Chapitre 14 — Le banquet du choix MARGO (19h45)J’attends devant l’immeuble.Mon reflet me renvoie une image que je peine à reconnaître. Cheveux relevés avec précision. Tailleur noir, légèrement cintré. Talons mesurés. Un rouge à lèvres discret, mais décidé.Je ne viens pas pour céder. Je viens pour regarder le pouvoir dans les yeux.Une part de moi frémit pas de peur, mais d’adrénaline.Sol de marbre. Mur d’un blanc cassé. Un silence qui enveloppe, juge, invite.Je traverse le hall comme une arène. L’ascenseur s’ouvre. Le miroir m’englobe. Je monte.Le sommet. Là où il m’attend.Quand la porte s’ouvre, tout est déjà en place.Espoir, debout près de la baie vitrée. La ville est à ses pieds, mais ce soir, son regard est pour moi. Il se retourne lentement.Un seul mot :— Margo.Je sens mon prénom comme une promesse. Ou une sentence.— Bonsoir, dis-je. Calme. Entière.Sur la table : deux couverts dressés avec soin. Une lumière douce, presque dorée. Pas de musique. Juste le bruit de nos
Chapitre 13 — Le piège du pouvoir MARGO (fin de matinée)Depuis l’échange avec Hugo, je vis dans l’attente.En attente de l’appel. En attente du regard. De l’invitation. Ou de la menace.Chaque mail que j’envoie à Espoir est un pari. Chaque dossier que je dépose est un message : Je suis là. Malgré tout.Et lui, depuis plusieurs jours, ne dit rien. Pas un mot, pas une allusion.Mais il est partout. Dans mes gestes. Dans ma nuque tendue. Dans chaque battement de cœur trop rapide au détour d’un couloir.Ce matin, je n’ai pas été surprise de recevoir le message de son assistante.« Monsieur Espoir souhaiterait revoir avec vous les éléments du dossier Simmons. Veuillez monter à 11h. »Ni la ponctuation, ni la formulation ne laissaient place à l’interprétation. Ce n’était pas une demande. C’était un rendez-vous fixé par quelqu’un qui pense encore avoir le contrôle.Je suis restée debout devant l’ascenseur, le dossier en main, les pensées en feu.Il pense que je suis venue pour obéir.Il ne
Chapitre 12 — Entre l’ombre et la lumière MARGO (fin d’après-midi)Le lendemain de ma confrontation avec Espoir, j’ai fermé la porte de son bureau sur un monde que je ne reconnaîtrai plus jamais.J’ai quitté l’open space sans bruit. Ni rage, ni fierté. Juste cette sensation d’avoir été jetée hors d’un rêve, d’un piège, d’un vertige… je ne sais plus.J’ai marché. Longtemps. Dans les rues froides, droites, trop normales. Je ne voulais pas rentrer. Pas encore. J’ai cherché un endroit neutre. Un endroit où il n’existait pas.J’ai fini par m’asseoir à la terrasse d’un petit café presque vide. Le serveur m’a regardée comme on regarde quelqu’un qui s’est perdue poliment, sans poser de question.J’ai commandé un café noir. Serré. Sans sucre. J’avais besoin d’amertume pour recouvrir la brûlure.Autour de moi, la vie suivait son rythme : rires étouffés, cliquetis de cuillères, notifications de téléphone. Moi, je n’étais que silence. Mon cœur battait encore, mais j’avais l’impression d’avoir la
Chapitre 11 — Après l’éclipse MARGO (le lendemain matin)Je suis arrivée au bureau à l’heure.En apparence : rien d’inhabituel. Mes cheveux tirés. Ma robe sobre. Un pas assuré, peut-être un peu trop.En réalité, j’ai tourné trois fois autour du bâtiment avant d’oser franchir la porte.J’ai attendu dans ma voiture, sous la pluie fine, à fixer le vide, à espérer que le monde s’effondre avant que je n’aie à recroiser ses yeux. Les gouttes glissaient lentement sur le pare-brise, et moi, je glissais avec elles. Je pensais : Il ne s’est rien passé. Il n’a rien pris. Je n’ai rien donné.Mensonges.Je suis entrée. Le hall brillait sous les néons blancs. Trop propres. Trop clairs.Chaque pas que je faisais résonnait comme un rappel.Je n’étais plus la même.L’ascenseur m’a renvoyé mon reflet. J’ai soutenu mon propre regard une seconde de trop. Mes yeux sont cernés. Mon rouge à lèvres trop parfait. Je ressemble à une femme en contrôle. Mais je ne suis qu’une illusion.INT. SALLE DE TRAVAIL — M
Chapitre 10 — L’éclipseMARGOSon souffle est brûlant contre ma peau.Ses doigts effleurent ma nuque, glissent lentement, comme s’il apprenait mon corps par cœur sans avoir besoin de le déshabiller.Je suis là, debout, offerte.Et lui… il ne me prend pas.Pas tout de suite.Il regarde. Il pèse. Il attend.Il ne parle pas. Il me lit.Et ce regard me dénude plus sûrement qu’aucune main.Autour de nous, le monde s’est effacé.Il n’y a plus de murs, plus de règles, plus de logique.Il n’y a que lui.Et moi.Et ce besoin, immense, presque douloureux, de me fondre en lui.Il approche ses lèvres. Lentement.Comme s’il savait que j’allais suffoquer à force d’attendre.Comme s’il voulait que je le supplie sans parler.Et puis il m’embrasse.Pas un baiser d’exploration.Pas une hésitation.Un baiser qui réclame. Qui ordonne. Qui me traverse comme un courant électrique.Un baiser qui me dit je suis là. Je t’ai vue. Tu es à moi.Je ne résiste pas.Je m’ouvre. Je me tends.Je me perds.Ses mains g
Chapitre 9 — Le bord du verreMARGOLe soir est tombé, et avec lui, cette impression d’étouffer un peu moins.Presque.Quand mes collègues m’ont proposé de sortir prendre un verre, j’ai hésité. Longtemps. J’avais cette voix en moi, celle qui me retenait. Celle qui disait tu sais très bien où tu dois aller ce soir.Mais je l’ai fait taire.Je suis sortie.Avec Hugo. Avec Élise, Clara, Julien. Des gens simples, directs. Normaux. Des gens qui ne me regardent pas comme s’ils voulaient me dévorer.On s’installe dans un bar pas très loin des bureaux. Terrasse animée, rires légers, verres qui s’entrechoquent.Je devrais me sentir bien.Mais je suis en apnée.Mes sens sont ailleurs. Mes yeux suivent les reflets dans les vitres. Mon corps est tendu, comme si je l’attendais. Lui. Toujours.Et pourtant, je souris. Je parle. Je joue le jeu.Clara me tend un verre de vin blanc.— À ta première sortie avec nous, dit-elle en souriant.Je lève mon verre. J’effleure les regards. Et je vois Hugo qui me