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Chapitre 4 – La cage dorée

Author: Zuzu
last update Huling Na-update: 2025-05-21 02:26:11

Ce fut la première chose que je ressentis en revenant à moi. Pas la douleur. Pas le froid. Mais un silence écrasant, si total qu’il semblait vivant.

J’ouvris lentement les yeux.

J’étais allongée dans un lit immense, aux draps noirs, soyeux, si doux qu’ils en devenaient presque dérangeants. La lumière dorée d’un lustre suspendu au plafond se reflétait sur les murs... non, pas des murs. Des parois sculptées, entièrement recouvertes de feuilles d’or, incrustées de pierres précieuses. Rubis, émeraudes, saphirs scintillaient comme mille yeux dans l’ombre.

Où suis-je ?

Un rêve ? Un tombeau ?

Je me redressai d’un coup, le souffle court. La robe de soie noire que je portais la veille avait été changée pour une tunique légère, presque transparente. Je ne m’en souvenais pas. Quelqu’un m’avait touchée pendant mon sommeil.

Mon cœur cogna dans ma poitrine. Je jetai les draps de côté et descendis du lit.

Le sol était glacé. De marbre noir, orné de motifs en spirale. Je me dirigeai vers une porte haute, sculptée de symboles que je ne comprenais pas. Je tirai la poignée.

Rien.

Je frappai. Encore. Et encore.

— Ouvrez ! criai-je. Laissez-moi sortir !

Aucune réponse. Même l’écho semblait refusé ici.

J’essayai d’autres portes — il y en avait trois, toutes aussi lourdes et dorées. Aucune ne céda.

J’étais enfermée.

Prisonnière.

Une panique froide commença à ramper sous ma peau.

Mais au lieu de crier, je me forçai à respirer. Lentement. Comme quand le moulin s’arrêtait et que je devais relancer la roue gelée à mains nues.

Je reculai et observai la pièce. Tout était d’un luxe presque irréel. Trop parfait. Les rideaux de velours pendaient lourdement aux fenêtres qui n’ouvraient sur rien, sauf une — une seule fenêtre immense, ronde, ouverte… sur le vide.

Je m’approchai.

Le vent y entrait à peine, comme s’il était retenu par une barrière invisible. Au-delà, un précipice. Un gouffre vertigineux. Plus bas, bien plus bas, les nuages tournaient en spirale, englués dans une brume rougeoyante. Le Mont Valnor était loin, très loin sous moi. Il n’y avait ni chemin, ni corde, ni espoir de fuite.

J’étais dans un palais suspendu dans les airs.

Un palais doré.

Et moi, une proie en cage.

Ou une reine forcée.

Une cloche invisible tinta doucement.

Je me retournai.

Deux êtres entrèrent.

Ils étaient grands, vêtus de longues tuniques grises. Leur peau était pâle, presque nacrée. Leurs yeux… reptiliens. Vert éclatant, sans pupilles, fendus comme ceux d’un serpent. Leurs mouvements étaient silencieux, parfaits.

L’un d’eux tenait un plateau : des fruits exotiques, du pain chaud, un nectar fumant.

L’autre déposa à mes pieds une paire de chaussures finement tressées.

Ils ne parlèrent pas. Ne baissèrent pas les yeux. Ils se contentèrent d’incliner légèrement la tête, puis se retirèrent en silence par une ouverture secrète que je n’avais même pas remarquée.

Je me retrouvai seule, à nouveau.

Je ne touchai pas à la nourriture. Pas encore.

Je parcourus les murs à la recherche d’un passage, d’un interstice, d’un souffle d’air. Rien.

La journée passa, lente, étouffante.

La lumière ne venait pas du soleil. Elle émanait du plafond, des murs, d’un or vivant qui semblait briller d’une conscience propre. Il n’y avait pas de cycle. Pas de nuit. Pas de repère.

Plusieurs jours passèrent ainsi. Je cessai de compter au bout du troisième.

Les serviteurs apparaissaient, toujours à la même heure, sans un mot, pour m'apporter des repas, des vêtements, parfois des livres écrits dans une langue étrange que je ne comprenais pas. Le lit était refait quand je quittais la pièce. Mes vêtements lavés. Mes cheveux coiffés dans mon sommeil.

Je tentai de rester forte. D’observer. De comprendre.

Mais parfois, la solitude était un poison plus cruel que les chaînes.

Un soir — ou un matin, je n’en savais plus rien — je me postai devant la fenêtre ouverte, les mains posées sur le rebord doré. Je contemplai le vide, la brume, les courants d’air lointains.

Et si je sautais ?

Je m’imaginai chuter. Le vent, le froid, le néant.

Mais je ne bougeai pas.

Ce serait lui donner ce qu’il attend. L’abandon.

Je retournai à mon lit. S’allongeai.

Et pour la première fois, je pleurai.

Pas de rage. Pas de douleur.

Mais de vide.

Un gouffre intérieur qui s’ouvrait lentement.

Cette cage dorée était une œuvre d’art, un piège splendide, une illusion de liberté. Tout y était offert, sauf l’essentiel : la sortie. Le choix. Le monde.

Kael n’était pas revenu.

Je ne l’avais pas revu depuis notre rencontre.

Je suis un jeu pour lui. Un animal à observer. Il me teste.

Mais pourquoi ?

Pourquoi moi ?

Je me levai, saisis un bol en cristal, et le jetai contre le mur.

Il explosa dans un éclat silencieux, les morceaux disparaissant avant de toucher le sol.

Même ma rage était inutile ici.

Je me recroquevillai sur le lit, les bras autour de mes genoux.

Je repensai à mon moulin. À l’odeur du pain chaud. Aux rires des enfants du village. Aux mains calleuses de la vieille Meira.

Et je sentis que ces souvenirs commençaient déjà à pâlir.

À s’effacer.

Cette cage dorée n’avait pas besoin de barreaux.

J'avais le temps.

Et je l’userais.

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