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Chapitre 4: L'étau se resserre

Author: Clara Wynter
last update Last Updated: 2025-07-23 23:32:42

Le silence pesait lourd dans l’appartement modeste que Livia occupait depuis son arrivée à Paris. Les murs blancs semblaient se refermer sur elle alors que ses yeux étaient rivés sur l’écran lumineux de son téléphone. Un nouveau message venait d’apparaître, aussi glaçant que les deux précédents.

“Quitte cet endroit tant qu’il en est encore temps.”

Elle relut la phrase encore et encore, ses doigts crispés sur l’appareil. Son cœur accélérait, ses pensées s’emballaient. Qui pouvait bien lui envoyer ça ? Et pourquoi ? Une part d’elle voulait en parler, chercher de l’aide, mais à qui ? Certainement pas à Raphaël. Leur relation professionnelle, déjà teintée de tensions étranges, ne permettait pas ce genre de confidence.

Depuis la fameuse soirée où elle l’avait sauvé d’un scandale médiatique, Raphaël avait changé d’attitude. Il était devenu encore plus distant, ses rares paroles froides comme l’acier. Tu dois rester concentrée, se dit-elle. Ce n’est qu’une tentative pour te déstabiliser. Elle rangea son téléphone dans son sac et fit quelques pas pour évacuer la peur qui lui nouait l’estomac.

Le lendemain matin, en franchissant la porte de Valcourt Industries, Livia sentit immédiatement une tension dans l’air. Les conversations se taisaient lorsqu’elle passait, et certains employés détournaient le regard. Céline, impeccable dans un tailleur gris perle, la suivit du regard avec un sourire en coin qui n’avait rien d’amical.

— Moreau, dans mon bureau, maintenant, ordonna Céline d’un ton qui ne laissait aucune place à la discussion.

Livia la suivit, ses talons claquant légèrement sur le sol, le cœur battant plus fort à chaque pas. Céline referma la porte derrière elles et se posta devant elle, un dossier épais à la main.

— Monsieur Valcourt souhaite que vous révisiez ce dossier confidentiel. Vous devez le relire, corriger les éventuelles erreurs et le déposer sur son bureau avant midi. C’est clair ?

— Oui, répondit Livia d’une voix qu’elle tenta de rendre assurée.

— Bien, dit Céline avec un sourire énigmatique. Ne vous trompez pas.

Installée à son bureau, Livia se plongea dans la tâche. Elle vérifia chaque ligne avec soin, corrigea des coquilles mineures, s’assura que la mise en page était parfaite. Lorsqu’elle leva les yeux, il était déjà midi moins dix. Elle se précipita vers le bureau de Raphaël, le dossier serré contre elle.

— Entrez, lança Raphaël d’une voix grave dès qu’elle toqua.

Elle obéit et referma la porte derrière elle. L’atmosphère dans la pièce était plus lourde qu’à l’accoutumée. Raphaël, assis derrière son bureau, tenait le dossier entre ses mains. Ses yeux sombres se posèrent sur elle, froids et perçants.

— Savez-vous ce qu’il y avait dans ce document ?

— Oui, monsieur. J’ai vérifié chaque ligne avec soin.

Un silence pesant suivit ses mots.

— Votre “soin” ?

Il jeta le dossier sur la table. Les pages se dispersèrent sur le bois vernis, certaines annotées de corrections qui n’étaient pas de Livia.

— Certaines informations sont fausses, lâcha-t-il d’une voix glaciale. Savez-vous qu’une seule erreur aurait pu coûter plusieurs millions à cette entreprise ?

Livia blêmit, secoua la tête, la gorge nouée.

— Je… je n’ai rien changé à part quelques fautes mineures. Je vous le jure.

— Alors vous êtes soit naïve, soit stupide, répliqua Raphaël en se levant brusquement, sa haute silhouette projetant une ombre sur elle. Mais…

Il s’interrompit, ses yeux sombres la détaillant avec une intensité troublante.

— Mais je n’arrive pas à vous détester.

Ces mots, bien qu’emplis de reproche, la frappèrent comme une onde de chaleur. Elle baissa les yeux pour cacher le désordre dans son cœur.

— Sortez, Moreau. Et soyez plus vigilante à l’avenir.

Livia quitta la pièce à pas rapides, tremblante. Dans le couloir, elle s’adossa contre un mur, tentant de reprendre son souffle. Quelqu’un m’a piégée. Le sourire de Céline, plus tôt, lui revint en mémoire. Cette femme avait été trop prompte à lui confier ce dossier.

Plus tard dans la journée, en passant devant le bureau de Raphaël, elle s’arrêta net. La porte n’était pas complètement fermée. La voix basse et grave de Raphaël s’échappait de l’entrebâillement.

— Non. Pas encore. Elle ne doit jamais apprendre la vérité.

Livia sentit son cœur se serrer. De quelle vérité parle-t-il ?

Elle recula lentement, le souffle court, priant pour que le parquet ne trahisse pas sa présence. Une chose était certaine : Raphaël cachait bien plus qu’elle ne l’avait imaginé.

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