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Chapitre 5 — Les Murmures du Matin

Author: Nicemz
last update Last Updated: 2025-08-14 22:38:50

La première lumière filtra à travers les rideaux, fine et froide comme une lame effilée.

Léa ouvrit les yeux lentement, sans savoir si elle avait dormi ou simplement somnolé dans cet état étrange où l’on se sent à la fois présent et absent, flottant à la surface de sa propre conscience.

Elle resta immobile, les draps remontés jusqu’au menton, comme pour se protéger d’un danger invisible.

Le manoir était silencieux. Mais c’était ce genre de silence qui n’est jamais pur : un silence chargé, où chaque craquement du bois, chaque soupir des murs vous rappelle que vous êtes observé. Elle écouta un moment. Pas de pas dans le couloir, pas de voix. Seulement ce tic-tac régulier de l’horloge murale, lointain, presque étouffé.

Son corps portait encore la tension de la veille. Cette nuit-là, Aiden avait effleuré ses cheveux un geste minuscule, mais qui, étrangement, brûlait encore dans sa mémoire comme une marque invisible. Ce contact furtif lui avait laissé un sentiment contradictoire : un mélange de crainte et de trouble, comme si cet homme était à la fois la cage et la clé.

Elle se redressa. Les draps glissèrent lentement, et l’air du matin vint mordre sa peau.

Elle posa les pieds sur le tapis moelleux, mais ne se leva pas tout de suite. Elle resta assise, fixant ses mains. Ses doigts tremblaient légèrement. Elle ne savait pas si c’était à cause du froid ou à cause de ce qui l’attendait.

Elle se leva enfin et marcha jusqu’à la fenêtre. Les jardins s’étendaient devant elle, d’un vert humide et presque noir dans la lumière grise. La rosée scintillait comme un voile de diamants. Au loin, elle aperçut les grands portails en fer forgé, fermés. Même d’ici, ils semblaient pesants, inaccessibles.

Un bruit derrière elle la fit sursauter. Elle se retourna.

Clara, la gouvernante, venait d’entrer, silencieuse comme un chat. Elle portait un plateau où reposait une tasse de porcelaine fumante et un petit bol de fruits coupés.

— Bonjour, madame Knight.

Léa tressaillit à l’entente de ce nom. Il sonnait faux, comme un costume trop grand pour elle.

— Bonjour, répondit-elle dans un souffle.

Clara posa le plateau sur la table basse. Ses gestes étaient précis, presque mécaniques, mais ses yeux, eux, observaient avec attention.

— Monsieur est déjà parti, dit-elle comme on annoncerait la météo.

Léa sentit une pointe de soulagement, vite noyée par un autre sentiment qu’elle n’osa pas nommer.

— Parti ? Où ça ?

Clara haussa légèrement les épaules.

— Les affaires.

Un silence tomba entre elles. Léa prit la tasse, juste pour occuper ses mains.

Le café était amer, brûlant. Elle but une gorgée, les yeux baissés.

— Vous… vous travaillez ici depuis longtemps? demanda-t-elle, cherchant un terrain neutre.

— Assez longtemps pour savoir que, dans cette maison, il vaut mieux ne pas poser de questions.

Les mots de Clara restèrent suspendus dans l’air, comme un avertissement. Léa hocha la tête, incapable de répondre. Elle regarda par la fenêtre, observant les arbres qui se balançaient doucement dans le vent. Dans cette maison, chaque vérité pouvait être une arme.

Clara finit par s’éclipser. Le silence revint, mais il était encore plus lourd qu’avant.

Léa s’habilla lentement. Elle choisit une robe simple, fluide, qui ne marquait pas trop ses formes. Elle se regarda dans le grand miroir de la coiffeuse. Ses yeux avaient cette ombre qui ne disparaît pas après une seule nuit. Elle passa un doigt sur le rebord du miroir, comme pour en effacer le flou ou peut-être pour se rappeler qu’elle était encore là.

Elle descendit dans le hall. Le marbre sous ses pas renvoyait un écho froid. Chaque pièce du manoir semblait immense, trop vaste pour une seule personne, trop vide malgré le luxe. Les lustres scintillaient comme s’ils savaient quelque chose que leur éclat ne révélait pas.

Dans la cuisine, elle retrouva Clara, en train de ranger quelques provisions.

— Vous voulez que je vous prépare quelque chose ? demanda la gouvernante.

— Non, merci. Je vais sortir un peu.

Clara leva les yeux, surprise.

— Sortir ? Vous savez que… monsieur préfère que vous l’attendiez ici.

Léa sentit la colère monter, mais elle l’étouffa.

— Je ne vais pas loin, juste… prendre l’air.

Clara la fixa encore une seconde, puis reprit son activité, comme si elle n’avait rien entendu.

Léa enfila un manteau et sortit dans les jardins. L’air était frais, presque coupant. Elle inspira profondément. Les massifs de fleurs, parfaitement taillés, semblaient trop parfaits pour être vivants. Les statues de pierre la regardaient passer, impassibles.

En longeant l’allée principale, elle sentit la tension dans ses épaules se relâcher un peu. Ici, au moins, elle pouvait marcher sans sentir le regard d’Aiden peser sur elle. Mais le manoir restait là, massif, derrière elle, comme un témoin muet.

Elle arriva près de la grille. Ses mains effleurèrent le métal froid. Elle jeta un coup d’œil autour : personne. Les lourds verrous brillaient au soleil timide. Aucun moyen de les ouvrir de l’intérieur sans la clé. Elle serra les dents. Ce n’était pas une grille, c’était une frontière.

Un bruit de moteur la fit se retourner. Une voiture noire avançait lentement sur l’allée. Le cœur de Léa se mit à battre plus vite. Aiden.

Il sortit du véhicule avec cette même prestance, ce mélange de contrôle et d’ombre qui semblait le suivre partout. Sa chemise sombre contrastait avec la lumière pâle du matin. Il la vit près de la grille, et son regard se durcit imperceptiblement.

— Vous essayez déjà de fuir ? demanda-t-il, la voix basse mais tranchante.

Léa recula d’un pas.

— Non. Je… je voulais juste respirer.

Il s’approcha, chaque pas résonnant sur le gravier.

— Ici, Léa, l’air est le même qu’à l’intérieur. Ce qui change, c’est ce que vous croyez pouvoir faire.

Elle resta muette. Il était si proche qu’elle pouvait sentir son parfum, ce mélange subtil et froid qui, étrangement, la troublait autant qu’il l’inquiétait.

Il inclina légèrement la tête, comme pour l’examiner.

— Vous devriez faire attention. Les murs parlent. Et parfois… ils me répètent tout.

Léa sentit un frisson remonter le long de sa colonne vertébrale.

Aiden ne dit rien. Il fit un bref signe au chauffeur, puis lui tendit son bras sans un mot.

— Rentrez.

Elle hésita, puis glissa sa main sous la sienne. Le contact était froid, presque mécanique. Ils traversèrent le jardin dans un silence pesant, les graviers crissant sous leurs pas comme des murmures étouffés.

À l’intérieur, il s’éloigna vers son bureau, sans même se retourner.

Léa resta seule dans le hall. Le silence du manoir semblait l’observer, respirer autour d’elle. Elle leva les yeux vers le grand escalier, puis vers les portraits suspendus aux murs. Tous semblaient la juger.

Elle inspira lentement, comme pour se convaincre qu’elle avait encore le choix.

Mais elle savait que ce n’était plus vrai.

Elle monta les marches, une à une, sans se retourner.

Derrière elle, la porte du bureau se referma dans un claquement sec.

Comme un couperet.

Nicemz

Peut-on vraiment faire confiance à quelqu’un qui ne vous regarde jamais dans les yeux? Nicemz

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