La nuit venait à peine de tomber sur la ville, mais une tension sourde régnait déjà dans l’air. Kael et Liora avaient quitté précipitamment le manoir de Lorenzo après la confrontation explosive de la veille. Leurs visages portaient encore les traces de cette bataille psychologique, mais surtout, leurs cœurs battaient à l’unisson sous une même certitude : ils n’avaient plus droit à l’erreur. Chaque geste comptait désormais, chaque parole pouvait être lourde de conséquences.
Liora, assise près de la fenêtre de la chambre d’hôtel où ils avaient trouvé refuge, observait les lumières de la ville scintiller au loin. Elle avait toujours aimé ce spectacle, d’habitude rassurant. Mais ce soir, tout lui paraissait menaçant, comme si chaque néon qui clignotait était un avertissement.Kael, lui, tournait en rond dans la pièce. Sa silhouette sombre projetait une ombre presque inquiétante sur les murs pâles. Son esprit était en ébullition.— On ne peut pas rester ici éteLe soleil s’était levé, mais son éclat n’apportait pas la paix que Kael espérait. Le souffle encore court, il observait les flammes mourantes de la forteresse s’éteindre lentement derrière eux. Le manuscrit avait disparu, consumé par la lumière de son épée, mais dans son cœur, un doute corrosif persistait. Avait-il réellement sauvé le monde, ou simplement repoussé l’inévitable ?Liora, appuyée contre son bras, luttait pour rester debout. Son visage était pâle, ses traits marqués par l’épuisement. Pourtant, dans ses yeux brillait cette détermination qui l’avait toujours guidée.— Nous devons rentrer, dit-elle dans un souffle. Le monde doit savoir que le manuscrit n’existe plus.Kael acquiesça, mais Ezra secoua la tête.— Non. Le monde n’est pas prêt à entendre cela. Certains chercheront à vous ériger en héros, d’autres en coupables. Détruire une arme si puissante n’est pas un acte que tous comprendront.Kael fronça les sourcils.— Tu suggèr
Kael se tenait là, l’épée brandie au-dessus du manuscrit, le souffle court, le cœur battant à un rythme effréné. Le monde entier semblait suspendu dans cet instant. Liora, à demi inconsciente dans ses bras, lui avait confié le choix ultime. Ezra, lui, continuait à canaliser l’énergie, son corps menaçant de se disloquer sous la pression colossale des ténèbres qui cherchaient à s’échapper.La voix du Seigneur des Ombres résonna encore, émergeant du chaos comme un écho guttural :— Folle humanité… Croyez-vous pouvoir m’effacer ? Tant que ce manuscrit existera, je renaîtrai. Détruisez-le, et vous perdrez la seule arme qui pourrait vous sauver des apôtres. Gardez-le… et je reviendrai, encore, encore… jusqu’à consumer vos âmes.Kael hésita une seconde. Son esprit se déchirait entre deux choix impossibles. S’il détruisait le manuscrit, leur victoire serait totale… mais ils perdraient le seul outil qui avait permis de contrôler l’armée de l’Ombre. S’il le gardait,
Le sol vibrait comme s’il allait s’effondrer sous leurs pieds. La silhouette gigantesque qui venait d’apparaître emplissait toute la brèche, une masse informe de ténèbres et de chair parcourue de fissures incandescentes. Ses yeux écarlates perçaient l’obscurité et chaque pas qu’il faisait arrachait aux murs de la forteresse un long gémissement de pierre fracturée.Kael resserra sa prise sur son épée, la lame scintillant faiblement sous la lueur des torches qui s’éteignaient une à une. Liora, haletante, gardait la dague serrée contre sa poitrine, sentant la vibration de l’arme battre en résonance avec son propre cœur. Ezra, pour la première fois depuis qu’ils l’avaient rencontré, sembla hésiter, ses yeux s’écartant du Seigneur des Ombres avec une lueur presque humaine : la crainte.— Qu’est-ce que… c’est ? demanda Liora, sa voix à peine audible.Ezra répondit d’un souffle rauque :— Un Seigneur. Pas un apôtre. Pas un simple serviteur. Un fragment incarn
Le silence pesant qui emplissait la forteresse se brisa soudain sous un fracas lointain. Un écho sourd résonna contre les pierres, semblable à une marée de pas qui se rapprochait. Kael, Liora et Ezra échangèrent un regard instinctif, conscients que le répit dont ils avaient bénéficié venait de s’achever.— Ils arrivent, souffla Kael en refermant brutalement le manuscrit.Liora serra la dague contre elle, son cœur battant à une vitesse affolante. Elle sentait dans cette arme une vibration étrange, comme si une énergie ancestrale y sommeillait, attendant d’être libérée.Ezra, imperturbable, croisa les bras. Ses yeux scrutaient Kael avec une intensité glaciale.— Avant qu’ils ne franchissent ces murs, vous devez choisir, dit-il. Soit nous détruisons ce manuscrit et avec lui les serments qui lient les apôtres, soit vous l’utilisez pour dominer leur force. Mais dans les deux cas… il y aura des pertes.Kael serra les mâchoires.— Tu savais ce qu
Les premières lueurs du jour effleuraient à peine l’horizon quand Kael et Liora quittèrent la bâtisse en ruines. L’air était lourd, saturé de la tension laissée par la confrontation de la veille. La clairière où ils se trouvaient semblait silencieuse, mais ce silence avait quelque chose d’artificiel, comme si la nature elle-même retenait son souffle, consciente que quelque chose d’immense était en train de se jouer.Kael portait le coffre verrouillé sur son épaule. Malgré son poids, il avançait avec une détermination glaciale, chaque pas résonnant comme une promesse de ne pas céder. Liora, à ses côtés, tenait toujours le parchemin contre sa poitrine, enveloppé dans une étoffe pour le protéger de l’humidité. Ses doigts se serraient autour du tissu, comme si elle craignait que le monde entier vienne le lui arracher d’un instant à l’autre.— Où allons-nous maintenant ? demanda-t-elle, ses yeux suivant le chemin encore couvert d’ombres.Kael inspira profondéme
Kael et Liora s’étaient réfugiés dans une clairière isolée, à l’abri des regards, mais le calme n’était qu’illusoire. Chaque souffle de vent, chaque craquement de branche leur rappelait que les apôtres n’étaient peut-être pas loin. Le parchemin, qu’ils avaient arraché aux mains de l’inconnu, reposait maintenant sur une pierre plate, ses mots mystérieux et cryptiques attirant leur attention comme un aimant.Kael plia le document avec précaution et s’assit, le visage fermé, tandis que Liora restait debout, les yeux rivés sur les arbres sombres qui entouraient la clairière.— Il y a plus que ce que nous pensions… dit Kael d’une voix rauque. Ce parchemin… il contient des noms, mais pas seulement. Il y a des lieux, des codes, des instructions… quelque chose comme un plan.Liora s’accroupit à ses côtés, son regard scrutant les lignes tracées à l’encre sombre. Chaque mot semblait avoir été choisi avec une précision diabolique, chaque symbole portait un sens caché