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Chapitre 7 : Le Silence avant la Tempête

Author: Darkness
last update Last Updated: 2025-11-26 21:09:58

Sofia

Elena et moi nous précipitons pour éponger avec des serviettes. Dans la confusion, alors que je suis penchée, je glisse la clé USB dans la poche secrète que j’ai cousue il y a des mois, par défi, dans la doublure de mon peignoir. Un geste invisible.

Quand Elena part, avec un sourire professionnel et un regard complice pour moi, la clé est sur moi. Brûlante. Accusatrice.

Marco monte vérifier.

— Tout va bien, Signora ?

— Mieux, merci Marco. Je pense que je vais essayer de dormir.

Il hoche la tête et sort. La porte se referme.

Le vrai combat commence maintenant.

Je compte les minutes, assise dans mon lit dans le noir. J’écoute les bruits de la maison. La télévision en bas. Les pas de Marco faisant sa ronde. Je connais son parcours. Il passe devant le bureau de Lorenzo toutes les vingt minutes.

Son bureau. L’antre du lion. Interdit. J’ai la clé. J’ai l’opportunité. Et j’ai une peur qui me tord les entrailles.

Une heure passe. Puis une autre. La nuit est profonde. Je me lève, mon peignoir serré autour de moi. Je glisse silencieusement dans le couloir obscur. La maison est un géant endormi. Chaque craquement du parquet est un coup de tonnerre.

La porte du bureau de Lorenzo est là. Massive. Menaçante. Je tends une main tremblante vers la poignée. Verrouillée. Bien sûr. Mais il y a la clé. La clé physique qu’il cache sous le buste de bronze de son père. Une faille qu’il croit que personne n’ose exploiter.

Je soulève la lourde statue, mes muscles criant sous l’effort. La clé brille dans l’obscurité. Ma respiration est un sifflement rauque. Je l’insère dans la serrure. Le déclic me semble assourdissant.

J’entre.

L’odeur de cuir et de cigare est encore plus forte ici. La lune éclaire son grand bureau, son ordinateur éteint. Mon cœur bat si fort que j’ai l’impression qu’il va réveiller toute la maison.

Je m’assois dans son fauteuil. Mon fauteuil, maintenant. J’allume l’ordinateur. La lumière bleue de l’écran m’éclaire le visage, me transformant en fantôme dans son sanctuaire. Le mot de passe. Mon dernier obstacle. J’essaye des dates. Notre anniversaire de mariage. Refusé. La date de la fondation de son « entreprise ». Refusé.

La sueur perle sur mon front. Le temps file. Marco va passer sa ronde.

Et puis, je me souviens. Une nuit, ivre de pouvoir et de whisky, il m’avait dit, les lèvres contre mon cou : « Tu es mon seul talisman, Sofia. Tout commence et finit avec toi. »

J’essaye mon nom. « Sofia ». Refusé.

J’essaye le jour de notre première rencontre.Refusé.

Mon esprit tourne à vide. Et puis, une intuition. Folle. J’écris : Mia_Vita. Ma vie.

L’écran clignote. Le bureau s’affiche.

Le souffle me manque. Il a utilisé ça. Le nom qu’il murmure dans nos moments les plus intimes. La clé de son empire numérique.

Je sors la clé USB de ma poche. Elle est froide et brûlante à la fois. Je la branche. La petite lumière rouge s’allume. Un pulsus de trahison.

Je commence à copier. Dossier après dossier. Des noms de fichiers cryptiques : « Livraison Naples », « Accord avec les Corsaires », « Comptes Zurich ». Chaque transfert est un volcan de culpabilité et de terreur qui explose en moi. Je suis en train de détruire l’homme qui dort dans notre lit. L’homme qui, d’une manière malade et déformée, donnerait sa vie pour moi.

Soudain, un bruit. Des pas dans le couloir. Lourds. Rapprochés. Marco.

La panique m’engloutit. La barre de progression est lente, trop lente. Elle n’est qu’à moitié pleine.

Les pas s’arrêtent devant la porte. Le loquet grince.

Mon monde s’effondre en un instant de silence absolu.

Le loquet grince. Un son minuscule, amplifié par le silence et la peur, qui résonne comme un coup de feu dans la pièce close.

Mon sang se glace dans mes veines. La barre de progression sur l’écran me nargue, bloquée à soixante pour cent. Soixante pour cent de trahison. Pas assez pour le sauver, Luca. Juste assez pour nous perdre, Lorenzo et moi.

Le monde se réduit à cette porte, à cette poignée qui tourne avec une lenteur insoutenable. Mon corps est de pierre, scellé dans le fauteuil de cuir qui sent son cigare et son pouvoir. Je vois notre vie défiler, non pas comme un film, mais comme un éclat d’obus – des fragments de rires étouffés, de baisers qui goûtaient le sang, de nuits où je me berçais d’illusions en regardant dormir le diable.

La porte s’ouvre.

L’ombre qui se découpe dans l’encadrement n’est pas celle de Marco. Elle est plus large, plus immobile, saturée d’une autorité qui n’a pas besoin de mots.

Lorenzo.

Il ne dit rien. Il se contente de se tenir là, vêtu de son peignoir de soie sombre, les bras le long du corps. La lumière du couloir dessine une silhouette menaçante, mais son visage reste dans l’obscurité. C’est pire. Mon esprit y projette toutes les fureurs, toutes les violences possibles.

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