LOGINNoah ne me laisse même pas le temps de répondre. Il ouvre la portière de sa voiture et attend, silencieux, que je monte.
Impossible de dire non. Pas après ce qui vient de se passer. Pas avec mes jambes encore tremblantes. Je m’installe. L’odeur du cuir mêlée à une note boisée m’enveloppe. Tout ici respire l’ordre, le contrôle et… lui. Il contourne le véhicule, prend place au volant et démarre sans un mot. Le moteur ronfle doucement. À l’intérieur, on n’entend que ça. Et ma respiration un peu trop rapide. Je garde les yeux fixés sur la route, le front légèrement crispé. Je n’arrive pas à oublier sa violence contenue dans ce bar. Ni son regard brûlant quand il m’a retrouvée coincée contre ce mur. Un moment passe avant qu’il ne rompe le silence. — C’est toujours comme ça, vos samedis soirs ? Je me tourne vers lui, piquée, humiliée et honteuse par la même occasion. — Non. Je ne sors presque jamais. Joyce a insisté. Il hoche la tête, un geste lent, presque clinique. — Alors évitez les endroits où votre amie vous traîne sans réfléchir. Je serre les dents.Toujours ce ton condescendant. Toujours ce besoin de diriger, même en dehors du bureau. — Vous pouvez simplement dire que vous êtes inquiet , répliqué-je doucement. Il se tourne vers moi. Ses yeux accrochent les miens. Il m’observe une seconde de trop, comme s’il analysait une phrase qu’il n’était pas censé entendre. — Pourquou devrais-je m'inquiéter pour vous? Je ne le suis pas. Je constate , répond-il finalement. Mensonge numéro deux de la soirée. Je détourne les yeux avec un souffle agacé. Mais une partie de moi reste suspendue à ce non-aveu déguisé. Le silence retombe, différent cette fois. Un silence lourd, chargé, presque brûlant. Il s’arrête devant chez moi. Je me détache, mais je ne bouge pas tout de suite. Je sens son regard posé sur moi. — Nadège... Je frissonne légèrement. Il ne prononce presque jamais mon prénom. Et quand il le fait, quelque chose se passe dans ma poitrine. — Vous devez apprendre à dire non. Il marque une pause. — Aux mauvaises invitations. Aux mauvaises personnes. Je m’humidifie les lèvres, nerveuse. — Je sais dire non. — Apparemment pas, cet incident nous l'a assez prouver tranche-t-il. Je le fixe, un peu vexée. — Vous êtes venu me sauver pour mieux me sermonner par la suite ? Son regard descend brièvement sur mon bras, encore rougi. Sa mâchoire se contracte. — Je vous raccompagne jusqu’à la porte. Encore une décision non négociable. Je ne discute pas. On avance côte à côte dans la pénombre du quartier, les lampadaires dessinant des ombres déformées autour de nous. Devant ma porte, il s’arrête. Il se tient droit, comme s’il était encore dans son bureau, mais son regard dément cette posture rigide. Il est tendu. Trop tendu. — Vous êtes sûre que ça va ? Sa voix a perdu un peu de sa dureté. Je hoche la tête. — Merci… vraiment. Il soupire. Un souffle discret, presque imperceptible. Quelque chose lutte en lui. Une retenue. Un conflit. Il veut dire autre chose, mais se retient. C’est évident. — Faites attention à vous , finit-il par dire. Je souris. Un petit sourire fatigué. — Bonne nuit, Monsieur Ewane. Je m’apprête à entrer quand il murmure, suffisamment fort pour que je l’entende : — Appelez-moi Noah. Je me fige un instant pour réaliser ce qui est entrain de ce passer là. À cet instant. Je me tourne lentement. Son regard me traverse, intense, indéchiffrable. Un frisson m’échappe. Je n’ai aucune idée de ce que ça signifie pour lui. Mais pour moi… c’est un déclencheur. Une frontière qui se fissure. — Bonne nuit… Noah, soufflé-je. Il recule d’un pas, comme si ce simple mot avait un impact qu’il refuse d’admettre. Puis il tourne les talons et regagne sa voiture. Je reste plantée là quelques secondes après son départ, encore tremblante, mais plus pour les mêmes raisons qu’au début de la soirée. Cette nuit marque un tournant. Je le sens. Lui aussi, même s’il ferait tout pour le nier. Et c’est peut-être ça, le plus dangereux.Le jour s'étire avec l'apparition des premiers rayons de soleil qui s’infiltrent à travers les rideaux. Ma tête cogne tellement fort qu'on dirait qu'elle va exploser. L'amertume dans ma bouche et cette odeur d’alcool qui émane de moi me donne presque la nausée. J'ouvre à peine mes yeux, je tapotte le lit et là je me heurte à la réalité qui me tape de plein fouet. Je ne suis pas seul dans le lit. Mais qui est ce ? C'est au moins une fille je l'espère. Elle est recouverte d'y drap de la tête au pieds. Je me décide de lui ôter le drap du visage et là je sursaute avant de bondir hors du lit. Mon cerveau et mes yeux ne parviennent pas à croire en ce que je vois. — Hey!... réveillez vous! Dis-je en serrant les dents le ton d'emblé d'une colère et d'un agacement naissant — Mais maman laisse moi dormir encore un peu stp — Réveillez-vous Mlle Mballa ! Vous êtes chez moi et dans mon lit bon sang! Cette fois, ma voix est assez audible et je la regarde attentivement reprendre conscience. Ell
dans la peau de Noah Le lounge est un tourbillon de lumières et de sons. Les basses résonnent dans ma poitrine, chaque vibration me traverse comme un choc électrique. Je vois flou. Les silhouettes autour de moi dansent et rient, inconscientes, légères. Moi, je reste figé sur ma chaise, un verre à la main, tremblant légèrement. Je bois, encore et encore, comme si le liquide pouvait noyer mes pensées et mes sentiments, mais ça ne fait qu’amplifier le chaos à l’intérieur. Mes mains tiennent le verre, mais mes yeux cherchent autre chose. Quelque chose que je n’ai jamais osé convoquer avant ce soir. Mon téléphone glisse entre mes doigts. Je navigue dans les contacts, je cherche son nom, le souffle court. Mon cœur tambourine comme si chaque seconde d’hésitation allait me brûler. Une… deux… trois secondes. Je retarde, mais l’impulsion devient plus forte que moi. Et enfin, sans réfléchir, je tape son numéro et appuie sur appeler. La sonnerie résonne dans mes oreilles comme un coup de canon
L’ascenseur se referme dans un souffle feutré.Le silence s’abat aussitôt, lourd, presque oppressant. Les parois métalliques renvoient notre reflet déformé. Noah est juste devant moi. Trop proche. Assez pour que je sente la chaleur de son corps, assez pour que chaque respiration devienne une prise de risque.Il relâche lentement sa prise sur mon poignet, comme s’il venait seulement de réaliser ce qu’il faisait. Le geste est discret, maîtrisé, mais je l’ai senti. Ce retrait contrôlé. Cette retenue presque douloureuse.— Reste ici, dit-il sans me regarder.Sa voix est redevenue professionnelle. Calme. Tranchante. Celle du PDG que tout le monde respecte et redoute.Mais je sais. Je sais que c’est une façade.— Noah… murmuré-je, incapable de supporter cette distance soudaine.Il ferme les yeux une fraction de seconde. Juste assez pour que je comprenne qu’il lutte. Contre lui-même. Contre quelque chose de plus fort que la raison.— Nadège, coupe-t-il doucement, mais fermement. Écoute-moi.
Le bureau semble s’être transformé en un piège silencieux. La lumière du soleil, filtrée par les stores, découpe des bandes d’ombre sur le sol, et chaque bruit du couloir résonne comme un coup de tonnerre. Noah me retient contre lui, son souffle chaud effleurant mes cheveux, sa main pressant doucement la mienne pour m’empêcher de trembler. — Nadège… murmure-t-il, et je sens que sa voix trahit une peur qu’il tente désespérément de contenir. Ce n’est pas seulement l’ombre ou l’enveloppe. C’est… autre chose. Plus profond, plus dangereux. Je hoche la tête, incapable de parler. Mon cœur bat à un rythme effréné, comme s’il voulait s’échapper de ma poitrine. Chaque fibre de mon corps me dit de fuir, mais je sais que je ne peux pas. Pas maintenant. Pas quand je sens cette proximité, cette intensité, ce danger qui nous relie et nous consume en même temps. Noah se détourne légèrement, ses yeux noirs cherchant quelque chose dans le couloir. Je suis tentée de bouger, de me rapprocher encore, m
Le téléphone sonne. Trois coups secs, insistants, mais je n’ai pas le temps de tendre la main. Noah est déjà devant moi, ses yeux sombres plantés dans les miens, la mâchoire crispée. Son visage impassible, mais son regard brûle d’une intensité que je n’avais jamais vue avant.— Nadège, je vous demande de patienter dans mon bureau, dit-il d’un ton tranchant.Il ne sourit pas, ne me laisse pas répondre. Je le suis, le cœur battant, comme une spectatrice impuissante. La porte se referme derrière nous avec un claquement qui résonne dans le silence.Le bureau est étrangement calme. Les dossiers que je venais de déposer semblent suspendus dans l’air. Noah reste immobile, derrière son bureau, les bras croisés, et je remarque pour la première fois combien il paraît… tendu. Comme si chaque fibre de son corps était prête à exploser.— Qu’est-ce qui se passe ? murmuré-je, cherchant à comprendre l’urgence.Il me regarde, un éclair de quelque chose – irritation, inquiétude, possessivité – traverse
Je referme la porte derrière moi doucement, comme si le bruit pouvait encore le retenir. L’appartement retrouve son silence familier, celui qui ne m’a jamais pesé jusque-là. Ce soir, pourtant, il est différent. Trop vaste. Trop présent.Je pose mon sac sur la table, enlève mes chaussures sans vraiment y penser, et je reste là, debout au milieu du salon, incapable de bouger. Mon cœur bat encore trop vite. Pas à cause du baiser. Mais à cause de tout ce qu’il a réveillé. Je revois ce moment agréable et surprenant à la fois. Je passe une main sur mon visage, comme pour vérifier que je suis bien là, que je n’ai rien imaginé. Mais non. C’est réel. Noah était là. Son regard. Sa voix plus basse. Sa manière de se retenir alors que tout en lui criait le contraire.Je m’assois enfin sur le canapé, le dos droit, les épaules tendues. Je rejoue la scène encore et encore. Ce moment suspendu où plus rien n’existait que nous deux. Où le monde extérieur s’est effacé sans prévenir. Je n’ai pas réfléch