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CHAPITRE 6. Le silence entre deux coeurs

Aвтор: Ben Bash
last update Последнее обновление: 2025-06-21 15:23:14

Sur la grande table généreusement garnie, Christelle, avec une discrétion et une grâce naturelles, se servit en premier. Elle choisit quelques mets avec une délicatesse qui la rendait presque irréelle : une portion modeste de riz parfumé, un morceau de poulet bien doré, quelques tranches de plantains et une cuillerée de légumes sautés.

Chaque geste était mesuré, réfléchi, presque pudique.

Je suivis son exemple, m'efforçant de ne pas trop remplir mon assiette. L’appétit, pour tout dire, m’avait quitté depuis un moment, chassé par une excitation nerveuse et douce qui me tenait le ventre serré. Nous reprîmes ensemble le chemin de notre table d'honneur, cette table légèrement surélevée, qui dominait la terrasse comme un trône d'apparat.

Deux chaises avaient été installées côte à côte, recouvertes de tissus satinés, comme pour mieux nous mettre en valeur aux yeux de tous. Nous nous assîmes avec lenteur, en silence, presque à l’unisson, comme si un fil invisible nous liait déjà.

Un léger "Bon appétit" murmuré rompit enfin l'air qui semblait s'être figé entre nous. Je répondis avec un sourire discret, rendant à Christelle la politesse, puis baissai les yeux vers mon assiette. Nous commençâmes à manger. Chacun dans son coin de pensée. Chacun dans sa bulle silencieuse.

La nourriture avait bon goût, pourtant chaque bouchée me semblait lointaine, comme si mon corps était ici, mais mon esprit déjà ailleurs, suspendu entre ce que je vivais et ce que j'imaginais. Le silence entre nous n'était pas pesant ; il était chargé. Chargé de non-dits, d'interrogations, de curiosité mutuelle.

Nous étions comme deux étrangers parachutés sur une scène dont nous n'avions pas écrit le scénario. Autour de nous, c'était une toute autre histoire. Les regards, nombreux, insistaient. Je les sentais, sans même avoir besoin de lever les yeux : des regards amusés, malicieux, attendris, parfois même légèrement moqueurs.

Les rires étouffés dans les coins, les chuchotements trop peu discrets qui mouraient aussitôt dans un éclat de rire forcé... tout révélait l’attention collective qui pesait sur nous. Les invités, la famille, les amis... tous semblaient avoir formé une alliance tacite pour nous observer comme s'ils assistaient à une scène de théâtre romantique.

Je surpris même, au détour d’un rapide coup d’œil, ma mère et Gisèle, installées non loin, chuchotant entre elles en nous regardant à la dérobée, leurs visages illuminés d'un sourire complice. Je compris alors que pour tous ces gens présents, Christelle et moi, nous étions déjà quelque chose. Un couple pressenti, un rêve incarné, une promesse silencieuse.

Je sentis mes joues chauffer légèrement, mais je fis mine de me concentrer sur mon assiette. À côté de moi, Christelle ne semblait pas moins troublée. Elle mangeait à petits coups de fourchette, parfois baissant légèrement la tête, parfois lançant un rapide regard autour d’elle, comme pour chercher un appui ou un secours invisible.

Par instants, nos regards se croisaient furtivement et brièvement comme deux flammes timides qui dansent sans encore oser se toucher. Chaque croisement d’yeux était un petit orage d’émotions, un mélange d’étonnement, de gêne légère, mais aussi... d'une étrange connivence.

La situation avait quelque chose d'irréel. Je n'avais pas besoin qu'on me l'explique : cette journée n'était pas un hasard. Cette rencontre n'était pas fortuite. Il y avait une intention, un projet, une main douce mais ferme derrière tout cela. Et cette main, je la connaissais : c'était celle de ma mère, Valentine.

Je l’imaginais déjà, dans ses conversations secrètes avec Gisèle, planifiant tout : la fête, la surprise, le gâteau... et l’apparition de Christelle. Tout cela n'était pas de la pure improvisation. Mais pour l’instant, je n'avais d'autre choix que de jouer mon rôle : celui d’un homme honoré par tant d’attention, surpris, flatté, un peu déstabilisé, mais heureux, au fond, de la tournure que prenaient les choses.

Le repas continuait. Les conversations autour de nous reprenaient peu à peu, relâchant un peu la pression. Les verres tintaient, les éclats de voix s’élevaient, les enfants couraient dans le jardin. Pourtant, malgré le vacarme ambiant, entre Christelle et moi, il persistait ce silence délicat, précieux, presque sacré. Un silence qui, je le sentais, n’allait pas durer éternellement.

Quelque chose devait arriver. Quelque chose devait être dit. Un premier mot, un premier échange... Mais qui allait oser le premier ?

Après de longues minutes de silence à table, où le cliquetis des couverts semblait rythmer les battements un peu fébriles de mon cœur, je sentis qu’il fallait agir. Je posai doucement ma fourchette sur le rebord de mon assiette, m'essuyai la bouche avec la serviette de table et me levai avec une lenteur calculée, comme pour ne pas alerter davantage l'assistance déjà si prompte à l’observation.

Sans un mot, d’un simple signe de la main discret mais ferme, j'interpellai ma mère. Elle comprit tout de suite. Son visage s'éclaira d'un sourire tendre mêlé d'une pointe de malice, comme si elle savait déjà ce qui me travaillait intérieurement.

Elle abandonna son verre de jus d’orange, s’excusa brièvement auprès de Gisèle, et me suivit, enjambant les nappes et les décorations de fête, jusque dans le couloir ombragé qui reliait le salon à l’arrière de la maison. Une fois éloignés des oreilles indiscrètes, je me retournai vers elle, les bras croisés, m’efforçant de contenir l'orage de questions qui m’envahissait.

— Maman, qui est Christelle ? demandai-je d’une voix calme mais ferme.

Je vis ses yeux pétiller d'une étincelle de malice, comme si elle savourait à l’avance le moment qu’elle avait visiblement longuement préparé.

Mais au lieu de répondre directement, elle m'adressa une question en retour, son sourire s’élargissant :

— Elle ne te plaît pas ?

Je soupirai légèrement, comprenant que la discussion n’allait pas être aussi simple qu'espéré.

— C’est une fille aimable, très aimable même, avouai-je sans détour.

Mais je veux comprendre pourquoi elle est ici... pourquoi cette "mise en scène", pourquoi toi, maman, tu sembles tout avoir orchestré sans m'en parler.

Je fixai son visage, espérant y lire quelque chose, une réponse silencieuse. Mais Valentine, fidèle à elle-même, choisit encore de ne pas tout dire. Elle posa affectueusement ses deux mains sur mes épaules, comme pour calmer l’impatience qui bouillait en moi.

— Christelle est la fille de Gisèle, dit-elle enfin. Le reste, tu le découvriras petit à petit. Pas besoin d’être stupide, Fred.

Son ton, bien qu'empreint de douceur, ne laissait pas de place à la négociation. Elle ajouta, d'un air mi-sérieux, mi-taquin :

— Ne gâche pas cette belle journée avec des interrogations inutiles. Fais-moi confiance, mon fils. C’est pour ton bien.

Sur ces paroles sibyllines, elle me gratifia d'une légère tape sur la joue et tourna les talons, regagnant d'un pas léger le salon, me laissant seul quelques secondes dans le couloir.

Je restai planté là, l’esprit en ébullition, le cœur tiraillé entre l'inquiétude et la curiosité. "Ne sois pas stupide", avait-elle dit.

Je savais bien que ma mère n’était pas du genre à prendre des décisions au hasard, surtout en ce qui me concernait. Si elle avait choisi ce jour, cette fête, ce moment pour introduire Christelle dans ma vie, c’est que, quelque part, elle avait mûri ce projet de longue date.

Je pris une profonde inspiration, puis je revins au salon, tâchant de reprendre mon calme et mon sourire. La fête battait son plein. La musique jouait, les rires fusaient, les enfants dansaient sous les yeux attendris des adultes. Et Christelle était là, assise sagement à notre table d’honneur, l’air un peu perdu elle aussi, mais toujours aussi belle dans sa simplicité.

Je repris ma place à ses côtés, ajustai discrètement ma posture et, sans laisser paraître le tumulte qui m’agitait, je pris une gorgée de mon verre.

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