Chapitre 1

Pour éviter que la même chose ne se reproduise, j'ai dû prendre les devants et utiliser une solution non toxique pour retarder l'accouchement cette fois-ci.

J'ai appelé la guérisseuse Marie de la meute et lui ai dit de verser la dernière dose de potions.

La guérisseuse a essayé de m'en empêcher à plusieurs reprises.

« Luna, tu as déjà utilisé neuf doses. Même si cette potion n'est pas toxique, une de plus sera trop pour votre louve. »

« Fais-moi confiance, Marie. C'est la seule façon de survivre. »

Avant que Marie n'ait pu répondre, la porte a été ouverte avec une force incroyable.

Je n'ai même pas eu le temps de dire un mot avant d'être brutalement poussée dans l'eau.

Alpha Marcus a fait un signe de la main, et quelqu'un derrière lui a apporté un grand seau. « J'ai trouvé la sorcière la plus puissante pour concocter cette potion », a-t-il annoncé, « elle retarde l'accouchement et n'a pas d'effets secondaires, il te permettra de tenir un moment. »

Les gens derrière lui ont immédiatement versé le contenu du seau !

« Ah ! »

Une douleur intense m'a traversé le bas du corps quand j'ai réalisé ce qui s'était passé : ce n'était pas la potion sans danger que Marcus pensait, c'était de l'aconit qui me brûlait le corps.

« Marcus ! » J'ai haleté au milieu de la douleur. « La potion a été trafiquée ! Ce n'est pas ce que la sorcière a fait, c'est de l'aconit ! »

Je me suis recroquevillée sur moi-même, tremblant violemment.

Voyant mon visage devenir blanc comme du papier, Marcus avait un regard compliqué et, pendant un instant, il semblait inquiet.

« Arrête de mentir, ne crois pas que je vais retirer cette potion pour que tu puisses donner naissance à l'héritier de la meute plus tôt que prévu. Tu crois que je vais encore une fois me faire avoir ? »

Encore une fois, le mot m'a piqué parce que je savais à quoi il faisait référence : les mensonges d'Elaine sur le fait que je l'avais « délibérément » poussée dans les escaliers le mois dernier, provoquant une hémorragie. Elle avait sangloté que j'étais jalouse et que je voulais faire du mal à son enfant.

J'avais essayé d'expliquer qu'elle avait trébuché sur sa propre robe, mais Marcus m'avait regardée comme si j'étais un monstre.

Le même homme qui était resté sous la pluie pendant trois heures en tenant mes roses préférées, refusant de partir tant que je ne lui aurais pas pardonné d'avoir manqué notre dîner.

Je tremblais, essayant plusieurs fois avant de pouvoir sortir une phrase complète.

« Le petit arrive déjà... Avec autant d'aconit, il va mourir ! »

Marcus comprenait visiblement que c'était possible aussi.

L'hésitation venait d'apparaître sur son visage lorsque ma sœur Elaine est sortie, se tenant le ventre et soupirant.

« Marcus, ne te fâche pas, ma sœur est probablement trop nerveuse. Mais c'est tellement étrange : je l'ai croisée au centre commercial la semaine dernière. Elle a fait du shopping pendant longtemps et semblait très énergique. Comment a-t-elle pu se retrouver soudainement en accouchement prématuré ? Pourrait-il y avoir... un malentendu ? »

Mes yeux se sont agrandis.

Elle a menti !

Depuis que j'étais enceinte, je n'avais même pas quitté la maison de la meute. Comment aurais-je pu aller au centre commercial ?

Mais Marcus l'a crue. Son visage est devenu instantanément plus sombre, et il a versé les cinquante doses restantes d'extrait d'aconit dans la chambre de cérémonie.

« Tu n'as vraiment pas changé, tu ne fais que mentir ! »

« Marcus, tu crois vraiment que je mentirais à propos de notre petit ? » J'ai souri avec amertume.

Il venait de manifester de l'hésitation quand Elaine s'est soudain serré le ventre d'un air douloureux.

« Marcus... oh ! Je crois... Je crois que le bébé arrive aussi ! » Elle a haleté de façon dramatique, s'appuyant sur le cadre de la porte.

Instantanément, toute hésitation a disparu du visage de Marcus, remplacée par de la panique et de la dévotion pure.

« Elaine ! Tu vas bien ? Laisse-moi te porter. » Il s'est précipité à ses côtés et l'a soulevée avec la même douceur que celle qu'il m'avait réservée.

Il a emporté Elaine, me laissant seule avec l'aconit brûlant. Il ne s'est pas soucié des flots de sang qui s'écoulaient de mon corps faisant presque rougir l'eau d'aconit.

J'étais faible à cause de la douleur et de l'empoisonnement.

Mon petit sentait le danger et s'est battu désespérément pour naître. Mais l'aconit avait complètement supprimé mes contractions. Il ne pouvait que se débattre, impuissant, à l'intérieur de moi, piégé et suffocant.

J'ai utilisé mes dernières forces pour me traîner hors de la chambre vers la grande grille d'aération sur le mur du fond.

Marcus avait installé cette ouverture spécialement pour moi, prétendant qu'il craignait que je suffoque dans la chambre scellée.

Je n'arrivais pas à comprendre. Il y a quelques années à peine, Marcus m'avait poursuivie sans relâche pour faire de moi sa compagne. Il m'avait écrit d'innombrables lettres d'amour dans lesquelles il me jurait une dévotion éternelle.

C'était le même homme qui lisait des histoires à mon ventre tous les soirs, qui avait décoré toute une chambre d'enfant à la main parce qu'il voulait que tout soit parfait pour notre enfant. L'homme qui m'avait dit un jour : « Notre enfant aura beaucoup de chance de t'avoir comme mère, Léa. Tu l'aimeras comme tu m'aimes, complètement, inconditionnellement. »

Mais depuis que Maël était mort en sauvant la vie de Marcus il y a un mois, tout avait changé. Marcus s'en voulait, et d'une certaine manière, la présence d'Elaine, accablée de chagrin, comblait un vide que je n'arrivais pas à combler. Elle avait pleuré dans ses bras la perte de son compagnon, et les instincts protecteurs de Marcus s'étaient entièrement tournés vers elle.

Le point de rupture était venu quand Elaine avait prétendu que je l'avais poussée dans les escaliers.

« Elle est jalouse, Marcus », avait-elle sangloté, « elle ne supporte pas que tu te soucies de moi et de mon petit. Elle veut qu'on parte. » Marcus avait cru tout ce qu'elle disait.

Cette nuit-là, il s'est installé dans la chambre des invités. L'homme qui, autrefois, ne pouvait dormir sans me prendre dans ses bras, ne supportait soudain plus d'être dans la même pièce.

Dans ma vie précédente, tout était arrivé si vite. Je m'étais effondrée, impuissante, dans la chambre brûlante d'aconit, incapable d'utiliser le lien mental à cause des effets de l'aconit.

Mon téléphone était là, à un demi-mètre à peine, mais je ne pouvais que le fixer alors que la mort m'emportait.

Cette fois-ci, c'était différent.

J'ai lutté contre l'agonie et j'ai réussi à attraper mon téléphone avec des doigts tremblants. Mais lorsque j'ai essayé d'appeler à l'aide, rien ne s'est passé.

Pas de signal, rien.

Marcus avait activé un brouilleur de signal, il avait pensé à tout.

Mais j'ai quand même entré un code mystérieux sur mon téléphone.

C'était un vieux protocole d'urgence que mon père m'avait appris il y a des années, un protocole qui pouvait contourner la plupart des interférences. C'était quelque chose que nous avions établi lorsque je m'étais accouplée à la meute pour la première fois, mais je n'avais jamais eu besoin de l'utiliser.

J'ai appuyé sur la touche d'envoi au moment où des pas ont résonné à l'extérieur de la porte de la chambre.

« Léa ? »