Chapitre 3

Bernard a frappé à ma porte tôt le lendemain matin.

« Prête ? » a-t-il demandé, le visage empreint d'une tendresse fatiguée. « Je pense qu'il faut que tu voies Guillaume par toi-même, pour que tu comprennes dans quelle situation je me trouve. »

J'ai acquiescé et je l'ai suivi jusqu'aux cachots.

Les cachots de Bois Noir étaient construits dans la partie la plus profonde du territoire, les murs de pierre épais étaient couverts de runes anciennes qui supprimaient le pouvoir des loups.

L'air était chargé d'une odeur d'argent et de désespoir.

« Il est dans la cellule la plus profonde », a dit Bernard, « pour trahison. »

Trahison.

Quelle plaisanterie !

Nous sommes passés devant des rangées de barreaux de fer, devant les sauvages et les criminels enfermés à l'intérieur.

Leurs yeux nous suivaient avec crainte et haine.

Enfin, nous nous sommes arrêtés devant la dernière cellule.

Et je l'ai vu.

Guillaume.

Mon frère.

Il était enchaîné au mur par des chaînes argentées, les mains levées au-dessus de sa tête.

L'argent avait brûlé sa peau de profondes blessures, croûtées de sang sombre et séché.

La capacité de guérison d'un loup-garou était inutile contre cela.

« Guillaume ? » J'ai serré les barres de fer, ma voix tremblant.

Il a lentement relevé la tête.

Ses yeux, autrefois brillants comme des étoiles, étaient maintenant ternes et sans vie, la lumière de son loup ayant disparu.

« Sandrine ? » Sa voix était à peine audible. « Tu es venue. »

Je voulais l'attraper, mais les barreaux m'en empêchaient.

« Regarde ton frère maintenant. » a ricané un garde derrière nous. « Autrefois Bêta, il est maintenant moins qu'un Oméga. »

Avant même que je puisse me retourner pour lancer un cri au garde, Bernard a bougé.

Une vague de pure rage d'Alpha a déferlé sur la pièce.

Dans un flou de mouvement, il a tourné sur lui-même, sa main se refermant sur la gorge du garde. Il l'a plaqué contre le mur de pierre dans un bruit sourd et écœurant.

« Toi », la voix de Bernard était un grognement bas et dangereux, comme quelque chose venant tout droit de l'enfer, « à qui appartient le nom que tu souilles avec ta sale gueule ? »

Le garde est devenu pâle, griffant désespérément la main de Bernard.

« C'est ta Luna ! » a grogné Bernard, un feu d'or brûlant dans ses yeux. Le poids de son aura d'Alpha aspirait l'air du cachot. « Si je t'entends encore lui manquer de respect, je t'arracherai moi-même la langue. »

Il a relâché son emprise. Le garde s'est effondré sur le sol, haletant et toussant violemment.

Bernard a redressé son col, comme si l'explosion brutale n'avait jamais eu lieu.

Il s'est retourné et m'a attirée dans ses bras.

« Je suis vraiment désolé, ma chérie. Tu ne devrais pas entendre cette saleté. »

Il a pressé ma tête contre sa poitrine. Sa voix était chargée de douleur refoulée. « Je sais que tu as mal. Moi aussi. Mais écoute... les preuves sont accablantes. Les anciens ont parlé. Même en tant qu'Alpha, je ne peux pas enfreindre la loi de la meute. »

Je l'ai regardé fixement, sans ciller.

Cette « loi » dont il parlait... n'était-ce pas une cage de plus qu'il avait construite ?

Cette « preuve », ne l'avait-il pas forgée de ses propres mains ?

« Sandrine. » La voix de Guillaume est faible. « Ne te bats pas contre lui pour moi. Ça n'en vaut pas la peine. »

« Guillaume... »

« Je sais. » Il m'a regardée, une lueur de clarté dans ses yeux ternes. « Il est trop tard pour les mots maintenant. »

« Tu vois ? » a murmuré Bernard derrière moi. « Même lui l'admet. Sandrine, nous devons être rationnels. Si tu continues à te battre... d'autres personnes seront blessées. »

D'autres personnes.

Il parlait de ma mère.

« Alors tu vas le laisser mourir ici ? » Je me suis retournée pour faire face à Bernard. « Tu vas regarder mon seul frère se décomposer à cause d'un empoisonnement à l'argent ? »

Bernard a ouvert la bouche pour répondre, mais soudain, ses yeux se sont voilés.

C'était l'expression d'un lien mental.

Ses sourcils se sont froncés instantanément.

Quelques secondes plus tard, il est revenu à la réalité, le visage marqué par un épuisement indéniable.

« Je suis désolé. Mon Bêta vient de m'envoyer un lien. Il y a une urgence dans la meute. » a-t-il dit, se détournant déjà. « Je dois m'en occuper, maintenant. »

Une urgence.

Quel genre d'urgence était plus important que ça ?

« Bernard. » Je l'ai appelé.

Il s'est arrêté et s'est retourné. Ses yeux contenaient encore une lueur d'agacement qui ne venait pas de moi.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

Je l'ai regardé. L'homme que j'avais cru être mon compagnon de destin.

« Rien. » ai-je dit sans ambages. « Va-t'en. »

Il m'a jeté un long regard compliqué, comme s'il voulait en dire plus. Mais finalement, il s'est retourné et a quitté le cachot à grandes enjambées.

Je restais figé, écoutant ses pas s'éloigner.

Il semblait avoir oublié quelque chose de crucial.

Je pouvais sentir l'autre bout de son lien mental.

Je savais exactement où il allait. Il allait voir Adrienne.