MasukLiamMon téléphone vibre sur la table de nuit, déchirant le silence feutré de ma chambre d’hôtel. L’aube à peine levée. Un message à cette heure-ci… C’est elle. Ça ne peut être qu’elle.Mon cœur fait un bond désordonné dans ma poitrine, un mélange d’espoir aigu et d’appréhension. Je saisis l’appareil. Les mots s’affichent, simples et terribles.— Je suis partie. J’ai besoin de te voir.Partie. Le mot résonne. Partie de chez elle. De lui. La décision est prise. L’irréversible est en marche.Ma première réaction est un élan sauvage de triomphe. Elle a choisi. Elle m’a choisi. Le désir, la possession, l’orgueil d’avoir gagné cette femme si désirable, si intelligente, si prisonnière… Tout cela monte en moi comme une marée brûlante.Je tape une réponse rapide, les doigts agiles.— Donne-moi ton adresse. J’arrive.Je me lève, envahi par une énergie nerveuse. Je vais la voir. La prendre. La ramener ici. Enfin.Mais alors que je passe sous la douche, l’eau chaude ruisselant sur mon visage, la
IrisLa lumière de l'aube est impitoyable. Elle découpe chaque détail du salon, transformant notre refuge en preuve matérielle. Le vide en moi est si profond que j'ai l'impression de me dissoudre. Les larmes ont séché, laissant des traînées salées et une douleur rauque dans ma gorge.Le poids de son regard dans mon dos est une brûlure. Il est toujours là, debout dans l'encadrement de la porte. Spectre et geôlier. Je ne me retourne pas. Tourner la tête demanderait une énergie que je n'ai plus. Mon univers s'est rétréci à la texture du cuir sous mes doigts, au motif du tapis, à l'image de mes orteils nus et glacés.Une pensée émerge, claire et tranchante comme un éclat de verre : je ne peux pas rester ici. Cette maison n'est plus un foyer. C'est la scène du crime. Notre crime. Le sien, d'avoir orchestré cette chute. Le mien, d'y avoir succombé.— Je pars.Ma voix est un filet rauque, à peine audible. Elle ne s'adresse pas à lui, mais à l'air de la pièce, pour rendre la décision réelle.
MarcLe claquement de la porte d’entrée est un coup de feu final. Le silence qui suit est pire. Il s’engouffre dans mes oreilles, un bourdonnement assourdissant.Je suis toujours assis au bord du lit. Le creux qu’Iris a laissé dans le matelas est un cratère à côté de moi. L’espace sent encore son parfum, mêlé à l’odeur âcre de notre haine. Je regarde mes mains. Elles reposent, inertes et vides, sur mes genoux. Ces mains qui ont construit notre entreprise, serré les contrats, et qui, tout à l’heure, cherchaient à prendre ce qui ne m’appartenait plus.— Je… Je ne voulais pas… pas ça.Mes propres mots, pathétiques, résonnent dans le vide. Un mensonge. Une tentative désespérée de me laver de mes propres crimes. La vérité, elle, est venue d’Iris, tranchante et définitive.— Tu as allumé un feu, Marc, et maintenant, tu t’étonnes que ça brûle ?Le stratège. Toujours le stratège. J’ai vu l’autre homme, Liam Foster, comme une pièce sur un échiquier. J’ai vu Iris comme mon pion le plus précieux
IrisLa porte grince légèrement en s’ouvrant. Il est là, silhouette découpée dans la pénombre du couloir. Il ne dit rien. Son silence est plus lourd que tous les reproches.Il entre et referme la porte derrière lui avec un calme qui me glace le sang. Notre chambre, autrefois un refuge, est devenue une arène.— Iris.Sa voix est rauque. Il s’approche du lit où je suis assise, adossée au mur. Il s’assoit près de moi, le matelas creusant sous son poids. Sa main se pose sur ma cheville, nue sous la robe de chambre. Un contact qui autrefois m’enflammait. Aujourd’hui, ma peau se couvre de frissons, mais pas les bons.— Laisse-moi, Marc. S’il te plaît. Je suis épuisée.Il ignore ma prière. Ses doigts remontent le long de mon mollet, une caresse lente, possessive. Je ferme les yeux, essayant de m’évader, de me transporter ailleurs. Dans la pénombre du restaurant, au son d’une voix douce qui me murmurait des promesses. Mais le présent est trop insistant.Il se penche, son haleine chaude sur mo
IrisJe pousse la porte de la maison.La lumière du salon est trop vive,elle me blesse après la pénombre du restaurant.Il est là,debout près de la fenêtre, comme s’il attendait.Comme s’il savait.— Tu es rentrée tard.Sa voix est douce,trop douce.Je pose mon sac,évite son regard.— Le travail.—Toujours le travail.—Oui.Il s’approche.Je sens son parfum,celui que j’ai choisi pour lui l’année dernière.Maintenant,il me pique les narines.— Tu as dîné ?—Non. Je n’avais pas faim.—Moi j’ai préparé quelque chose. Au cas où.Je vois la table dressée, les bougies éteintes, le plat recouvert de film alimentaire.Une boule se forme dans ma gorge.Il a attendu.Il a espéré.— Désolée.—Ce n’est rien.Mais ce n’est pas rien.Rien n’est jamais rien avec lui.Chaque silence est un reproche,chaque geste une accusation voilée.Il me suit dans la cuisine tandis que je me sers un verre d’eau.Mes mains tremblent légèrement.Je les serre autour du verre.— Ça va ? tu as l’étrange.—Je suis juste
IrisLe restaurant domine la ville, suspendu entre la lumière et la nuit.À travers les baies vitrées, on distingue les toits, les phares qui serpentent, le reflet des lampadaires sur la lagune.Tout semble calme. Maîtrisé.Comme lui.Je suis arrivée la première.Toujours en avance, toujours sur la défensive.J’ai commandé un verre d’eau, rien d’autre.Mes doigts tracent des cercles sur la nappe blanche.Chaque seconde qui passe pèse comme une faute.Puis il entre.Simplement.Et le monde se réorganise autour de lui.Je n’ai pas besoin de lever la tête pour savoir que c’est lui.Je sens sa présence avant de la voir.Cette façon qu’il a d’occuper l’espace sans bruit, sans effort.Comme si tout lui appartenait déjà.Il s’approche.Nos regards se croisent.Un battement suspendu.Le temps se retient.— Tu es venue, dit-il.— Tu m’y as invitée.— Je n’étais pas sûr.— Moi non plus.Il sourit.Ce sourire que je déteste parce qu’il sait tout.Il s’assied, lentement, comme s’il reprenait une







