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TU DOIS SÉDUIRE MON PATRON
TU DOIS SÉDUIRE MON PATRON
Autor: Eternel

Chapitre 1 — L’idée

Autor: Eternel
last update Última atualização: 2025-09-13 20:25:57

Mathias

Je la regarde.

Elle range ses affaires comme si tout était normal. Comme si rien n’avait changé. Comme si le monde n’était pas en train de basculer sous mes pieds. Elle plie un vêtement, lisse le tissu, le glisse dans un tiroir. Un geste simple. Mécanique. Parfait.

Iris.

Ma femme.

Ma faiblesse.

Belle à faire vaciller un empire, oui. Élégante jusqu’à la moelle. Elle a cette allure que même les mannequins jalousent, cette présence qui aspire les regards et assomme les conversations. Elle est le genre de femme qu’on admire à distance, qu’on désire sans oser l’approcher. Et pourtant, elle m’a choisi. Moi. L’homme trop banal, trop prudent, trop logique. L’homme qui cache sa médiocrité derrière des chemises bien repassées et des sourires maîtrisés.

Six ans qu’elle dort à mes côtés. Six ans qu’elle me regarde parfois comme on observe une pièce de musée : avec curiosité, mais sans émotion.

Elle ne m’aime plus. Peut-être qu’elle ne m’a jamais aimé. Peut-être que je m’en suis contenté. Peut-être que je l’ai enfermée dans une cage dorée, et qu’elle a laissé faire.

Je l’aime. Dieu que je l’aime. Mais ce n’est plus un amour. C’est une obsession tranquille, une maladie douce, quelque chose d’irrémédiable. Et ce soir, j’ai trouvé le moyen de faire quelque chose. De transformer ce vide en action. De me battre pour une place, pour une reconnaissance, pour nous. Même si ce combat me dégoûte.

Elle se tourne à moitié vers moi. Elle ne voit pas le chaos dans mes yeux.

– Tu veux un verre ?

Je ne réponds pas. Ma gorge est sèche. Mon esprit hurle et ma bouche se tait. J’observe ses hanches qui bougent légèrement à chacun de ses gestes, son dos nu sous sa robe dos-nu, la ligne de sa nuque, la peau tendue entre ses omoplates. Il y a quelque chose de cruel à la beauté quand elle vous échappe.

Mon cœur bat trop fort. Ce n’est pas le silence qui m’oppresse, c’est tout ce qu’il cache. Je vais dire quelque chose d’irréversible. Et je sais, au fond, qu’il n’y aura pas de retour possible.

– Mathias ?

Elle m’appelle, agacée, et je me lève enfin. Je traverse le salon à pas lents, comme si marcher vers elle revenait à me jeter dans un puits sans fond.

Mes mains tremblent. Ce n’est pas la peur. Ni la fatigue. Ni même la honte. C’est… du désir. Mais pas un désir pour elle. Pas seulement. C’est le désir de tout changer. De renverser l’ordre établi. De la transformer en réponse à mon impuissance.

Je me poste devant elle. Elle me regarde avec méfiance.

– J’ai besoin de ton aide.

Elle plisse les yeux. L’incrédulité traverse son visage, fugace. Je ne demande jamais d’aide. Jamais. Je suis celui qui assure, qui prévoit, qui gère. L’homme sans faille.

– Pour quoi faire ?

Je respire lentement. Je ne dois pas flancher. Je dois lui dire. Même si tout en moi se tend, proteste, hurle à l’abomination.

– Une promotion. Une vraie. La direction. Ça fait des années que j’attends ça. Et là… une place s’ouvre. Raphaël choisit bientôt. C’est l’opportunité d’une vie.

Elle reste silencieuse quelques secondes. Puis elle s’approche d’un pas.

– Et tu veux que je t’aide à… décrocher ça ? Comment ?

Je soutiens son regard. C’est là que tout se joue. Je sens mon estomac se tordre, mes nerfs s’enflammer. J’ai honte. Mais je continue. Parce que je crois que c’est la seule façon. Parce que je suis désespéré.

– Raphaël aime les femmes qu’il ne peut pas avoir. Les femmes belles, brillantes. Les femmes comme toi. Il t’a déjà regardée, tu le sais. Et toi aussi tu l’as vu.

Elle blêmit légèrement.

– Mathias…

Sa voix tremble, à peine. Mais je la connais. Je sais ce qu’il y a dans ce ton. De la peur, oui. De la colère, aussi. Mais pas que.

Je lève les mains. Je ne veux pas qu’elle croit que je l’échange, que je la vends. Même si, au fond, c’est un peu ça.

– Ce n’est pas un ordre. Je ne t’oblige à rien. C’est… juste une idée.

Elle recule d’un pas. Et dans ce geste, je sens le froid s’installer entre nous. Un froid irréversible.

Un silence tombe. Épais. Tranchant. Elle me regarde comme si elle ne me reconnaissait plus. Et moi, je me déteste un peu plus à chaque seconde.

Puis elle murmure, presque sans voix :

– Tu veux que je couche avec lui.

Je ferme les yeux. J’aimerais pouvoir lui dire non. J’aimerais pouvoir tout effacer. Mais les mots sont là. Réels. Puissants. Cruels.

– Juste une fois. Pas plus. Pour moi. Pour nous. Pour que je décroche cette promotion. Pour que… pour qu’on sorte enfin de ce marasme. Pour qu’on soit puissants, Iris.

Elle ne répond pas. Ses lèvres frémissent. Elle pourrait pleurer. Me gifler. Hurler. Mais elle ne fait rien de tout ça.

Elle se détourne, lentement. Saisit un verre. Le remplit. Boit à petites gorgées, comme pour gagner du temps. Comme pour se remettre à penser.

Et moi, je l’observe. Chaque mouvement est une torture. Chaque silence, une punition.

Enfin, elle se tourne vers moi. Me fixe. Son regard est vide de toute douceur.

– C’est une idée.

Sa voix est calme. Trop calme.

Elle pose le verre. Quitte la pièce. Sans bruit. Sans éclat.

Et moi, je reste planté là. Le cœur en feu. La honte au ventre. Et ce vertige immense, cette impression d’avoir ouvert une porte qu’on ne pourra jamais refermer.

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