Impossible de Rester, Besoin de Fuir

Point de vue de Sienna

« Éloignez-le de moi ! » ordonna Kieran.

Les gardes traînèrent Ronan sur le sol. Il cracha du sang et me regarda.

J’avais peur qu’il lui arrive quelque chose.

« Il vivra, » dit Kieran, comme s’il lisait dans mes pensées.

Ses hommes le tirèrent jusqu’à la porte, ses bottes raclant le sol. Au moment de sortir, un éclat tomba de sa main.

Kieran ne le remarqua pas ; il avait le dos tourné. Je courus ramasser le poignard.

Kieran se retourna aussitôt, et je cachai la dague dans ma paume derrière moi.

La porte se referma, et nous restâmes seuls.

« Es-tu stupide à ce point ? » demanda-t-il.

« Hein ? » fis-je, surprise.

« Il est entré et tu n’as rien vu, » lâcha Kieran.

J’étais au courant, mais je n’avais pas le temps de discuter. Je voulais qu’il parte, pour pouvoir desserrer la grille d’aération et sortir de cette fichue maison.

Il avança, et je reculais à chaque pas qu’il faisait.

Il eut un sourire, me coinçant contre le mur, et se pencha vers moi.

« Tu vas bien ? » demanda-t-il. « Tu sembles nerveuse, Sienna. »

Sa voix trahissait son amusement.

À quoi pensait-il ?

« Et pourquoi le serais-je ? » répondis-je enfin.

Son visage était terriblement proche ; j’avalai ma salive. « À toi de me le dire, Sienna, » dit-il. Son souffle chaud effleura ma peau.

Il me fallait une diversion.

Vite, Sienna. Réfléchis.

Mon esprit peinait à trouver une idée. Son regard dur devint plus doux, glissant vers mes lèvres.

Je détournai légèrement la tête avant qu’il ne puisse m’embrasser, et je souris.

S’il était attiré par moi, je pouvais peut-être en tirer avantage.

Je le regardai de nouveau et passai ma langue sur mes lèvres.

Il sembla surpris, puis sourit, tandis que je posais ma main sur son torse, lentement, réchauffant ses muscles.

« C’est ce que tu veux, non ? » demandai-je, mes doigts jouant sur sa poitrine.

« Je ne… » commença-t-il, mais je l’interrompis.

« Laisse-moi t’aider à te détendre, » chuchotai-je.

Sa mâchoire se contracta, un sourcil se haussa.

Je haussai les épaules, ma main glissant vers sa gorge. « Je suis juste curieuse. »

Il ne m’arrêta pas. Je continuai, le distrayant de ma main, et lorsqu’il baissa sa garde, j’agis : je sortis la dague.

J’attaquai, la lame proche de son visage. Il esquiva vivement et me saisit le poignet lorsque je tentai encore.

Il me plaqua sur le matelas, la dague tomba. Il était trop fort, m’écrasant sous lui. J’étais piégée.

« Lâche-moi, » dis-je, me débattant.

Son visage n’était qu’à un souffle du mien.

Pour la première fois, la panique pure traversa mes veines.

Je luttais, mais il ne bougea pas. Sa poigne se resserra.

Puis, sans prévenir, il se pencha.

Et il m’embrassa.

Ce n’était pas doux. C’était affamé, exigeant. Ses lèvres brûlantes pressèrent les miennes, m’immobilisant.

Je haletai, gémissant malgré moi. C’était trop intense, j’en perdis la raison.

J’en voulais plus… puis ses lèvres quittèrent les miennes.

« Je te conseille de ne pas jouer avec moi, Sienna, » murmura-t-il. « Tu perdrais. »

C’était une menace. Et il était sérieux.

Je clignai des yeux, encore troublée par le baiser.

Quelque chose céda en moi.

Avant même d’y penser, je levai le genou et le frappai à l’aine.

« Ugh, » grogna Kieran, se tordant de douleur.

Je ne perdis pas une seconde et me jetai sur lui, attrapant le premier objet lourd à portée.

Le grand coffret en cristal s’écrasa sur sa tête, éclatant en mille morceaux, et Kieran jura avant de s’effondrer.

Je courus. À toute vitesse vers la porte et dans le couloir.

Les gardes parlaient en bas ; je ralentis aussitôt pour ne pas éveiller les soupçons.

Je traversai discrètement le passage ouvert et approchai la porte d’entrée, le cœur battant de victoire quand une voix glaciale retentit :

« Où allez-vous ? »

Je me retournai lentement, forçant un grand sourire. « Euh… je voulais juste prendre un peu d’air. »

Le garde remit sa veste en place. « Je vous accompagne. »

Je secouai la tête, paniquant intérieurement. « Non, pas besoin. Je vais bien. J’ai juste besoin d’air. »

Un autre entra, compliquant tout. « Le maître Kieran a dit de ne pas vous quitter des yeux une seconde. »

Maudit soit cet homme.

« Je reviens tout de suite, je te le promets, » négociai-je.

« Bien sûr que oui. Allons-y, » répondit-il.

S’ils me voyaient refuser, ils se douteraient de quelque chose. Mon cœur s’emballa.

Ils ne pouvaient pas me bloquer. Pas aujourd’hui.

Je ne pouvais pas les laisser me suivre. Je bondis, ouvrant la porte. Ils crièrent derrière moi.

Je filai à travers le manoir, prenant des couloirs inconnus, évitant les meubles, bousculant tout sur mon passage.

J’eus de la chance : la porte arrière s’ouvrit à quelques mètres.

Je ne réfléchis pas et me précipitai dehors.

« Arrêtez ! » crièrent-ils tandis que je fuyais vers la forêt.

Je ne me retournai pas, ignorant les branches qui fouettaient mes bras.

La poursuite s’intensifia, puis soudain, je fus au bord d’une falaise. Je voulus m’arrêter, trop tard.

Je tombai dans la rivière, criant, battant l’eau. J’essayai de remonter à la surface, mais le courant m’emporta.

Je ne savais pas nager.

« À l’aide ! » hurlai-je, mais les vagues étouffaient ma voix.

Les gardes passèrent plus loin ; je tentai de crier encore.

« À… » je lançai, avant d’être tirée de nouveau sous l’eau.

Je sombrais. Je luttais, mais le courant était trop fort.

Quelle idiote. J’aurais dû rester. L’eau me repoussa à la surface, juste assez pour voir une silhouette s’approcher du rivage.

« À l’aide… » soufflai-je avant que l’eau ne m’engloutisse à nouveau.