Le sol était humide, la végétation dense, hostile.
La capsule Bêta avait atterri en plein cœur d’une forêt oubliée, quelque part entre deux zones de quarantaine.Malia portait Liora, endormie de fatigue, son front brûlant contre son cou.Aydan fendait le chemin, une machette de fortune à la main.Charles suivait, traînant un petit réacteur à énergie avec leurs seules ressources.Cassiopée fermait la marche, silencieuse.— On est à combien de kilomètres de la prochaine base ? demanda Malia, haletante.— Aucune idée, répondit Charles. Mais ce n’est pas la distance qui compte.C’est de savoir s’il y aura quelqu’un en vie quand on y arrivera. •Ils s’arrêtèrent près d’un vieux campement abandonné. Des traces d’humains, mais anciennes.Des cendres froides, un abri fait de tôles rouillées.Le silence régnait.— On reste ici pour la nuit, dit Aydan.— On ne devrait pas allumer de feu, ajouta CassioLe tunnel résonnait encore des échos de la dernière explosion. L’air était saturé de fumée, de chaleur et d’adrénaline. Kael courait. Chaque pas le rapprochait un peu plus de la sortie… et de Liora.Mais son corps le trahissait.Le contre-programme qu’il avait injecté déstructurait encore ses connexions internes. Il n’était plus la machine affûtée qu’ils avaient façonnée. Il redevenait homme. Avec des douleurs, des limites, des doutes.Et pourtant, il avançait.Au-dessus de lui, des signaux thermiques dansaient dans les capteurs. D’autres drones approchaient. L’un d’eux se détacha de la meute et fonça dans sa direction. Cette fois, il n’avait ni piège, ni plan.Juste ses mains. Et son instinct.Kael glissa contre le mur, attrapa une tige métallique à moitié fondue et la lança de toutes ses forces. Elle heurta le drone en plein rotor, le déséquilibrant juste assez pour qu’il s’écrase contre une paroi. Une gerbe d’étincelles illumi
La lumière rouge pulsait au plafond du couloir central. Les alarmes bourdonnaient, distordant le silence de la base comme un cri sourd dans le vide. Liora courait. Chaque pas résonnait dans sa poitrine, chaque respiration devenait plus lourde.Elle avait pris la décision sans réfléchir. Sans plan. Kael était en danger, et cette fois, elle ne fuirait pas.À son poignet, la puce d’accès activée par la clef découverte dans le journal de sa mère la guidait vers une ancienne voie de service, oubliée du système central. Elle n’avait plus qu’une chose en tête : le retrouver.Et lui dire.Lui dire qu’elle avait compris. Qu’elle savait enfin pourquoi ils avaient été créés. Pourquoi on les avait déformés pour mieux les contrôler.Et qu’elle refusait de laisser ce système les écraser.— Tiens bon, murmura-t-elle pour elle-même, alors que le métal grinçait sous ses pas.•Kael, de son côté, s’était réfugié dans un sas entre
Le ciel au-dessus de la base prenait une teinte étrange. Un gris bleuté, presque irréel, comme si l’atmosphère elle-même hésitait entre orage et accalmie. Les drones avaient été ralentis, mais pas neutralisés. Kael courait, chaque muscle protestant contre ce nouveau corps plus lent, plus fragile. L’injection avait laissé des séquelles immédiates. Plus de vision nocturne. Plus de trajectoire prédictive. Juste lui. Son instinct brut. Et sa volonté.Ses pas résonnaient dans les couloirs vides. Les panneaux de contrôle affichaient des clignotements rouges et jaunes. Des alertes en boucle. Mais il n’en avait que faire. Il ne cherchait plus à survivre. Il cherchait Liora.Quelque part, elle savait déjà.Il le sentait.⸻Dans l’aile Est de la base, Liora s’était équipée d’un ancien exosquelette de niveau 1. Cassiopée tentait de la dissuader.— Tu ne peux pas te jeter là-dedans seule ! cria-t-elle.— Je ne suis pas seule. Je sui
Le sol vibrait légèrement.Un frisson imperceptible, mais pour Kael, c’était un avertissement plus précis qu’un radar. Il n’avait pas besoin de regarder derrière lui pour savoir. Les drones chasseurs approchaient.Quatre, non… cinq signatures thermiques.Compactes. Rapides. Programmées pour tuer.Il lui restait exactement vingt-trois minutes d’avance sur l’algorithme de repérage. Après quoi, chaque battement de cœur deviendrait une cible. Il enclencha discrètement le brouilleur intégré à sa montre. Sept minutes de répit. Pas plus.Il savait que c’était insuffisant.Parce qu’ils ne cherchaient pas un fugitif.Ils chassaient une anomalie.Lui.Ils connaissaient chacun de ses gestes, ses schémas de fuite, ses habitudes instinctives. Il avait été formé par eux. Forgé par leur programme. Les drones n’étaient que des extensions de lui-même. En moins humain. En plus prévisibles. Mais aussi plus implacables.Sans bruit, K
Kael relut le message au moins dix fois.« Supprime-la. Ou tu seras supprimé.Ordre PHOENIX actif. Compte à rebours lancé. »Un compte à rebours.Il restait 72 heures.Il ferma les yeux.Il avait été entraîné à ça.Conditionné. Programmable.L’émotion n’avait jamais fait partie de l’équation.Mais quelque chose, chez elle, avait changé les règles du jeu.•Dans les couloirs de la base, l’effervescence montait.Liora avait convoqué la première assemblée publique du projet Terre Neuve.Tous les habitants y étaient invités. Même ceux qui se méfiaient encore d’elle.— Tu vas leur parler ? s’étonna Cassiopée.— Je vais leur dire la vérité. Leur dire que je ne veux pas gouverner, mais construire avec eux.— T’as pas peur ?— Si. Mais ce projet ne peut pas vivre sans transparence.Je veux qu’ils sachent ce que j’ai fait. Et ce que je veux faire maintenant.•
La base souterraine d’ORUS semblait paisible. Les enfants jouaient. Les ingénieurs travaillaient en silence. Et au cœur de ce calme nouveau, Liora sentait lentement se reconstruire une chose oubliée : la confiance. • Elle passait ses journées entre plans, réunions et longues discussions avec Ingmar Veyl. Ils débattaient des structures à créer, des codes à instaurer, de la ligne rouge à ne jamais franchir. — Pas de manipulation génétique, avait-elle dit. — Pas de transfert de conscience, avait-il approuvé. — Pas de répétition des erreurs. • Pour la première fois, Liora dessinait un avenir avec autre chose que des ruines. Mais dans un coin reculé de la base, un homme observait tout. Invisible. Silencieux. Patient. Son nom n’était pas sur les registres. Son badge était falsifié. Et son regard… trop calme pour