Share

Chapitre 4

Author: Peachy
Lorsque je suis rentrée dans nos chambres, la rage et l'humiliation me brûlaient les veines.

Je n'attendais plus.

Je n'allais plus le regarder jouer à ses jeux tordus.

J'allais l'affronter, lui arracher ce masque parfait une fois pour toutes.

Une heure plus tard, Bernard est revenu.

Il a franchi la porte en emportant un parfum épais et chaotique.

C'était un mélange du parfum floral d'Adrienne, de son propre parfum de bois de cèdre, et d'une légère et troublante note de sang et d'herbes.

Il avait le visage marqué par l'épuisement, les poignets de sa chemise froissés et en désordre.

Il m'a vue et s'est figé une seconde, puis a essayé de forcer un sourire.

« Sandrine ? Tu n'es pas couchée ? »

Je me suis plantée au centre du salon, les bras croisés, froide comme un bloc de glace. « Où étais-tu ? »

« Je gérais une situation... difficile. »

Il s'est dirigé vers le bar à alcool et s'est servi un whisky, sa main n'étant pas tout à fait stable.

« Une situation difficile ? » J'ai ricané en m'approchant de lui. « Ou était-ce juste une autre des URGENCES d'Adrienne que tu étais le seul à pouvoir gérer ? »

Sa main s'est figée dans les airs. Il m'a tourné le dos, mais j'ai vu ses épaules se figer.

« Sandrine, ne fais pas ça. »

« Ne pas faire quoi ? » Je me suis retournée pour lui faire face, fixant ses yeux dorés et fatigués. « Je t'ai vu prendre son lien mental dans le cachot. J'ai vu la frustration sur ton visage. Et maintenant, tu reviens en empestant son chaos. Bernard, qu'est-ce que notre petit et moi sommes pour toi ? »

« Ce n'est pas... » a-t-il commencé, d'une voix rauque, mais il s'est interrompu.

Comme si les mots étaient coincés dans sa gorge, l'étouffant.

« Ce n'est pas quoi ? » J'ai insisté, me rapprochant. Le désespoir et la rage me rendaient téméraire.

« Tu sens comme elle ! C'est le genre de parfum qui ne s'accroche que lorsque les émotions sont fortes, lorsque tu tiens quelqu'un près de toi ! Dis-moi, tu es fatigué de moi ? N'étais-je qu'un outil pour assurer ta position depuis le début ? »

« Ça suffit ! » Il a claqué le verre, le whisky giclant sur le bord. Ses yeux étaient remplis de douleur. « Ce n'est pas ce que tu penses ! »

« Alors qu'est-ce que c'est ? » J'ai crié. « Explique-moi ! Dis-moi pourquoi tu as sacrifié mon frère et notre petit à naître pour elle ! Pourquoi toute la meute doit-elle se plier à ses moindres caprices ? Quel genre d'emprise a-t-elle sur toi ? »

« Je ne peux pas te le dire ! » a-t-il rugi, comme un animal en cage. « Il vaut mieux que tu ne saches pas ! »

« Cette même foutue excuse ! » J'ai complètement perdu la tête. « C'est pour ton bien ! C'est pour la meute ! Tu as toujours une noble raison, n'est-ce pas ? Bernard, j'en ai fini avec tes secrets et tes mensonges ! »

À ce moment-là, j'ai craqué.

Ma louve intérieure a surgi, avec un raz-de-marée de fureur et de chagrin. La puissance a explosé en moi, incontrôlée.

Les verres de la pièce se sont mis à bourdonner et à vibrer. Les lumières se sont mises à scintiller follement.

L'expression de Bernard est passée de la douleur à l'inquiétude.

« Sandrine, calme-toi ! » Il m'a saisie par les épaules. « Maîtrise ton pouvoir ! Il va te déchirer ! »

Je sentais ma santé mentale s'effriter, avalée par la louve enragée en moi.

Je voulais tout détruire, le détruire, détruire ce monde de mensonges.

« Lâche-moi ! » Je me débattais, mes ongles creusant des lignes sanglantes dans ses bras.

« Je ne peux pas ! »

Il a fixé mes yeux, qui commençaient à briller d'une lumière rouge avec une puissance incontrôlée. Une expression de désespoir et de déchirement a traversé son visage. « Ton esprit est sur le point de se briser ! Sandrine, je t'en prie, arrête ! »

Mais je ne pouvais pas l'entendre à cause du grondement dans mes oreilles, du bruit de mon propre cœur qui se brisait.

« Je suis désolé... » Sa voix tremblante était un murmure lointain. « Je suis tellement désolé. Je ne peux pas te laisser te détruire... »

Puis je l'ai senti.

Une force douce mais inarrêtable, s'écoulant en moi à travers notre lien de compagnon.

Non, il ne voulait pas...

« Qu'est-ce que tu fais ? » Je l'ai regardé avec horreur. Des larmes coulaient sur son visage.

« Je te sauve », a-t-il étouffé, sa voix était chargée d'une agonie que je n'arrivais pas à comprendre, « par notre lien sacré, moi, Alpha Bernard... scelle temporairement... ta louve. »

« Non ! » J'ai crié. « Tu ne peux pas ! C'est un blasphème ! »

Mais il était trop tard.

Le pouvoir a commencé à s'écouler de moi, comme l'eau provenant d'un barrage fissuré.

J'avais l'impression qu'un trou s'ouvrait dans mon âme et que tout ce qu'il y avait de précieux s'en échappait.

Ma louve, mon âme sœur depuis ma naissance, a poussé un dernier hurlement désespéré.

Et puis, le silence.

Je me suis effondrée sur le sol, haletante.

Mes sens étaient en train de s'émousser, de s'éteindre. Mon ouïe fine, mon odorat, ma vision nocturne, tout a disparu.

Le pire... ma louve a disparu.

Complètement disparu.

Il s'est agenouillé à côté de moi, sa propre respiration étant saccadée. Sa voix était un murmure tendu et douloureux. « Sandrine... es-tu... calme maintenant ? »

J'ai essayé de parler, mais je n'avais plus de voix.

J'ai essayé de me lever, mais mes jambes étaient immobilisées.

Il a pris une grande inspiration, son visage s'est durci pour devenir un masque de froide résolution. « Cela s'arrête maintenant, Sandrine. Tant que tu n'auras pas appris à te contrôler, je garderai ton pouvoir. C'est pour ta propre protection, et pour la protection de tous les autres. »

J'ai regardé ses yeux, ces yeux dorés que j'adorais auparavant.

Tout ce que je voyais maintenant, c'était un contrôle froid et dur.

Ma louve, l'autre moitié de mon âme, se taisait pour la première fois de ma vie.

Et dans ce terrible silence, il ne restait qu'une haine froide et brûlante.
Continue to read this book for free
Scan code to download App

Latest chapter

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 28

    Point de vue de SandrineTrois mois plus tard.Dans le grand temple de la meute de la Lune d'Argent, des milliers de représentants de toutes les meutes se sont réunis.Aujourd'hui se déroulait la cérémonie d'accouplement entre moi et Éric.Ce n'était pas une union politique ou de pouvoir. C'était une union forgée dans le feu, fondée sur la confiance et scellée par un amour qui avait patiemment attendu dans les coulisses.Ma mère a retrouvé ses esprits, les dernières traces de la « malédiction » ont été éliminées par le pouvoir de ma lignée. Les blessures de Guillaume ont été entièrement cicatrisées, aucune cicatrice subsistait.Je me tenais devant la statue de la Déesse de la Lune, vêtue d'une robe d'un blanc pur.Éric se tenait à côté de moi dans un costume noir formel.Il n'y avait aucune possessivité dans ses yeux, aucun désir de conquête, seulement de l'amour pur et de l'engagement.« Sandrine Moulin », a déclaré le chaman dans l'ancienne langue rituelle, « prenez-vous cet homme,

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 27

    Point de vue de SandrineUn an plus tard.J'étais en train de traiter les rapports des différentes meutes.Après avoir vaincu les rebelles du Nord et révélé la lignée de mon ancêtre, mon père m'avait confié la direction de la meute.J'avais unifié les meutes et les industries des territoires centraux, mais les choses étaient plus compliquées que je ne l'avais imaginé.Les conflits frontaliers, l'allocation des ressources, les nouvelles lois, chaque décision nécessitait mon approbation personnelle.Mais je me sentais investie d'une mission que je n'avais jamais connue auparavant.« Votre Majesté », a dit la voix d'un garde à l'extérieur de la porte, « le Seigneur Éric est ici pour vous voir. »« Laisse-le entrer. »La porte s'est ouverte et Éric est entré.Un an ne l'avait pas beaucoup changé. Il se portait toujours avec la même force, mais il y avait une ombre de lassitude dans ses yeux que je n'arrivais pas à cerner.« Tu travailles toujours ? » Il est venu à mes côtés, fronçant les s

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 26

    Point de vue de SandrineL'énergie noire s'est lentement dissipée, et le ciel rouge sang est redevenu normal.Mais sur le champ de bataille, tout a changé.Là où se trouvait l'ancien autel, il n'y avait plus qu'un énorme et profond cratère.Le fond était vide.Pas de pierres, pas de runes, aucune trace de quoi que ce soit.Le chef des rebelles n'était plus là.Adrienne n'était plus là.Et Bernard.Ils étaient tous devenus poussière, complètement oblitérés par cette énergie destructrice.Comme s'ils n'avaient jamais existé.La guerre était finie.Les forces restantes des rebelles du Nord s'étaient rapidement dispersées après avoir perdu leur chef.Les armées combinées des meutes de la Lune d'Argent et de la Crête avaient remporté une victoire décisive.Mais personne n'a applaudi.Personne n'a célébré la victoire.Huit cents guerriers d'élite se sont rassemblés en silence autour du cratère, retirant leurs casques et baissant la tête.Ils rendaient hommage non pas à l'Alpha qui était tomb

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 25

    Point de vue de SandrineLe cristal noir dans la main d'Adrienne s'est soudain illuminé d'une lumière aveuglante.Ce n'était pas une lumière ordinaire. C'était une ancienne énergie maléfique.« C'est la Larme de l'Oubli ! » a ricané le chef. « Une fois qu'elle se sera brisée, tout ce qui se trouve à dix miles à la ronde sera détruit ! »De l'énergie noire a surgi du cristal comme un raz-de-marée, formant instantanément un gigantesque tourbillon de destruction.L'air sentait la mort.Les roches ont commencé à fondre sous l'effet de cette puissance.Même le ciel est devenu d'un grotesque rouge sang.« Sandrine ! Cours ! » Le cri désespéré d'Éric est venu du lointain.Mais je savais qu'il était trop tard.L'énergie destructrice se répandait trop vite. Même en courant à toute vitesse, nous ne pourrions pas sortir de la zone de mort avant qu'elle n'explose.J'ai fermé les yeux, invoquant chaque once de la puissance de ma lignée.Une lumière argentée a jailli de mon corps, essayant de former

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 24

    Point de vue de SandrineJ'ai marché vers l'autel, chaque pas crissant sur les rochers pointus.Les coups de feu derrière moi s'étaient estompés et un étrange silence régnait dans le canyon.Tout le monde me regardait.Ils me regardaient marcher vers ma mort.« Haha ! » Le chef des rebelles m'a vue approcher seule et a laissé échapper un rire triomphant. « La petite princesse de Lune d'Argent ne m'a pas déçu ! »Il a fait descendre Bernard du haut de l'autel, pas à pas.« Tu sais », sa voix a résonné dans le canyon, « je pensais qu'il faudrait plus d'efforts pour t'attirer dehors. Je ne m'attendais pas à ce que tu mordes si facilement à l'hameçon. »J'ai continué à marcher, sans répondre à ses railleries.Mais mon esprit était pleinement déployé, percevant soigneusement chaque détail de l'autel.Le pouvoir de ma lignée me permettait de « voir » le flux d'énergie à l'intérieur.Je voyais sept nœuds d'énergie critiques, pulsant comme des cœurs au plus profond de la pierre.Si je parvenai

  • Mon compagnon la choisit plutôt que notre enfant   Chapitre 23

    Point de vue de Sandrine« Sandrine. » Éric est soudain apparu à mes côtés, s'avançant devant moi. « Je sais ce que tu penses. Mais ne sois pas imprudente. On peut trouver un autre moyen... »« Quel autre moyen ? » Je l'ai interrompu. « Attaquer avec des armes à longue portée ? Bernard mourrait. Envoyer une équipe de choc ? Cet autel est entouré de pièges. Nous aurions de lourdes pertes. »« C'est toujours mieux que d'aller à la mort ! » La voix d'Éric était pleine de désespoir. « Sandrine, dès que tu t'approches de l'autel, ils peuvent te vider de ton sang ! Tu mourras, et Bernard aussi ! »J'ai regardé ses yeux inquiets, une émotion complexe s'est emparée de moi.Cet homme, ce véritable protecteur, essayait de me protéger à sa manière.Mais il ne comprenait pas.Je n'allais pas là-bas pour sauver Bernard.J'y allais pour mettre fin à une guerre.« Éric. » je lui ai touché doucement la joue. « Fais-moi confiance. »Puis je me suis tournée vers mon père, qui me regardait avec la même e

More Chapters
Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status