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Chapitre 2 – Une chaleur empoisonnée

Author: Déesse
last update Last Updated: 2025-06-20 16:46:43

Alexandre

Elle s’effondre dans mes bras sans prévenir.

Un poids de soie, trempé de fièvre et de vertige.

Mon premier réflexe est de la repousser.

Elle sent l’alcool. Le chaos. L’urgence.

Elle sent la faiblesse.

Et pourtant, je reste là.

Ses bras s’enroulent autour de moi avec la fragilité d’un piège. Sa joue repose contre mon torse comme si elle y avait toujours appartenu.

Elle ne sait pas ce qu’elle fait.

Mais moi, je sens que ce n’est pas un accident.

C’est une collision.

Son corps s’ajuste au mien avec une facilité indécente.

Je devrais être dégoûté. Écoeuré.

Mais ce n’est pas le même dégoût que d’habitude. Pas de cette répulsion froide que m’inspirent les femmes trop faciles, celles qui se jettent au cou du premier homme riche comme des chiennes en chaleur.

Elle, c’est différent.

Elle me heurte.

Je la regarde vraiment, pour la première fois.

Cette robe.

Trop sage. Trop droite. Un détail qui crie qu’elle n’est pas d’ici.

Ce maquillage maladroit, comme posé par une amie pressée.

Ces cheveux en bataille. Ces lèvres fendillées.

Et ce regard…

Putain. Ce regard.

Il flotte, noyé d’alcool, mais pas éteint.

Il lutte encore.

Il cherche une rive. Un repère. Un témoin.

Une permission d’exister autrement que dans la douleur.

— Tu es vraiment beau, murmure-t-elle en agrippant mon col. Sa voix est pâteuse, sa langue s’embrouille. Combien tu veux… pour passer la nuit avec moi ?

Mes mâchoires se crispent. Une tension fulgurante me traverse.

— Tu viens chercher un homme ? Comme ça ? En titubant ?

Elle me regarde à travers un brouillard d’orgueil blessé.

— Évidemment… Pourquoi je te demanderais ça sinon ? T’as pas compris le principe ? J’ai décidé d’être une autre ce soir…

Un rire s’échappe de sa gorge. Un éclat brisé. Presque douloureux.

On dirait un cri qu’elle n’a pas le droit de pousser.

Je la fixe, impassible.

— Très bien. Mon ton est glacial. Chaque mot est un couperet. Mais je doute que tu puisses payer une nuit avec moi.

Elle ne dit rien. Elle titube. Recule.

Et heurte le mur de l’ascenseur que j’ai déjà appelé.

Ses doigts glissent le long de ma chemise. Inconscients. Cherchant un équilibre. Ou un adieu.

Elle chancelle encore.

Et, une fois de plus, je la rattrape.

L’ascenseur s’ouvre. Un cocon d’acier et de silence.

Nous entrons.

Elle s’effondre contre moi, petite flamme tremblante.

Ses doigts se crispent sur ma veste, comme si elle s’y accrochait pour ne pas sombrer dans un puits invisible.

Et soudain…

Elle m’embrasse.

Un baiser qui n’en est pas un.

Pas un jeu. Pas une provocation.

Un cri.

Un baiser à l’envers. Un appel au secours.

Ses lèvres sont fiévreuses, brûlantes. Son souffle morde le mien.

Elle gémit, un son presque inaudible, mais il explose en moi comme une décharge.

Je devrais la repousser.

Pour mille raisons.

Mais je ne bouge pas.

Je la soutiens. Je la soulève.

Je la porte comme on porte un serment impossible. Ou un poison trop doux.

Ses bras se referment autour de ma nuque.

La porte biométrique de ma suite s’ouvre sans un bruit.

La lumière glisse sur les murs anthracite, le cuir noir, les tableaux abstraits que je ne regarde jamais.

Je la dépose sur les draps.

Ses gémissements sont plus rauques.

Son corps se cambre.

Sa robe lui colle à la peau.

Elle m’agrippe, haletante, le front en feu.

— J’ai chaud… s’il te plaît… aide-moi…

Je m’agenouille près d’elle. Mon regard fouille son visage.

Et je comprends.

Ses pupilles sont dilatées. Sa peau transpire par vagues.

Elle halète.

Pas d’envie.

De panique biologique.

— Tu as été droguée, dis-je entre mes dents. On t’a foutu quelque chose dans ton verre. Putain, espèce d’idiote… Tu t’en es même pas rendue compte.

Elle cligne des yeux.

Floue.

Mais dans son regard, un éclat.

Pas de peur.

De lucidité.

Elle m’embrasse encore.

Pas pour séduire.

Pour exister.

Ses mains cherchent ma nuque. Elle gémit. Son corps se tend contre le mien, tremble de désir ou de douleur peut-être des deux.

— Je veux juste… oublier… me sentir vivante…

Je serre les dents.

Je lutte.

Je prends ses poignets. Je la retiens. Elle se débat doucement.

Elle gémit, frustrée, mais sans peur.

Elle me regarde. Et je vois.

Pas une victime.

Une créature à vif, qui saigne de l’intérieur.

Et je flanche.

Ma bouche s’écrase sur la sienne.

Un baiser plus cru, plus profond.

Mes mains glissent sur sa peau en fusion. Ses épaules. Sa nuque. Sa clavicule tremblante.

Elle gémit.

Et j’oublie tout.

Je déboutonne sa robe. Lentement. Avec une précision chirurgicale.

Elle m’aide, maladroitement. Ses gestes sont désordonnés, mais pressés.

Sa peau se dévoile centimètre par centimètre.

Des frissons.

Des murmures.

Je la déshabille comme on dénude une vérité.

Elle est sublime.

Mais ce n’est pas son corps qui m’envoûte.

C’est ce qu’il dit en silence.

Elle se donne sans calcul. Sans peur.

Sans masque.

— Dis-moi ton nom, soufflé-je, égaré.

Elle rit doucement. Un rire sans pitié.

— Et toi, tu crois savoir qui je suis ? Moi, je ne couche pas pour l’argent. Ni par envie. Je couche pour me punir.

Ces mots me claquent au visage.

Mais je suis déjà trop loin.

Trop enfoui dans cette chaleur empoisonnée.

Je me débarrasse de ma chemise. Puis du reste.

Nos corps se cherchent. S’attaquent. Se consolent.

Je la pénètre lentement.

Sa chaleur m’engloutit, presque irréelle.

Elle gémit. La tête rejetée en arrière.

Ses hanches se soulèvent à ma rencontre.

Ses ongles me déchirent.

Chaque mouvement est une gifle au destin.

Une lutte contre le néant.

Je l’embrasse.

Le cou. Les épaules. La bouche.

Ses seins se tendent sous ma paume.

Elle gémit encore.

Elle jouit comme on crie.

Un sanglot aigu, presque sauvage.

Je la rejoins peu après. Un râle rauque. Ma bouche collée à sa gorge.

Je reste en elle.

Longtemps.

Comme si en sortir la ferait disparaître.

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