Compartir

Le Commencement

Autor: Seth
last update Última actualización: 2025-11-13 00:02:08

Ils n’avaient pas eu le temps d’aller bien loin.

À peine Jacques et Jenevieve avaient-ils franchi le dernier arbre que le sol trembla de nouveau.

Une brume épaisse, lourde et glaciale, se leva tout autour d’eux. Elle sentait le soufre et les feuilles brûlées.

Jenevieve serra la main de Jacques.

— Ne t’arrête pas, Jacques ! cours !

Mais un rire éclata derrière eux. Lent. Sourd. Moqueur.

La brume s’écarta, et Grec apparut.

Il se tenait droit, son manteau noir flottant comme s’il respirait. Ses yeux verts brillaient dans l’ombre, et sa voix semblait venir de partout à la fois.

— Vous pensiez vraiment pouvoir m’échapper ?

Il souriait, d’un sourire calme et cruel à la fois.

— Ce n’est que le commencement. Et regardez-vous… tremblants, perdus… Vous croyez connaître la peur ? Vous ne l’avez même pas encore rencontrée.

Jacques voulut répondre, mais sa gorge était nouée. C’est Michael, le plus courageux du groupe, qui s’avança d’un pas.

Ses yeux brillaient de colère et de larmes.

— Commencement ou pas, quatre d’entre nous sont morts à cause de toi ! hurla-t-il.

— Morts ? répéta Grec, haussant un sourcil.

Un silence étrange s’abattit sur la forêt.

Puis, lentement, il plongea la main dans un petit sac de cuir suspendu à sa ceinture. Il en sortit une poudre dorée, qu’il fit tournoyer entre ses doigts.

— Les morts, dit-il d’une voix lente, ne sont morts que si on les abandonne à la terre.

Il jeta la poudre sur le sol, à l’endroit même où la cabane s’était effondrée.

Le vent se leva, tourbillonnant autour de lui.

La terre se fissura. Un éclat de lumière jaillit.

Et, sous les yeux horrifiés des enfants, les quatre corps disparus se relevèrent.

Les deux filles, puis les deux garçons.

Leurs yeux étaient d’abord vides, perdus, puis reprirent vie, comme s’ils sortaient d’un long rêve.

Ils toussaient, haletaient, tremblants.

Jenevieve recula, la main sur la bouche.

— Ce n’est pas possible…

Michael courut vers eux, mais Grec leva la main.

— Pas trop vite, jeune homme. Ils reviennent… différents.

Les enfants s’arrêtèrent.

Les quatre « revenus » se tenaient debout, immobiles. Leurs peaux étaient couvertes de fines marques noires, comme des racines sous la peau.

Leurs pupilles brillaient d’un éclat rougeâtre, presque imperceptible.

Jacques sentit un frisson lui parcourir l’échine.

— Qu’est-ce que tu leur as fait ?

Grec le regarda droit dans les yeux.

— Je les ai sauvés. Grâce à moi, ils ne connaîtront plus la peur ni la douleur. Ils seront vos gardiens.

— Nos gardiens ?! s’écria Jenevieve. Tu veux dire nos prisonniers !

Grec s’avança lentement, et la terre sembla se plier sous ses pas.

— Vous ne comprenez pas, murmura-t-il. Le monde change. Ce qui sommeillait depuis cinq siècles s’éveille à nouveau. Vous, les sept de Kofima, êtes le fil qui relie les vivants et les anciens.

Ses yeux brillèrent d’une lumière surnaturelle.

— Vous portez en vous le sceau de l’aube noire. Et cette fois, personne ne l’arrêtera.

Un vent froid balaya la clairière.

Les quatre enfants ressuscités se tournèrent lentement vers Jacques, Jenevieve et Michael.

Ils ne parlaient pas. Mais leurs regards suffisaient : quelque chose d’autre vivait en eux.

Grec leva la main vers le ciel, et une nuée d’oiseaux s’envola, effrayée.

— Le jeu ne fait que commencer, dit-il d’une voix solennelle.

Puis il disparut dans la brume, laissant derrière lui une odeur de cendre et un silence plus lourd que la mort.

Les sept amis restèrent figés, incapables de parler.

Leur cauchemar venait de commencer — et cette fois, ils ne savaient plus qui était vivant, qui était mort, ni qui les contrôlait vraiment.

Au lever du jour, une brume argentée enveloppait la clairière.

Les sept amis s’étaient réunis autour d’un feu étrange, bleu et silencieux.

Devant eux, Grec se tenait debout, vêtu d’une longue tunique couleur d’argile. Son visage semblait plus jeune qu’hier, comme si la nuit lui avait rendu des années.

Derrière lui, les quatre enfants qu’il avait « ramenés » gardaient le silence, leurs yeux à demi clos, leurs respirations calmes comme s’ils méditaient.

Jacques, méfiant, ne pouvait s’empêcher de fixer leurs bras : les marques noires gravées sous leur peau semblaient pulser doucement, comme un cœur vivant.

Grec leva une main pour apaiser le silence.

— Approchez, mes enfants. L’heure n’est plus à la peur. Vous devez maintenant savoir.

Ils s’assirent en cercle autour de lui.

Grec traça sur le sol un grand symbole avec de la cendre : trois cercles reliés par une croix.

— Voici le Sceau de Kofima, dit-il. Le signe de nos ancêtres, celui que vos pères portaient jadis pour combattre les sorciers du Nord.

Il les regarda un à un, et sa voix prit une gravité nouvelle :

— Vous pensez que je suis votre ennemi, mais j’ai été votre gardien depuis le jour de votre naissance.

Un murmure parcourut le groupe.

Jenevieve fronça les sourcils :

— Depuis notre naissance ?

Grec acquiesça.

— Oui. Quand vous étiez encore des nourrissons, entre zéro et six ans, les sorciers de la vallée ont tenté de vous tuer. Ils savaient qu’un jour, sept enfants naîtraient sous la même lune, porteurs de la lumière des anciens. Cette prophétie, ils la craignaient.

— Et… nos parents savaient ? demanda Michael.

— Certains, oui. D’autres l’ont oublié, parce que la peur efface les mémoires.

Le vieil homme fit un geste circulaire, et le feu changea de couleur : il devint rouge sang.

Des images apparurent dans les flammes — un champ de bataille, des silhouettes vêtues de pagnes sombres, des éclairs verts qui déchiraient le ciel.

— Il y a cinq siècles, la Guerre des Ombres a ravagé ce village, continua-t-il. Nos ancêtres ont affronté les sorciers avec le courage et la magie pure, celle qui vient du cœur et non du sang.

Cette guerre a duré un an. Beaucoup sont morts. Mais la puissance des anciens, unie à celle de vos mères, a réussi à enfermer la malédiction dans cette forêt.

Il se tourna vers Jacques, le regard perçant :

— C’est ici même que vous avez été cachés, toi et les autres, lorsque vous étiez encore dans les bras de vos mamans. Cette terre vous protège depuis toujours.

Le vent se leva légèrement, faisant danser les cendres.

Grec ferma les yeux un instant, puis reprit :

— Mais aujourd’hui, les sorciers reviennent. Leur puissance grandit. Ils veulent reprendre ce qui leur a été volé : le pouvoir du sang des sept.

C’est pourquoi je vous ai rappelés ici.

Il marqua une pause. Sa voix se fit plus dure, plus tranchante :

— Vous ne serez plus des enfants de Kofima. Vous serez ses gardiens, ses guerriers, ses chasseurs.

Vous allez apprendre la parole des anciens, la magie blanche, la force intérieure et le combat des esprits.

Jenevieve serra ses poings.

— Et si on refuse ? demanda-t-elle, défiant.

Grec la fixa, impassible.

— Refuser, c’est laisser le village brûler. C’est condamner vos parents à revivre ce que leurs ancêtres ont souffert.

Il tendit la main vers elle.

— Le choix n’est pas entre fuir et combattre. Le choix est entre mourir et protéger.

Un long silence s’installa.

Puis, lentement, Michael se leva.

— Alors apprends-nous, dit-il d’une voix ferme.

Les autres suivirent, un à un.

Grec hocha la tête, presque ému.

— Très bien. Aujourd’hui commence votre initiation. Mais souvenez-vous : la théorie précède la pratique.

Avant de manier la lumière, vous devez comprendre les ténèbres.

Il frappa le sol de son bâton, et un grondement profond secoua la terre.

Les arbres autour d’eux s’écartèrent comme s’ils obéissaient à une force invisible, dévoilant un sentier qu’ils n’avaient jamais vu.

Au bout, un grand portail de pierre se dressait, gravé de symboles anciens.

— Voici la Porte des Origines, dit Grec. Derrière elle se trouve tout ce que vous devez apprendre… et tout ce que vous devez craindre.

Continúa leyendo este libro gratis
Escanea el código para descargar la App

Último capítulo

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    Les Sept Lunes du Secret

    La porte secrète s’ouvrit dans un grondement sourd, comme si la montagne elle-même respirait.Une lumière bleutée glissa au sol, montant jusqu’au plafond. Jacques, Jenevieve et les cinq autres enfants restèrent immobiles, le souffle court.Grec entra le premier, appuyant son bâton contre la pierre.— Suivez-moi, ordonna-t-il d’une voix basse mais puissante.La salle, immense, circulaire, s’éclaira au fur et à mesure qu’ils avançaient.Sur les murs, sept symboles en forme de lune luisaient chacun d’une couleur différente : argent, bleu, rouge, vert, noir, or, violet.Une énergie vibrante parcourait l’air, comme si la salle elle-même était vivante.— Bienvenue dans la Chambre des Sept Lunes, dit Grec.Sa voix résonna dans toute la pièce.Les enfants se regroupèrent, fascinés.— Vous ne le savez peut-être pas encore… mais vous êtes les Sept Lunes du Secret.Les sept clés du bonheur…Et du malheur pour ceux qui cherchent la destruction.Un frisson parcourut le groupe.— Des tourbillons de

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    Le Cercle du Sang et de la Lumière

    La nuit était tombée.Le ciel, d’un rouge profond, semblait brûler à l’horizon.Une lune écarlate montait lentement, versant sa lumière sanglante sur la clairière.Les sept enfants étaient rassemblés autour du feu sacré.Grec traçait lentement un grand cercle sur le sol avec de la poudre argentée, puis y grava des symboles anciens que personne ne connaissait.Chaque mot qu’il murmurait faisait trembler l’air, comme si la forêt entière retenait son souffle.— Ce soir, dit-il, nous allons unir vos âmes. Le lien que vous formerez vous protégera les uns les autres… mais aussi vous exposera à ceux qui vous traquent.Il leva les yeux vers la lune rouge.— Car la magie attire la magie — la lumière appelle toujours l’ombre.Les enfants échangèrent un regard silencieux.Même Thomas, affaibli, tenait sa pierre noire entre les mains, concentré.— Asseyez-vous dans le cercle, ordonna Grec.Ils obéirent.Le feu s’éleva, et la poudre sur le sol s’illumina d’un éclat blanc argenté.Grec planta son b

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    Les Dons du Sang Ancien

    Le vent soufflait fort ce matin-là.La brume s’était levée sur la clairière, dévoilant un cercle de pierres anciennes dressées comme des gardiennes.Au centre, Grec se tenait, son bâton planté dans la terre. Les sept enfants se tenaient autour de lui, formant un cercle parfait.— Avant d’apprendre la magie, dit-il d’une voix grave, vous devez connaître ce que vous portez déjà en vous.Il leva le bâton.— Chacun de vous a un don, un pouvoir que vos ancêtres vous ont transmis à la naissance. Ces dons sommeillent, mais aujourd’hui, ils vont s’éveiller.Un silence solennel tomba. Le feu bleu brûlait sans fumée, et l’air vibrait d’une énergie invisible.Grec commença par Jacques.Il posa sa main sur son front.— Toi, fils du vent et du fer, tu portes le don de la vision.Une lumière dorée jaillit dans les yeux de Jacques, et il eut soudain des images — brèves, rapides : des villages en flammes, des ombres qui fuient, un grand serpent noir caché sous la terre.Il recula, essoufflé.— J’ai v

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    Le Commencement

    Ils n’avaient pas eu le temps d’aller bien loin.À peine Jacques et Jenevieve avaient-ils franchi le dernier arbre que le sol trembla de nouveau.Une brume épaisse, lourde et glaciale, se leva tout autour d’eux. Elle sentait le soufre et les feuilles brûlées.Jenevieve serra la main de Jacques.— Ne t’arrête pas, Jacques ! cours !Mais un rire éclata derrière eux. Lent. Sourd. Moqueur.La brume s’écarta, et Grec apparut.Il se tenait droit, son manteau noir flottant comme s’il respirait. Ses yeux verts brillaient dans l’ombre, et sa voix semblait venir de partout à la fois.— Vous pensiez vraiment pouvoir m’échapper ?Il souriait, d’un sourire calme et cruel à la fois.— Ce n’est que le commencement. Et regardez-vous… tremblants, perdus… Vous croyez connaître la peur ? Vous ne l’avez même pas encore rencontrée.Jacques voulut répondre, mais sa gorge était nouée. C’est Michael, le plus courageux du groupe, qui s’avança d’un pas.Ses yeux brillaient de colère et de larmes.— Commencemen

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    Le Retour des Loups

    La rumeur se répandit dans le village avant même que le soleil ne se couche.Les anciens s’étaient réunis sur la grande place, sous le grand fromager sacré.Les tambours s’étaient tus, les marchés fermés, et même les chiens ne criaient plus.Un silence lourd s’était abattu sur Kofima, comme si le vent lui-même retenait son souffle.Les sages parlaient à voix basse, les visages graves.Le plus vieux d’entre eux, Bassa, prit la parole d’une voix rauque :— Ce que nous voyons n’est pas nouveau. Il y a cinq cents ans, le même mal a traversé Kofima.— Le mal des loups ? demanda un autre.— Non… le mal derrière les loups, répondit Bassa. Celui qui prend la nuit en plein jour.Tous se turent. Dans leurs mémoires, un nom refaisait surface : Grec.Un ancien guerrier du village, disparu depuis des années, vivant désormais au fond de la forêt. On disait qu’il connaissait les secrets du feu, des plantes, et des esprits. Certains l’appelaient magicien. D’autres, anti-sorcier.Alors, sans perdre de

  • LES HÉRITIERS DU VENT ET DU FEU    L’Ombre à quatorze heures

    Le village de Kofima s’étendait paisiblement au pied des collines, avec ses maisons bien alignées, ses chemins de terre rouge et ses champs verdoyants. L’air y était doux, rempli du parfum des manguiers et du chant des oiseaux. C’était un de ces après-midis tranquilles où rien ne semblait pouvoir troubler la sérénité du lieu.Près du vieux ruisseau, sous un grand fromager, sept amis s’étaient retrouvés comme à leur habitude.Six garçons, inséparables depuis l’enfance, et une fille, Jenevieve, la seule à savoir calmer leurs querelles et à rire plus fort que tous les autres.Ils jouaient, riaient, parlaient de tout et de rien. Le soleil frappait doucement leurs visages, et l’eau du ruisseau scintillait comme un miroir d’argent.Mais soudain, sans prévenir, Jacques chancela.Il voulut faire un pas, mais ses jambes cédèrent. Il s’effondra lourdement, les yeux grands ouverts vers le ciel.— Jacques ! cria Jenevieve, se précipitant vers lui.Ses amis accoururent, paniqués.Et c’est à ce mom

Más capítulos
Explora y lee buenas novelas gratis
Acceso gratuito a una gran cantidad de buenas novelas en la app GoodNovel. Descarga los libros que te gusten y léelos donde y cuando quieras.
Lee libros gratis en la app
ESCANEA EL CÓDIGO PARA LEER EN LA APP
DMCA.com Protection Status