prends soin de toi, Ariane.

Il s’éloigne, me laissant avec ce vide étrange qu’il provoque toujours en moi.

Je reste un instant immobile, à fixer mes doigts tremblants. Puis un second coup résonne à la porte.

— C’est fermé pour aujourd’hui, lancé-je.

— Dommage.

Cette voix.

Un frisson me traverse alors que je me lève lentement. Je reconnaîtrais cette intonation entre mille. Grave, légèrement rauque, un murmure qui effleure la peau comme une caresse dangereuse.

Rafael.

Je me fige.

Il est là, appuyé contre le cadre de la porte, un sourire en coin, les yeux sombres et brûlants posés sur moi. Il n’a pas changé. Toujours cette allure de fauve, ce charme troublant qui éveille quelque chose d’oublié en moi.

— Qu’est-ce que tu fais ici ? soufflé-je.

— Te voir.

Deux mots, et le passé me heurte de plein fouet.

Je devrais lui dire de partir. Je devrais lui claquer la porte au nez.

Mais je ne bouge pas.

Et il entre.

Ariane

Rafael traverse la pièce comme s’il était chez lui. Il s’arrête à quelques pas de moi, et l’air semble se charger d’une tension électrique. Son regard m’effleure, me jauge, s’accroche aux moindres détails.

— Toujours aussi têtue, murmure-t-il.

Je croise les bras pour cacher le tremblement imperceptible de mes doigts. Rafael n’a jamais eu besoin de crier pour imposer sa présence. Son silence est une arme plus tranchante que les mots.

— Ce n’est pas une visite de courtoisie, dis-je en haussant le menton. Pourquoi es-tu là ?

Un sourire fugace étire ses lèvres, sans atteindre ses yeux.

— Je voulais savoir si tu allais survivre à ton héroïsme.

— Je vais bien.

— Mens-moi encore, et je pourrais presque te croire.

Mon cœur rate un battement. Rafael ne pose jamais de questions inutiles. Il voit au-delà des apparences, il perçoit les failles que je m’efforce de masquer. Son regard dérive vers mes mains.

— Combien de fois aujourd’hui ?

— Assez.

Il serre les mâchoires. Un muscle tressaute sur sa joue.

— Jusqu’à ce que tu t’écroules, c’est ça ?

— Ce n’est pas ton problème.

— Ce l’est.

Sa voix est basse, mais tranchante. Il fait un pas vers moi, réduit l’espace qui nous sépare. Je refuse de reculer, même si mon corps entier est tendu sous son regard.

— Tu n’as jamais su t’arrêter, Ariane. Tu donnes, encore et encore, jusqu’à ne plus rien avoir pour toi.

Je ferme les yeux une fraction de seconde.

— Tu es venu pour me faire la morale ?

— Non.

Un silence s’étire. Rafael n’est pas du genre à parler sans raison. S’il est là, c’est qu’il veut quelque chose.

— Dis-moi la vérité, Rafael. Pourquoi maintenant ?

Il détourne brièvement le regard. C’est infime, presque imperceptible, mais je le vois. L’ombre qui passe dans ses yeux.

— Parce que je sens que tu es en danger.

Je fronce les sourcils.

— De quoi tu parles ?

— Ce pouvoir, Ariane. Ce n’est pas seulement un don. C’est un fardeau. Et tu n’as aucune idée de ce que tu attires.

Un frisson glacé parcourt ma peau. Il a toujours parlé ainsi. Comme s’il en savait plus que moi. Comme si ce que je faisais avait des conséquences que je ne pouvais pas comprendre.

— Tu m’as déjà dit ça, murmuré-je. Et tu es parti.

Rafael esquisse un sourire triste.

— J’ai fait ce qu’il fallait.

— Et maintenant, tu reviens ?

— Parce que cette fois, je ne peux pas te laisser seule.

Mon souffle se bloque.

Il n’a jamais été du genre à promettre quoi que ce soit. Rafael est une ombre insaisissable, un orage qui traverse une vie avant de disparaître.

— Tu ne peux pas juste revenir comme ça, dis-je d’une voix trop basse.

— Pourtant, je suis là.

Ses doigts frôlent mon poignet. Ce simple contact enflamme l’espace entre nous. Trop proche, trop intense.

Je recule brusquement.

— Pars.

Il me fixe longuement. Puis un léger sourire effleure ses lèvres.

— Pas cette fois.

Il tourne les talons et s’éloigne. Mais au moment de franchir la porte, il s’arrête et murmure sans se retourner :

— Ne me ferme pas la porte, Ariane. Pas encore.

Et il disparaît dans la nuit.

Je reste là, le souffle court, le cœur battant à un rythme incontrôlable.

Il est revenu.

Et je ne sais pas si je dois en être soulagée… ou terrifiée.

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