Home / Romance / Les clauses du cœur / Chapitre 1 — L’offre

Share

Les clauses du cœur
Les clauses du cœur
Author: Darkness

Chapitre 1 — L’offre

Author: Darkness
last update Last Updated: 2025-07-13 21:00:16

Fleure

Je n’avais jamais mis les pieds dans un endroit aussi… silencieusement riche.

Le genre de silence qui coûte cher. Où chaque pas sur le marbre résonne comme une faute. Où les murs sentent la vieille puissance, le cuir trop poli et les contrats signés dans des verres de whisky à mille euros. Ici, chaque détail crie la supériorité silencieuse de ceux qui n’ont jamais eu à compter.

Et moi, au milieu de tout ça, avec mon sac élimé, mes escarpins usés et ma jupe noire que je repasse chaque matin pour masquer la fatigue du tissu… je détonne.

Je serre les lanières de mon sac entre mes doigts, comme si elles pouvaient m’ancrer à quelque chose. Quelque chose de réel. Quelque chose de stable.

Mais rien n’est stable, plus rien ne l’a jamais été depuis six mois.

Depuis que mon client principal m’a lâchée sans préavis. Depuis que mon compte bancaire ne fait que saigner. Depuis que mon projet de centre culturel mon rêve a été refusé, faute de fonds.

Je suis brillante, on me l’a toujours dit , créative , visionnaire. Mais être une architecte talentueuse ne paie pas les loyers en ville quand on est seule, jeune, et sans appuis familiaux.

Et aujourd’hui, je suis là, parce qu’un inconnu m’a convoquée. Un homme trop riche pour avoir besoin d’expliquer quoi que ce soit. Un homme que je n’ai vu qu’en photo, dans des magazines où l’on parle plus de ses conquêtes que de ses projets : Aaron Valesco.

L’ascenseur m’a déposée au dernier étage. Directement dans le bureau. Pas de secrétaire. Pas de couloir. Juste une pièce immense, vitrée, où la lumière caresse les murs d’acier et de verre, et lui.

Il est assis, seul. Derrière un bureau noir comme une sentence. Imposant. Immobile.

Il lève à peine les yeux. Mais ce bref regard, ce minuscule mouvement de paupière, me fauche net. Comme s’il m’avait analysée en un clin d’œil. Déshabillée. Classée. Étiquetée.

Froid , précis , méthodique.

— Fleure Monet, dit-il. Asseyez-vous.

Sa voix est calme. Trop calme. Elle glisse sur la peau comme un gant de velours sur une lame.

J’avale ma salive. Il ne me tend pas la main. Il ne sourit pas. Il ne se lève pas. Et pourtant, tout en lui hurle le contrôle. L’arrogance tranquille de ceux qui n’ont jamais perdu.

Je m’assois lentement. Ma robe tombe souplement sur mes cuisses. Je sens ses yeux s’y attarder, l’espace d’un souffle. Puis revenir à mon visage. À mes lèvres. À mes yeux.

Je sais ce que je dégage. Je l’ai toujours su.

J’ai hérité des courbes pleines de ma mère, des pommettes hautes et d’un teint doré qui attire les regards. De longs cheveux châtains, presque auburn, que je laisse toujours attachés dans un chignon désordonné quand je travaille, mais qui me tombent en cascade quand je les relâche. Mes yeux sont d’un vert étrange, profond, que certains appellent envoûtant mais qui ne m’ont jamais permis d’éviter le découvert bancaire.

Ma beauté m’a souvent valu des propositions… déplacées. Des clients trop sûrs d’eux. Des regards insistants. Mais jamais… rien comme ça.

— Vous savez pourquoi je vous ai convoquée ? demande-t-il.

— Honnêtement ? Non. Je pensais que c’était une erreur.

— Ce n’en est pas une.

Il fait glisser une chemise cartonnée vers moi. Un mouvement précis, sans fioriture. À l’intérieur : une liasse de feuilles épaisses, numérotées, tamponnées. Je reconnais mon nom. Et ce mot :

Contrat de mariage .

— Qu’est-ce que c’est que ça ? je souffle.

— Une proposition , de mariage.

Je le fixe, abasourdie. Un instant, je m’attends à ce qu’il sourie, me tende un verre et me dise que c’est une caméra cachée. Mais rien. Pas un sourire. Pas une lueur d’ironie. Il est grave. Sérieux. Glacial.

— Vous êtes malade ? je murmure.

— Non. Je suis pragmatique.

Il se lève enfin.

Et soudain, il devient… immense.

Un mètre quatre-vingt-dix de muscles tendus sous un costume gris anthracite taillé à la perfection. Une mâchoire ciselée. Une bouche ferme. Et ce regard… noir, presque insondable. Comme une tempête contenue.

Il dégage quelque chose de puissant. De dangereux. Un magnétisme brut.

Il contourne le bureau, s’approche. Chaque pas semble faire vibrer le sol sous mes pieds.

— J’ai besoin d’être marié avant le 10 mars, dit-il. Il me reste exactement trente jours.

Je déglutis.

— Et vous vous êtes dit que j’étais… quoi ? La candidate idéale pour ce cirque ?

— Votre nom est propre. Votre situation financière, précaire. Votre carrière mérite une chance. Et surtout : vous êtes discrète. Ce qui est exactement ce qu’il me faut.

Il me tend une feuille.

Je la prends. Mes doigts tremblent à peine.

— Un an de mariage, dit-il. Pas de contacts physiques. Pas de sentiments. Clause de confidentialité absolue. En échange : vos dettes effacées, votre projet financé. Et un bonus de 3000 000 euros à la séparation.

Je n’arrive pas à parler. Mon cœur bat trop fort. Mes pensées se bousculent. L’appartement en retard de loyer. Le crédit que la banque m’a refusé. Le regard de mon père quand je lui ai dit que je n’avais plus rien.

Et cet homme, là, qui m’offre tout… dans un piège doré.

Il baisse la voix. Elle devient presque intime.

— C’est un contrat, Fleure. Pas un conte de fées.

Mais dans la façon dont ses yeux me regardent, dont ses lèvres se crispent à peine comme s’il retenait quelque chose, je sais qu’il ment.

Ce n’est pas juste un contrat.

C’est une partie d’échecs où je suis à la fois la reine… et la proie.

Et il vient de jouer son premier coup.

Continue to read this book for free
Scan code to download App

Latest chapter

  • Les clauses du cœur    Chapitre 5 — Les murs se referment

    FleureLe matin commence par un silence inhabituel.Pas celui que l’on choisit, celui qui apaise.Non. Celui qui précède une tempête.Je suis arrivée tôt au bureau. J’ai enchaîné deux cafés, relu mes notes pour la réunion avec les investisseurs de jeudi. Tout pour me donner l’illusion que je maîtrise encore quelque chose.Mais à 9h02, mon téléphone sonne.Numéro inconnu.Je décroche, méfiante.— Mademoiselle Monet ? Ici la Banque Castéra. Nous vous appelons au sujet de votre ligne de crédit professionnelle. Une régularisation immédiate est désormais exigée.Je me fige.— Pardon ? J’ai un échéancier validé avec votre service, nous avons encore .— L’échéancier a été suspendu, Madame. L’évaluation interne a révélé un risque aggravé. Vous disposez de quarante-huit heures pour effectuer le paiement. Après quoi, la dette passera au contentieux.Un blanc. Le monde s’étrangle autour de moi.— Mais… ce n’est pas ce qui était prévu.— Les conditions ont changé. Merci de votre compréhension.Bi

  • Les clauses du cœur    Chapitre 4 — Là où rien ne comble le vide

    AaronJe suis déjà au bureau avant le lever du soleil.La ville est encore endormie, prise dans ce demi-silence qui précède la guerre. Les premiers mails affluent, mais je les laisse en suspens. Ce matin, rien d’ordinaire ne mérite mon attention.Aujourd’hui, je tire le premier fil.Je fixe l’écran, la lumière bleutée baignant mon visage de sa lueur artificielle. La silhouette de Fleure apparaît, capturée dans un cliché de surveillance, pris en sortant de mes locaux . Elle marche vite. Le dos droit. Les poings fermés.Fuir. Toujours fuir.Mais moi, je ne cours jamais après personne.Je tends des pièges. Je les observe tomber dedans.Je compose un numéro. Il ne sonne qu’une fois.— Monsieur Valesco.— Elle a une dette chez vous, je crois.— Fleure Monet ? Oui. Dossier en cours de recouvrement. Les pénalités ont commencé à s’accumuler. Vous voulez que ...— Je veux que vous durcissiez les conditions. Discrètement. Qu’on la rappelle aujourd’hui. Qu’on mette la pression. Mais sans mention

  • Les clauses du cœur    Chapitre 3 — L’échéance

    FleureJe n’ai presque pas dormi de la nuit.J’ai tourné, viré, compté les heures comme on compte des bombes prêtes à exploser. Le visage d’Aaron Valesco hante chaque recoin de mon esprit, son regard, sa voix, ses mots, tout ce qu’il promet… et tout ce qu’il sous-entend.Je croyais avoir vu le pire.Mais le pire, ce n’est pas un contrat tordu. Le pire, c’est ce matin.La lettre m’attend sur mon bureau.Simple. Blanche. Impeccable.Le genre d’enveloppe qui ne porte jamais de bonnes nouvelles.Je reconnais le logo de la banque. Mon cœur se contracte avant même que je l’ouvre. Mais je le fais. Lentement. Comme si j’ouvrais une blessure que je connais déjà trop bien. Madame Monet,Suite à nos multiples relances restées sans réponse, nous vous informons que la période de tolérance concernant les échéances de remboursement est désormais échue.À défaut de régularisation sous sept jours, la banque engagera une procédure de saisie de vos actifs professionnels.Je reste figée.Sept jours.Une

  • Les clauses du cœur    Chapitre 2 — Une semaine

    Fleure— Vous vous fichez de moi ?Je ne crie pas. Pas encore. Mais ma voix tremble, plus forte qu’elle ne devrait, déchirant le silence glacé du bureau.Je me redresse d’un coup, mes doigts serrent le bord du contrat comme un fragment de bois flotté auquel me raccrocher. Mes yeux brûlent les siens, défiants, sauvages. Aaron Valesco reste immobile, impassible, comme s’il savait tout, comme s’il avait prévu ce moment où je m’insurgerais, où mon orgueil refuserait de céder.— Sérieusement ? Vous m’avez convoquée ici, dans votre… tour d’ivoire glaciale, pour me proposer un mariage commercial ? Comme si j’étais un simple nom à remplir dans une case sur un document bureaucratique ?Un silence lourd tombe entre nous. Son calme me fait grincer des dents. Cette indifférence calculée me coupe le souffle.— Je ne suis pas à vendre, Monsieur Valesco.Je balance la feuille sur le bureau. Le claquement du papier contre le bois massif résonne comme une gifle. La colère bouillonne dans mes veines, b

  • Les clauses du cœur    Chapitre 1 — L’offre

    FleureJe n’avais jamais mis les pieds dans un endroit aussi… silencieusement riche.Le genre de silence qui coûte cher. Où chaque pas sur le marbre résonne comme une faute. Où les murs sentent la vieille puissance, le cuir trop poli et les contrats signés dans des verres de whisky à mille euros. Ici, chaque détail crie la supériorité silencieuse de ceux qui n’ont jamais eu à compter.Et moi, au milieu de tout ça, avec mon sac élimé, mes escarpins usés et ma jupe noire que je repasse chaque matin pour masquer la fatigue du tissu… je détonne.Je serre les lanières de mon sac entre mes doigts, comme si elles pouvaient m’ancrer à quelque chose. Quelque chose de réel. Quelque chose de stable.Mais rien n’est stable, plus rien ne l’a jamais été depuis six mois.Depuis que mon client principal m’a lâchée sans préavis. Depuis que mon compte bancaire ne fait que saigner. Depuis que mon projet de centre culturel mon rêve a été refusé, faute de fonds.Je suis brillante, on me l’a toujours dit ,

More Chapters
Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status