Chapitre 2

La nuit tombait quand j'ai traîné mon corps épuisé jusqu'à la maison.

Marcus, mon fiancé, se trouvait dans le salon. Il tenait mon chien Ruby et jouait à la balle avec lui tout en parlant en visio avec Céleste.

Peut-être était-ce l'effet de la potion de la sorcière, mais mes pas étaient stables et fermes. Ils n'ont même pas remarqué mon retour.

Marcus a lancé la balle et s'est retourné pour me voir. Son sourire s'est figé un instant.

« Anne, te revoilà ? Comment tu te sens aujourd'hui ? »

Ruby était un chien que j'avais ramené de la campagne. Dès qu'il m'a vue, il a tenté de se libérer des bras de Marcus pour venir se blottir contre moi.

Il semblait que Céleste était déterminée à ne rien me laisser. Elle ne voulait même pas m'épargner mon chien.

Comme c'était ridicule. J'allais bientôt mourir.

Marcus a raccroché précipitamment l'appel vidéo en essayant de calmer Ruby qui se débattait.

Mais Ruby l'a ignoré, geignant doucement tout en frottant son museau contre mes jambes.

C'était le seul compagnon que j'avais ramené de la campagne.

De l'écran du vidéo, la voix faible de Céleste s'est de nouveau fait entendre.

« Marcus, est-ce qu'Anne ne m'aime pas ? Même son chien est si méchant. »

Avant même que je puisse parler, Marcus s'était déjà mis à froncer les sourcils.

« Anne, la santé de Céleste est fragile. Elle ne supporte pas d'avoir peur. — De toute façon, ce n'est qu'un chien de campagne. Je demanderai à mon assistant de l'emmener demain. »

Céleste a affiché un sourire triomphant à l'écran.

J'ai levé la tête, mon regard balayant froidement le visage de Marcus.

Ma fixation le mettait mal à l'aise. Il a détourné les yeux.

« Ruby est à moi. Je m'en occuperai moi-même. Ne vous en mêlez pas. »

J'ai tourné les talons et me suis dirigée vers l'étage.

Marcus a hésité, puis m'a interpellée.

« Anne, il y a quelque chose dont je voulais te parler. La condition de Céleste… les médecins disent que ce n'est pas brillant. »

Sa voix portait une note de supplication à peine perceptible.

Il m'a guidée vers la salle à manger.

Sur la table, un dîner aux chandelles était dressé.

Les flammes vacillantes se reflétaient sur son visage si séduisant, le rendant particulièrement tendre.

Il a tiré ma chaise et a servi le vin.

« Anne, cela fait si longtemps que nous n'avons pas partagé un vrai repas comme celui-ci. »

Il a levé son verre, les yeux emplis de douceur en me regardant.

Je n'ai pas bougé.

« Tu te souviens ? Notre premier rendez-vous était dans un restaurant exactement comme celui-ci. »

Il a parlé du passé, perdu dans ses souvenirs.

Ces instants qui autrefois faisaient battre mon cœur plus vite me paraissaient à présent si grinçants.

Finalement, il en est venu au fait.

« Anne, je sais que te demander de donner un rein est cruel. Mais Céleste… elle en est arrivée là à cause de moi. »

J'ai interrompu mon geste vers mon verre de vin.

Les yeux de Marcus étaient emplis de douleur et de culpabilité.

« À l'origine, c'était une louve forte, mais elle est tout simplement trop gentille. Non seulement elle a subi de graves blessures en sauvant ta famille, mais en plus, elle a développé une insuffisance rénale en me sauvant. Il y a trois ans, pendant la mission de patrouille en forêt, si elle ne m'avait pas poussé hors de portée quand ce loup renégat m'a attaqué, c'est moi qui aurais été mordu. Ses reins ont commencé à défaillir à cause des toxines de cette morsure. Je lui dois la vie. »

J'ai failli éclater de rire.

Alors c'était ça.

Mais ce jour-là, celle qui avait été mordue en le protégeant du loup renégat, c'était moi.

C'est moi qui ai été mordue et qui suis tombée dans le ravin.

Céleste, elle, n'avait fait qu'attendre au camp de base en contrebas. Elle s'était tordu la cheville toute seule.

Mais pendant ma disparition, elle a volé tout mon mérite.

Le même tour qu'elle avait toujours joué – tout comme elle avait volé le mérite de moi sauvant notre famille auparavant, maintenant elle volait le mérite de moi sauvant Marcus.

Mes réussites, mes blessures – elle les transformait sans effort en capital pour obtenir de la compassion.

Dès cet instant, elle avait manigancé pour remplacer tout ce qui m'appartenait.

« Anne, tu es si bonne. »

Marcus a serré ma main, son ton plein de sincérité.

« Pour moi, je t'en prie, sauve-la, d'accord ? »

J'ai regardé son visage, si profondément ému, et je n'ai ressenti qu'un vide intérieur.

« Marcus. »

J'ai parlé calmement.

« Mes reins sont aussi endommagés. »

L'expression suppliante sur son visage s'est instantanément figée.

« J'ai été diagnostiquée aujourd'hui. »

L'hiver dernier, j'avais été emmenée d'urgence à l'hôpital au milieu de la nuit avec de violentes crampes d'estomac.

Il avait tenu ma main, exactement comme ça à ce moment-là.

Ses paumes étaient moites, son front plissé d'inquiétude.

Il avait dit au médecin d'utiliser les meilleurs médicaments, quel qu'en soit le coût.

Il s'était penché et avait chuchoté des mots réconfortants à mon oreille.

« Anne, ta santé est plus importante que tout. »

Ses paroles attentionnées résonnaient encore dans ma mémoire.

Maintenant, il me demandait de sacrifier ma santé pour sauver quelqu'un d'autre.

J'ai lentement retiré ma main.

En regardant l'homme devant moi, j'ai soudain eu l'impression que c'était un étranger.

La profonde affection dans ses yeux – tout cela n'avait été qu'une comédie.

Même ses attentions avaient une date de péremption.

Il a semblé mal interpréter mon silence, pensant que je faisais un caprice.

« Marcus, Céleste n'est pas malade. »

J'ai plongé mon regard dans ses yeux, articulant chaque mot distinctement.

« Son insuffisance rénale est fausse. La personne qui t'a sauvé ce jour-là était— »

Avant que je puisse finir, l'expression de Marcus s'est assombrie.

« Anne, je n'aurais jamais pensé que tu puisses être aussi vicieuse. Pour éviter de donner un rein, tu inventerais de tels mensonges pour la maudire. »

J'ai tenté d'expliquer. « Je l'ai vue manger épicé avec des amis dans un restaurant. Une personne avec une insuffisance rénale ne pourrait jamais faire ça. »

Son téléphone a sonné.

C'était Céleste en appel vidéo.

À l'écran, Céleste était allongée dans son lit d'hôpital, pâle comme un linge, toussant faiblement.

« Marcus, je me sens si mal. Est-ce que je vais bientôt mourir ? »

Les yeux de Marcus se sont immédiatement remplis de douleur et d'anxiété.

Il a raccroché et m'a regardée avec une froide déception.

« Voilà la Céleste que tu prétends manger épicé ? Anne, tu m'as profondément déçu. »

Mes oreilles bourdonnaient, et il m'a fallu longtemps pour retrouver ma voix.

« D'accord. »

Marcus a soupiré de soulagement. « Anne, je sais que tu te sens lésée. Mais Céleste est ta sœur. Nous ne pouvons pas l'abandonner. De plus, ce n'est qu'un report. Après la mort de Céleste, je t'offrirai une cérémonie d'accouplement encore plus grandiose. »

J'ai observé tranquillement l'homme devant moi.

C'était l'homme que j'avais autrefois si profondément aimé.

C'était le partenaire de vie que j'avais choisi.

Je pensais avoir tout donné dans notre relation, sans rien retenir.

Au final, je n'ai récolté que de la trahison.

Mais cela n'avait plus d'importance.

Si c'était ce qu'ils voulaient, ils pouvaient tout avoir.

J'ai levé la tête et regardé Marcus. « D'accord. J'accepte. »

Un soulagement a inondé le visage de Marcus. Il a serré ma main, son ton parfaitement sincère.

En le regardant, la dernière trace de chaleur dans mon cœur s'est finalement dissipée.

Jusqu'à ce moment, j'avais gardé un minuscule espoir pour Marcus.

Mais maintenant…

Assez. À part la mort, je n'avais plus aucune attente.

Je me suis levée, prête à regagner ma chambre.

Soudain, une vague de vertige intense m'a frappée. Ma vision est devenue noire, et j'ai perdu connaissance.

Alors que je tombais, j'ai cru voir le visage de Marcus empreint de panique.

Le froid m'a réveillée.

En ouvrant les yeux, je me suis retrouvée toujours allongée sur le sol froid.

Marcus se tenait au-dessus de moi, le regard lourd de reproches.

« Anne, peux-tu arrêter d'utiliser ces méthodes pour attirer mon attention ? »