Chapitre 3

Côme se tenait derrière elle. Dans ses yeux profonds, j'ai vu une lueur de possession et de fascination que je ne lui avais jamais connue.

Les murmures des membres de la meute alentour nous parvenaient distinctement :

« C'est la future Luna de notre meute, non ? Son essence d'Oméga… d'une pureté enivrante ! Et si je ne me trompe pas, ce collier de pierre lunaire… n'est-ce pas l'insigne réservé à une Luna de haut rang ? »

« Ça ne peut être qu'elle ! Il paraît qu'ils se connaissent depuis des années. L'Alpha Côme l'a toujours protégée en secret, interdisant tout autre Alpha de l'approcher. S'ils y sont venus ensemble aujourd'hui, c'est sûrement pour finaliser les actes de la cérémonie de marquage. Il lui a même fait construire un domaine privé rien que pour elle ! »

« C'est l'amour dont rêve tout Oméga ! Si mon Alpha ne serait-ce qu'à moitié aussi dévoué et puissant que Côme… »

Ces regards admiratifs, jaloux, inquisiteurs, m'ont atteinte comme autant de pointes acérées.

Alors que j'étais perdue dans mes pensées, la louve plus âgée qui traitait mon dossier m'a rappelée à l'ordre d'une voix basse mais distincte : « Mademoiselle ? Vos formalités sont terminées. »

Sa voix, pourtant discrète, a fait se retourner Côme.

Au moment où je rangeais mes documents dans un sac scellé anti-odeurs, son imposante silhouette s'était déjà rapprochée. Une infime lueur d'affolement a traversé son visage, vite maîtrisée par le calme contrôlé de l'Alpha : « Aria ? Qu'est-ce que tu fais ici ? »

Hélène est venue alors se suspendre gracieusement à son bras. Son parfum d'Oméga, doucereux à l'excès, m'a soulevé le cœur. Son regard posé sur moi était teinté d'une provocation à peine voilée : « Tu dois être la… demi-sœur de Côme, Aria ? Enchantée. »

Comment aurais-je pu ne pas percevoir l'insistance qu'elle avait mise sur le mot « demi-sœur » ?

« Nous serons bientôt de la même famille. Autant faire connaissance dès maintenant ! » a-t-elle ajouté avec une fausse candeur.

Mon regard a effleuré leurs corps collés l'un à l'autre, puis s'est posé sur la marque de morsure possessive déjà visible sur le cou d'Hélène. J'ai esquissé un sourire forcé : « Bonjour, future Luna. »

« Rien de particulier, je suis venue régler quelques formalités pour ma mère », ai-je menti avec calme, « Je vous laisse, je ne voudrais pas vous déranger. »

Je me suis tournée pour partir, mais Côme s'est avancé et a attrapé mon bras. Son étreinte était rude, typique de la force brutale d'un Alpha, impossible de me libérer.

« Ne te méprends pas. Je ne suis accompagné Hélène ici qu'à la demande des Sages. Tu sais combien une Oméga de sang pur comme elle est précieuse. Ils tiennent absolument à ce que je supervise personnellement les derniers détails pour la cérémonie. »

« Ce soir… il y aura un dîner de famille. Hélène y sera présente. Je te préviens à l'avance pour éviter… tout malentendu inutile. »

Voir sa fausse inquiétude à l'idée que je « fasse une scène » m'a paru soudain grotesque.

Hélène était la Luna qu'il s'apprêtait à officialiser, celle qu'il avait méthodiquement élevée au rang suprême. Maintenant que la cérémonie de leur marquage approchait et que sa vengeance touchait à sa fin, à qui voulait-il faire croire à ces explications hypocrites ?

« Sois tranquille, j'ai compris. Si c'est la volonté des Sages, tu n'as pas le choix. Je ne ferai pas d'histoires », ai-je dit en maîtrisant ma voix, « Vas-y, je t'attends chez nous. »

Il a semblé soulagé et a appelé lui-même le chauffeur pour me raccompagner.

Puis il s'est tourné vers Hélène pour l'emmener vers l'atelier de couture dédié aux robes de Luna. Ils se sont éloignés, mais le parfum d'Oméga d'Hélène, sucré et triomphant, persistait dans l'air comme une ultime moquerie...