Chapitre 5 : Le Jeu du Serpent
Awa
Je suis perdue. Complètement perdue.
C’est la seule pensée qui tourbillonne dans mon esprit depuis la confrontation entre Assane et Malik. Je n’arrive pas à saisir la réalité de ce qui s’est passé. Chaque mot échangé, chaque geste furtif semble avoir creusé un fossé infranchissable entre nous. Entre nous trois.
Il y a ce poids dans ma poitrine, un poids lourd et oppressant que je ne peux plus ignorer. Je n’ai pas l’habitude de fuir, mais aujourd’hui, je me sens comme une étrangère dans ma propre vie.
J’ai essayé de faire ce qui était juste, de choisir la voie qui me semblait la plus sûre, mais tout est devenu confus. Malik, Assane... L’un est mon mari, l’autre est mon frère. Et pourtant, la loyauté n’a jamais été une évidence pour moi. Les liens du sang, le mariage, ces choses qui, avant, semblaient être des fondations solides, ne sont plus que des illusions fragiles, prêtes à s’effondrer sous le poids de la vérité.
Le vent souffle à travers les rideaux ouverts, apportant avec lui l’odeur de la terre humide. J’ai l’impression que la maison devient de plus en plus petite, que l’air se raréfie.
Je sors sur le balcon, cherchant à fuir la claustrophobie de la pièce. Là, la nuit me semble plus réelle, plus tangible. L’obscurité qui m’entoure, en quelque sorte, me fait me sentir moins seule.
C’est là, dans l’immensité du ciel étoilé, que je trouve le courage de respirer à nouveau. Je ferme les yeux, laissant la fraîcheur de l’air nocturne calmer un peu le tourbillon qui fait rage en moi.
Mais à peine ai-je tourné la tête vers la rue que je le vois.
Malik.
Il est là, dans l’ombre, juste à l’angle de la maison. Je n’aurais pas dû être surprise, après tout, il sait où me trouver. Mais ce n’est pas la surprise qui me frappe, c’est l’inquiétude. Un sentiment de malaise grandissant me serre la gorge. Pourquoi est-il là à cette heure ? Que veut-il ?
Il me fixe, ses yeux perçants me transperçant même à cette distance. Son regard est calme, presque prédateur, et ça me fait frissonner. Il ne me dit rien, mais je sais ce qu’il veut. Ce n’est pas une simple rencontre. Ce n’est pas une simple visite. Il a un but, un but bien plus dangereux que ce que j’aurais pu imaginer.
Je devrais l’ignorer, rentrer à l’intérieur, et faire comme si de rien n’était. Mais mes jambes sont ancrées au sol. Quelque chose m’en empêche, une force invisible qui m’oblige à rester là, à le regarder dans les yeux.
— Awa.
Il murmure mon nom, et ça me fait frissonner. Pas parce que je l’ai entendu, mais parce que ce mot, prononcé par ses lèvres, porte une menace que je ne peux ignorer.
Je n’arrive pas à bouger.
— Tu n’as pas compris, n’est-ce pas ? Il s’avance lentement, chaque pas résonnant dans la nuit calme. Ce n’est pas à Assane que tu appartiens, Awa.
Je sens un frisson glacé parcourir mon échine. Il n’a pas dit ces mots comme une simple vérité. Non, il les a dit comme une menace. Comme un avertissement.
— Qu’est-ce que tu veux de moi, Malik ? Je n’arrive même pas à camoufler la peur qui se fait entendre dans ma voix.
Il sourit. Un sourire froid, cruel, qui ne fait qu’intensifier le malaise qui me dévore.
— Je veux ce qui me revient de droit, Awa. Il est tout près maintenant, assez pour que je sente la chaleur de son corps. Son souffle chaud se mêle au mien, et tout à coup, je me retrouve à bout de forces. Je veux toi.
Je veux crier, je veux fuir. Mais je ne peux pas. Mes jambes sont figées, mes pensées embrouillées. Pourquoi ai-je eu ce sentiment ? Pourquoi ai-je cette impression qu’il n’est plus seulement une menace, mais un piège dont il est impossible de sortir ?
— Ne fais pas ça, Malik. Je réussis à articuler. Mais ma voix tremble. Tu sais très bien que ce n’est pas ce que je veux.
— Ah, mais tu ne sais même plus ce que tu veux, Awa. Il se penche encore plus près, à tel point que je peux sentir l’odeur de sa peau, du parfum d’un homme qui n’a rien à perdre. Tu t’es déjà laissé séduire par l’idée de ce pouvoir, n’est-ce pas ?
Il est trop proche maintenant. Ses mains glissent sur mes bras, ses doigts effleurant ma peau. Une sensation étrange m’envahit, une sensation d’oppression et d’attraction. Tout en lui est sombre, dangereux, et pourtant... pourtant quelque chose en moi résiste à cette tentation.
Je recule d’un pas.
— Ne fais pas ça.
Mais il n’écoute pas. Il est déjà trop loin dans son jeu. Trop loin pour que je puisse l’arrêter.
— Tu veux encore croire que tu es la victime ? Il rit doucement, presque sinistrement. C’est toi qui as créé ce chaos. C’est toi qui as brisé tout ce que nous avions, Awa.
Je fronce les sourcils. C’est impossible. Il ment. Il doit mentir. C’est lui qui a manipulé tout cela, pas moi.
— Tu es responsable de tout ça, Malik. Je ne sais même pas si je crois moi-même ce que je viens de dire, mais j’essaie. Tu as voulu briser Assane et moi, tu as tout fait pour ça.
Il s’arrête. Son regard s’adoucit un instant, puis il éclate de rire. Un rire méprisant, presque violent.
— Ah, Awa. Il secoue la tête. Tu es vraiment naïve.
Et avant que je puisse réagir, il se détourne et disparaît dans l’obscurité de la nuit, comme une ombre qu’on ne peut jamais saisir.
Je reste là, figée, le cœur battant.
Il a gagné, et il le sait.
Je suis perdue.
CHAPITRE 126 — Retour à la lumière AWALe bunker se referme derrière nous dans un bruit sourd de métal froissé.Un son que je n’oublierai jamais.Je reste immobile un instant, le souffle court.Ce claquement résonne comme la fin d’un cauchemar… et le début d’autre chose.Je lève les yeux.Le ciel.Je n’arrive pas à y croire.Bleu, vaste, ouvert.Pas ces néons pâles qui faisaient semblant d’imiter le jour. Pas cette lumière artificielle et crue qu’on nous imposait.Non. Le vrai ciel.Je sens ma gorge se serrer.Je voudrais hurler, pleurer, courir, m’écrouler.Mais je reste droite.Je sens la main de Lorenzo glisser dans la mienne.Solide. Tremblante.— On est dehors, Awa. On est… vivants.Je le regarde.Ses traits sont tirés. Il a des cernes, des cicatrices. Mais il est là.Il est beau.Pas d’une beauté parfaite.D’une beauté qu’on forge dans le feu.Je pose ma main sur sa joue, doucement.— On est libres, murmuré-je. Vraiment libres ?Il ne répond pas.Il n’en a pas besoin.On marche
CHAPITRE 126 — Retour à la lumière AWALe bunker se referme derrière nous dans un bruit sourd de métal froissé.Un son que je n’oublierai jamais.Je reste immobile un instant, le souffle court.Ce claquement résonne comme la fin d’un cauchemar… et le début d’autre chose.Je lève les yeux.Le ciel.Je n’arrive pas à y croire.Bleu, vaste, ouvert.Pas ces néons pâles qui faisaient semblant d’imiter le jour. Pas cette lumière artificielle et crue qu’on nous imposait.Non. Le vrai ciel.Je sens ma gorge se serrer.Je voudrais hurler, pleurer, courir, m’écrouler.Mais je reste droite.Je sens la main de Lorenzo glisser dans la mienne.Solide. Tremblante.— On est dehors, Awa. On est… vivants.Je le regarde.Ses traits sont tirés. Il a des cernes, des cicatrices. Mais il est là.Il est beau.Pas d’une beauté parfaite.D’une beauté qu’on forge dans le feu.Je pose ma main sur sa joue, doucement.— On est libres, murmuré-je. Vraiment libres ?Il ne répond pas.Il n’en a pas besoin.On marche
CHAPITRE 125 – Ce qu’on ne recolle pas sans déchirerAWALe contact est passé.Mais ce n’est pas un passage. C’est une traversée.Quelque chose me coule dans le crâne. Une chaleur dense, visqueuse. Pas douloureuse. Pire : intime.Comme si une partie de moi me serrait enfin dans ses bras… en plantant lentement ses ongles sous ma peau.J’entends ma respiration.Mais ce n’est plus tout à fait la mienne.Un souffle plus ample, plus ancien.Comme si je respirais pour deux.Ou pour mille.Je tombe en arrière.Le choc contre le sol me réveille à moitié.Mes yeux papillonnent, lents.Le plafond tourne.Ou c’est moi.Des bruits reviennent.Pas ceux du bunker. — "Un sujet peut contenir plusieurs architectures de mémoire, mais l’intégration des schémas contradictoires crée des artefacts..."Des voix de laboratoire. Des murmures dans des masques. Du sang dans des tubes.Je les revois. Pas comme des souvenirs.Comme si je les vivais.Maintenant.Encore.Le présent se désolidarise.Je ne suis plus
CHAPITRE 124 — Ce qu’on a laissé trop longtemps dormir AWALe panneau de la capsule clignote. ACTIVATION EN COURSStabilisation génétique : 41%Éveil cognitif : IncompletLa température chute encore.Mais cette fois, le froid ne vient plus des murs.Il monte de l’intérieur.Un froid ancien, cellulaire.Comme si mon propre sang s’inversait.Je sens mes nerfs se tendre comme des câbles tirés à l’extrême.Ma peau devient une frontière.Entre ce que je suis… et ce que j’aurais pu être.Le silence devient dense.Presque vivant.Pas le silence de l’absence.Le silence d’une chose qui attend qu’on la regarde.Je braque mon arme.Pas par peur.Par nécessité.Je dois garder un point fixe.Quelque chose de simple. Un poids. Un centre.La vitre craque.Un bruit sec. Une ligne en zigzag.Un motif presque organique.Comme si le verre lui-même cherchait à respirer.Derrière : elle.Ma silhouette.Mon corps.Mais plus jeune.Plus calme.Trop calme.Ses yeux sont ouverts.Mais ce n’est pas une cons
CHAPITRE 123 — Ce qu’on ne veut pas retrouverAWALe sas se referme dans un souffle métallique.Un son trop lent pour être mécanique.Trop lourd pour n’être que technique.Comme un soupir étouffé.Devant moi : un tunnel de métal ancien.Murs rongés. Odeur de condensation stagnante.Un cliquetis diffus, régulier, pulse quelque part dans les entrailles du bunker.Ni horloge, ni machine.Un rythme sans nom. Organique.Je sors une lampe thermique.L’écran s’allume d’un bleu pâle.Les murs sont froids.Mais au sol…Des zones récentes.Des résidus de chaleur humaine, pâles et dispersés.Des empreintes dans le silence.Pas les nôtres.Je me retourne.Lorenzo tient debout. À peine.Son souffle est court.Une goutte de sueur file entre ses sourcils.Sa main crispée sur la canne. L’autre main tremble.Je murmure :— Tu peux encore reculer.Il me regarde, les pupilles noircies par la douleur.Mais sa voix reste calme :— Tu savais très bien que je ne reculerais pas.Je hoche la tête.Pas parce q
CHAPITRE 122— Ce qu’on ne veut pas retrouver---AWALe sas se referme dans un souffle métallique.Pas de lumière.Juste un cliquetis diffus, quelque part dans les entrailles du bunker.Je sors une lampe thermique.Les murs sont froids.Mais au sol, des zones récentes.Des empreintes humaines.Pas les nôtres.Je me retourne vers Lorenzo.Il se tient debout. Juste.Son souffle est court. Sa main crispée sur la canne.— Tu peux encore reculer, murmuré-je.Il secoue la tête.— Tu savais très bien que je ne reculerais pas.Je hoche la tête.Et j’ouvre la première porte.---SECTEUR A — OBSERVATIONDes vitres blindées, craquelées par le temps.Derrière, des cellules.Certaines contiennent encore des silhouettes…Pas humaines.Pas tout à fait mortes non plus.Je coupe l’alimentation de sécurité.Un verrou cède dans un claquement sec.Nous entrons.Des dossiers traînent au sol.Des photos imprimées.Des visages.Certains flous, masqués par des codes-barres.D’autres reconnaissables.Je m’age