De retour chez moi, je n’avais pas encore repris mon souffle après les accusations de Dante. Mon cœur battait encore trop vite. Mes pensées tournaient en boucle. C’est là que mon téléphone a sonné.
— Bonjour, Mademoiselle Lila. Je suis le directeur des ressources humaines de Bregman & Co. Je vous appelle à propos de votre embauche prévue pour lundi.
Enfin une bonne nouvelle. Un souffle d’air au milieu du chaos.
— Bonjour, Monsieur. Je suis ravie de vous parler. Je suis prête à commencer.
Mais sa voix a changé. Plus froide. Plus dure.
— Nous avons décidé d’annuler votre embauche. Après vérification, nous avons relevé des incohérences dans votre dossier.
Je suis restée figée.
— Quoi ? Pardon ? Il doit y avoir une erreur…
— Vos diplômes ne correspondent pas. Nous avons contacté les écoles. Il semble que vous les ayez falsifiés. Une plainte figure aussi dans votre dossier universitaire. Renvoi pour comportement violent et immoral.
— C’est faux. Tout est faux. Je n’ai rien falsifié !
— L’information nous a été transmise par Monsieur Dante. C’est bien votre fiancé ?
Un frisson m’a glacée jusqu’aux os. Mes doigts se sont crispés sur le téléphone.
— Il a fait ça ? C’est lui qui vous a dit ça ?
— Nous ne pouvons pas poursuivre votre recrutement. Bonne chance.
La ligne a été coupée. Juste comme ça. Sans la moindre émotion. Comme si je n’étais qu’un dossier à effacer.
Je suis restée debout, le téléphone encore à l’oreille. Mes mains tremblaient. Mon cœur cognait dans ma poitrine. Il avait tout détruit. Mon travail, mon avenir, ma dignité. Dante avait tout effacé. Comme si je n’avais jamais existé.
J’ai couru chez mes parents. Ils comprendraient. Ils m’aideraient. Ils étaient ma dernière chance.
La porte était entrebâillée. L’air dans la maison était glacial. J’ai poussé doucement et je suis entrée.
Papa lisait le journal, comme si de rien n’était. Maman tenait une tasse de thé. Quand ils m’ont vue, leurs visages se sont figés.
— Papa ? Maman ? J’ai besoin de vous. S’il vous plaît…
Personne ne bougeait. J’ai avancé, le cœur serré.
— Ils ont détruit mon dossier. Je ne sais pas comment. Je n’ai rien fait. Vous devez me croire.
Ma mère a baissé les yeux. Mon père a refermé son journal d’un coup sec.
— Lila, tu sais que Dante peut tout faire. Il a du pouvoir.
— Et alors ? Vous êtes mes parents ! Vous devez me soutenir !
Son regard s’est assombri. Il s’est levé. Il ne m’a même pas regardée dans les yeux.
— Tu n’es plus notre fille. Tu es une honte. Une traînée. Je ne veux plus jamais te revoir ici.
— Non. Papa… dis pas ça. S’il te plaît…
Je me suis tournée vers ma mère, mais elle a reculé. Comme si je la dégoûtais.
Puis la voix de mon père a retenti, tranchante :
— Jetez-la dehors.
Deux domestiques m’ont attrapée par les bras. J’ai crié. Supplié. Mais ils m’ont poussée dehors. Comme une moins que rien. La porte s’est refermée avec violence.
La pluie m’a frappée en plein visage. Mes cheveux collaient à ma peau. J’étais trempée, glacée. Seule.
Je marchais sans but, les yeux embués. Et puis j’ai senti une main sur mon épaule.
— Lila Anderson, vous êtes en état d’arrestation pour tentative de meurtre.
Je me suis figée.
— Quoi ? Non… non, c’est une erreur ! Je n’ai rien fait !
Mais les menottes ont claqué sur mes poignets. Froides. Cruelles.
Je suis montée dans la voiture sans me débattre. Je n’avais plus la force. Plus rien n’avait de sens.
Le commissariat sentait la sueur et l’humidité. On m’a poussée dans une cellule sombre. Le sol était dur, glacial.
Et puis elles sont arrivées.
Des femmes. Trois, peut-être quatre. Leurs regards me dévoraient. L’une a craché par terre.
— Alors, la bourgeoise ? On a tué quelqu’un et on pense que la prison, c’est un palace ?
Je ne comprenais pas. Je reculais, mais elles se sont rapprochées.
— Tu crois qu’on va t’accueillir gentiment ? Ici, t’es rien. Juste une autre salope.
Une gifle m’a renversée. Puis un coup dans le ventre. J’ai tenté de me protéger, mais elles me frappaient de tous les côtés. Les coups pleuvaient. J’entendais leurs rires. Je sentais leur haine.
— Tu crois qu’il va venir te chercher, ton petit prince ? Il t’a vendue. Il t’a abandonnée.
Chaque mot me faisait plus mal que les coups.
Je me suis repliée dans un coin. Je ne pleurais même plus. Je n’avais plus de larmes. Juste un vide immense en moi.
Elles revenaient chaque nuit. Me frapper. Me briser. Me salir.
Et un soir, l’une d’elles a murmuré à mon oreille :
— T’es juste un jouet. Un jouet que Dante a brisé.
C’est là que j’ai compris. Il m’avait détruite. J’étais seule. Vraiment seule.
Dante m’a poussée à l’intérieur de sa voiture comme une poupée désarticulée, sans me regarder, sans un mot. Il a claqué la porte avec force. J’ai sursauté, les larmes brûlant encore mes joues.Ses hommes se sont activés autour du véhicule comme des soldats en mission. Un claquement sec, puis sa voix, froide et autoritaire :— Retrouvez le taxi. Ramenez ses affaires.Il a murmuré quelque chose à l’un de ses hommes. Je n’ai pas entendu ce qu’il disait. Ce que je savais, en revanche, c’est que j’étais prise au piège. Encore une fois. Mais là… je n’avais plus la force pour me battre.Je me suis blottie contre la portière. Mes mains couvraient mon visage, mais elles tremblaient trop pour m’apporter le moindre réconfort.Et les larmes… elles coulaient toutes seules, incontrôlables.Je détestais pleurer devant lui. C’était une faiblesse qu’il adorait observer. Une chute silencieuse qu’il provoquait sans même lever la voix.— Conduis jusqu’au bar, ordonna-t-il au chauffeur, sans me jeter un s
— La fille que tu as connue… elle est morte.Un silence puis je continuai, plus bas :— Il ne reste plus rien à humilier, Dante. Tu peux me piétiner encore, ça changera quoi ? J’ai déjà tout perdu.Il resta figé devant moi. Le vent fit claquer sa veste ouverte.Je crus percevoir une hésitation dans son regard, mais elle fut vite balayée par cette flamme froide, celle qu’il allumait chaque fois qu’il voulait m’anéantir sans lever la main.— Tu m’en veux ? souffla-t-il. D’avoir fait ce que j’ai fait ?Je ne répondis pas. Pas tout de suite. Je savais où il voulait en venir.— D’avoir appelé la police, Lila ? D’avoir laissé les juges te condamner ?Ma gorge se serra. Mes mains tremblaient doucement contre mes hanches, mais je les plaquai contre ma robe pour les cacher.— Tu n’as fait que payer pour ce que tu avais fait. Rien de plus. Rien de moins.Il marqua une pause, me détailla, me scruta comme on inspecte les ruines après un incendie.— Si tu respires encore aujourd’hui… c’est unique
— Sortez, mademoiselle Anderson.Je sursautai.La voix tranchante venait de la droite, juste derrière la vitre.Mon regard se leva lentement… et mes entrailles se nouèrent.C’était Clarisse. La secrétaire personnelle de Dante. Robe noire stricte, chignon tiré à en faire mal, rouge à lèvres carmin impeccable. Chaque fois que je l’avais croisée dans les couloirs de la tour Withemore, elle me lançait ce même regard… Ce mélange de mépris élégant et de dégoût poli. Comme si ma simple existence salissait l’air qu’elle respirait.Et là, devant la vitre, elle m’observait comme une chose insignifiante. Son doigt parfaitement manucuré tapota contre le verre.— Allez. On ne va pas jouer à cache-cache. Sortez de là.Je secouai la tête, le cœur en feu. — Non… Je vous en prie… je ne veux pas...Ma voix s’étrangla, inaudible.Je me retournai vers le chauffeur. Je fouillai mon sac. Je rassemblai tous les billets que j’avais.— Je vous en supplie. Partez. Je vous donne tout. Je vous paierai plus, j
Il s’approchait de moi lentement. J’étais incapable de bouger. Sa silhouette me dominait, son regard me terrifiait. J’aurais voulu crier, fuir, disparaître mais à la place, j’ai fermé les yeux.Une seconde. Deux. Je me suis préparée au pire et puis… j’avais l’impression de retrouver le Dante qui me fascinait. Je me revoyais folle amoureuse de lui ... comme si ces trois années n’ont pas existé ... Je crus qu’il allait m’embrasser.Et puis…— T’es vraiment pathétique.J’ai rouvert les yeux. Il me regardait comme une ordure qu’on trouve collée sous sa semelle.— Tu croyais quoi, Lila ? Que j’allais t’embrasser ? Il ricana. Un rire froid, cruel, tranchant. — Tu me dégoûtes.Mes jambes ont failli me lâcher.— Tu crois que je vais poser mes lèvres sur une fille que le premier venu reluque comme une serveuse de bar à strip-tease ? Tu crois que j’ai envie de toi après ce que t’as fait ?Il s’approcha encore, tout près, si près que je sentais son souffle contre mon front.— T’es sale, Lila.
Ce n’était plus une simple humiliation. Un courant électrique, insidieux. Je ne savais pas ce que c’était mais mon corps, lui, avait compris.— Tu parles sérieusement ? lança Jason, le sourcil levé. C’est juste une femme, Dante. Une femme qui travaille ici. Depuis quand tu t’énerves pour si peu ?“Juste une femme.” Je mordis l’intérieur de ma joue pour ne pas flancher.Dante se tourna et croisa son regard.— Tu ne comprends pas. Reste en dehors de ça, dit-il d’une voix grave.Jason haussa les épaules, toujours intrigué.— Attends… tu ne me la présentes même pas, et maintenant tu me l’arraches comme si elle t’appartenait ? Comment elle s’appelle, au juste ?Mon cœur se serra. Je voulais disparaître, devenir invisible.— Lila Anderson, répondit Dante, les dents serrées.Jason cligna des yeux, interloqué. Puis l’homme de l’escalier me regarda autrement, avec plus d’attention.— Anderson ? Lila ?Ses yeux descendirent lentement sur moi.Comme s’il cherchait à voir quelque chose que les au
bouffon.Puis, il parla d’un ton sec. Un ton qui ne laissait aucune place à l’humanité.— Embrasse le garde à l’entrée.Je crus mal entendre.— Quoi… ? soufflai-je, la gorge nouée.— Tu m’as supplié, Lila. Très bien. Je t’accorde mon silence mais à une condition.Il se pencha légèrement, comme s’il voulait s’assurer que je comprenais bien :— Tu veux jouer à la soumise ? Montre-le-moi. Embrasse-le. Devant tout le monde.C’était trop.J’étais une femme de ménage, pas une poupée de foire.Mais à cet instant, je n’étais plus qu’un corps.Un corps que l’on déplace, qu’on utilise.Je me sentais comme une fille de spectacle, forcée de faire sa pirouette.Une humiliation publique, parfaitement orchestrée.Je secouai la tête, vacillante.— S’il te plaît… murmurai-je. Je ne peux pas…— Tu n’as rien à négocier, trancha-t-il. Absolument rien.Alors, j’avalai ma fierté. Encore.Je me levai, le souffle court.Et je fis ce que j’avais appris à faire depuis que j’étais en prison : OBÉIR.Je me dirig